L'humain au centre de l'action future

Sagesse et émotion avec Abd Al Malik

Le rappeur slameur Abd Al Malik a créé la surprise au festival de Fès, lors de la soirée du 8 juin. Avec des textes poétiques d'une grande intensité et des mélodies rythmés, Abd Al Malik a donné la mesure de son talent.

09 Juin 2011 À 15:50

Lors d'une de ces soirées artistiques inoubliables qui marquent l'esprit à jamais, le franco-congolais Abd Al Malik, qui s'est produit à la place Bab El Makina, a offert au public fassi des moments uniques, d'une rare charge émotive que seuls les grands artistes peuvent déclencher. «Ici je me sens chez moi. J'aime le Maroc, c'est un pays merveilleux», a-t-il indiqué, sur scène, témoignant ainsi des liens affectifs qui l'unissent au Maroc. Apportant au monde du rap et du hip-hop une esthétique nouvelle, Abd Al Malik s'approprie un style différent inspiré de sa philosophie de la pensée soufie et de l'islam auquel il s'est converti au cours de son adolescence. Abd Al Malik est ainsi un fervent défenseur d'une conception de islam tolérante et loin des préjugés.

Se démarquant de l'image stéréotypée du rappeur ou slameur rebelle pour introduire une approche poétique, Abd Al Malik fait découvrir à l'assistance ses chansons qui met en valeur des textes forts de sens et d'émotion, chantées ou récitées, accompagnées souvent d'une musique aux sonorités attachantes et qui accentuent l'intensité des paroles.

Puisant dans son répertoire riche de 4 albums, Abd Al Malik a ainsi enchanté son public avec ses titres les plus symboliques. Avec «Gibraltar», «Valentin», «Ma Jolie» ou encore «Rentrer Chez Moi», Abd Al Malik traite des sujets forts et des questions d'actualité en s'appuyant sur la narration et la métaphore. Ces titres sont toujours des appels à la réflexion, à l'observation et à la remise en question. Il a par ailleurs rendu hommage à la grande Juliette Gréco avec le titre «Roméo et Juliette», auquel ils ont travaillé ensemble.

En dehors de son côté lyrique, Abd Al Malik a également fait danser ses fans sur des rythmes faisant du rock, du jazz et de la musique électrique un ensemble cohérent et harmonieux. C'est dans cette ambiance festive qu'Abd Al Malik a conclu sa rencontre avec le public avec un vibrant hommage au Sheikh Sidi Hamza Al Qâdiri Al-Boutchichi, guide spirituel de la confrérie Qadirriyya Boutchichiyya, branche marocaine de la célèbre Qadiriyya, dont il est membre depuis une douzaine d'année.

Il lui a dédié le titre «l'Alchimiste» dans lequel il dit : « Je pleurais de peine, de l'inconsistance de ne pas être moi-même. J'étais mort et tu m'as ramené à la vie». Une expression de gratitude de cet artiste imprégné d'un humanisme irréprochable, qui se traduit, entre autres, par un intérêt pour un soufisme ouvert sur l'idée de transcendance et d'ouverture.

Un style et une conscience

Rappeur, slameur et compositeur d'origine congolaise, Abd Al Malik, de son vrai nom Régis Fayette-Mikano, est né à Paris le 14 mars 1975. Il représente la figure médiatique d'une nouvelle culture qui s'est forgée par elle-même, visant un ailleurs, un autre langage, tout en gérant les vicissitudes d'un béton carcéral. L'artiste suivra à l'université un double cursus de lettres classiques et de philosophie. Il fonde à cette époque avec son grand frère Bilal et son cousin Aissa le groupe de rap N.A.P. Il entame ensuite une carrière solo, durant laquelle il sort 4 albums, «le Face à face des cœurs» en 2004, «Gibraltar» en 2006, «Dante» en 2008 et «Château rouge» en 2010. En 2004, il écrit «Qu'Allah bénisse la France», ouvrage dans lequel il explique son cheminement personnel et défend une conception d'un Islam tolérant. Le 27 janvier 2008, il est décoré chevalier dans l'ordre des Arts et Lettres par la ministre de la Culture, Christine Albanel, lors du Marché international de l'édition musicale (MIDEM).
Copyright Groupe le Matin © 2025