06 Décembre 2012 À 17:43
Certes, tous les parents aiment leurs enfants, mais il est difficile de les aimer de la même façon. En effet, aimer ses enfants de manière égale est presque impossible ! Souvent, il y a une ressemblance entre le parent et son enfant, un trait de caractère, quelque chose qui fait qu’il se sent un peu plus proche ou plus complice de lui que des autres. L’identification du parent à un enfant, qu’elle soit physique ou de caractère, lui donne l’impression de mieux le comprendre et d’être plus complice avec lui, ce qui est tout à fait normal parce qu’aimer différemment ne signifie pas aimer moins ! Ceci est d’ailleurs valable pour tous nos objets d’amour. Nous avons, par exemple, pour tous les amis qui nous sont les plus proches des sentiments très forts. Ils sont donc «ex æquo» pour ce qui est de la «quantité» d’amour que nous leur donnons. Mais la «qualité» de chaque lien diffère. De même, un enfant aime son père et sa mère de façon différente, et cela ne signifie pas qu’il aime moins l’un que l’autre. Il les aime pour ce que chacun lui apporte. De plus, chaque enfant est né à des tournants différents de notre vie, il serait donc difficile de pouvoir tisser avec chacun d’eux des liens similaires. Toutefois, les parents ont toujours du mal à assumer ce sentiment. Ils peuvent développer un sentiment de culpabilité, car ils ressentent un amour différent pour chacun de leurs enfants. Ils veulent que tout soit égal, par ailleurs, et pour couper court à toute forme de jalousie, ils veulent aimer leurs enfants de la même façon. Or cette ambivalence est assez contradictoire, car c’est bien parce que les enfants sont différents qu’on les aime différemment ! Non seulement c’est naturel, mais en plus, c’est tout à fait souhaitable. Ceci signifie qu’on respecte leurs différences. En tant que parents, il faut aimer un enfant comme il est et l’aider à exprimer sa singularité, mais il faut aussi qu’il existe dans la famille des règles valables pour tous, y compris les parents. Les enfants, eux, savent parfaitement aimer différemment les adultes : leurs parents, leurs grand-parents, leurs frères et sœurs et cela ne leur pose aucun problème.Attention à l’excèsS’il est normal d’aimer différemment tous ses enfants, il faut s’interroger quand l’attirance, la complicité sont trop fortes. Quand on n’est pas seulement ému par son enfant, mais fasciné par lui, quand l’attachement est trop exclusif. Ces signes devraient inquiéter d’abord, parce que ce type de lien a souvent un caractère inconsciemment incestueux ensuite, parce qu’il porte préjudice aux autres membres de la fratrie qui sont confrontés au spectacle de la passion que leur père ou leur mère éprouve pour leur frère ou leur sœur alors qu’ils se sentent moins aimés. Pire encore, dans ce cas, l’enfant n’est pas aimé pour lui-même, mais pour ce que le parent retrouve en lui : un lien ancien, une part de lui-même, une image rêvée de ce qu’il voulait être. Cet amour «narcissique» n’aide pas l’enfant à grandir, et peut même être dangereux pour lui, car lui-même sentant ce qu’il représente pour l’adulte, risque de s’y aliéner. Et de découvrir plus tard, sur le divan d’un psychanalyste, que ce n’est pas l’amour de la musique qui l’a amené à devenir musicien, mais le plaisir que ce projet procurait à son père ou à sa mère.
Explications: Dr Bouchaib Karroumi, pédopsychiatre
Est-il normal que les parents aiment leurs enfants les uns plus que les autres ?En réalité, on ne peut pas faire de différence au niveau de la quantité de l’amour et de l’affection que portent les parents pour leurs enfants. Ces derniers sont tous désirés et aimés par leurs parents. Ce qui se passe c’est que pour une raison ou une autre, les parents peuvent se sentir un peu plus proches d’un enfant plus que les autres et avoir une affinité et un attachement plus forts avec lui.Quelles sont les raisons qui peuvent pousser un parent à être plus proche d’un enfant plus que les autres ?Il existe plusieurs facteurs. Premièrement, il y a le sexe de l’enfant. Par exemple, des parents qui ont deux garçons et qui attendent une fille, l’intérêt pour celle-ci peut être amplifié et vice versa. La position dans la fratrie peut également jouer un rôle dans la relation que peuvent avoir les parents avec leurs enfants. Généralement, le benjamin de la famille est le plus chouchouté, parfois c’est l’aîné… une ressemblance physique ou au niveau du caractère et du comportement peuvent aussi rendre le père ou la mère plus proche de leur enfant. Parfois encore, il peut s’agir d’un enfant qui est faible ou malade et qui a donc besoin de plus d’attention. Mais je tiens à préciser encore une fois qu’il ne s’agit pas du tout d’aimer moins un enfant.Que faut-il faire quand ces différences sont ressenties par l’enfant et qu’elles génèrent des disputes et des jalousies ?Dans une relation entre les enfants d’une même fratrie, il est normal qu’il y ait des moments de rivalité, de haine, de jalousie… Si l’enfant exprime un malaise parce qu’il se sent moins aimé, le seul moyen de le calmer est de le rassurer. Il doit comprendre qu’il est aimé autant que ses frères et sœurs. Il faut savoir verbaliser son amour et son affection. Malheureusement, les Marocains ont souvent du mal à exprimer leurs sentiments, chose qu’on remarque aussi au sein du couple.