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Vers un impôt sur les aspects extérieurs de la richesse

04 Septembre 2011 À 19:30

Imposer la richesse au Maroc a toujours été un sujet tabou que l'on prend avec des pincettes. Aucun gouvernement depuis l'alternance n'a pu jouer les Robin-des-bois et s'aventurer sur un terrain aussi difficile. Mais aujourd'hui la donne a changé. Le pays a été confronté aux tirs croisés d'une conjoncture mondiale de crise, de la flambée des produits de base et d'un énorme creusement du budget de la compensation. Sans perdre de vue les engagements budgétaires au titre du dialogue social qui ont totalisé quelque 13 MMDH.

Dans une présentation devant ses collègues, l'Argentier du pays a estimé le déficit budgétaire prévisionnel à 6% et a exprimé le souhait de le réduire à 4,5% d'ici la fin de l'année. Pour renflouer ses caisses, l'Etat a besoin de ressources d'appoint et il n'y a d'autre alternative, dans ce cas, que l'impôt. C'est la raison pour laquelle, le projet de loi de Finances 2012 contient une nouvelle disposition : un impôt sur les aspects extérieurs de la fortune, apprend-on de source ministérielle. Cet impôt devra alimenter un Fonds de solidarité qui viendra au secours du système de compensation et devra booster les programmes de l'INDH.

Parallèlement à cela, le chef du gouvernement, dans sa lettre de cadrage (www.lematin.ma), a exhorté son équipe à accélérer la réforme du système de subvention des produits de base. Mais sachant qu'il s'agit d'un processus de longue haleine, les riches du pays sont appelés à mettre la main à la poche pour contribuer au développement du Maroc.

Ainsi, tout ce qui peut constituer un bien reflétant un certain niveau de richesse comme les voitures de luxe devrait être soumis à un impôt spécial. La philosophie d'un tel choix est de pouvoir récupérer une partie de la subvention dont profitent les nantis du pays pour la redistribuer aux couches nécessiteuses. En effet, un patron de société ou un grand agriculteur paient la bonbonne de gaz, le sucre ou la farine au même prix qu'un travailleur smicard.

Le fait qu'un gouvernement sortant puisse franchir le rubicon s'explique aussi par cette tendance mondiale à taxer les riches. Selon Mohamed Harakat, président du Centre international des études stratégiques et de la gouvernance globale, «cette propension vient du fait que les riches ne contribuent pas directement au développement par opposition aux salariés qui eux sont imposés à la source». Auteur d'un récent livre sur les finances publiques, chez L'Harmattan, Harakat estime qu'un taux de l'IS qui reste fixe même en dépassant un certain niveau de richesse, est appelé à changer. En tout cas, il s'agit d'un appel que les associations et partis socialistes ne cessent de scander un peu partout dans le monde.

Dans un pays comme les Etats-Unis, constatant les difficultés qui taraudent l'économie, plusieurs fortunes américaines ont pris l'initiative de contribuer à l'effort de renflouement des caisses de l'Etat. Leur philanthropie n'a pas manqué de faire des émules notamment en France. Mais est-ce que le virus de la générosité frappera-t-il les gros comptes marocains ? Les riches du pays se plieront-ils à la nouvelle disposition contenue dans le projet de Budget 2012 ou montreront-ils de la résistance ? Il faut attendre que le texte passe au Parlement pour y voir plus clair et déchiffrer les mouvements de lobbies d'un côté comme de l'autre.
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