04 Mars 2012 À 11:58
«Un Marocain à Paris» n’est rien d’autre qu’un nanar, une histoire fade qui sent le réchauffé à plein nez. Une imposture. Pour s’en rendre compte, il n’est pas besoin de se coltiner tout le film. La première demi-heure suffirait largement au spectateur averti pour comprendre le manège du réalisateur. Les belles promesses de la bande-annonce, supposées mettre l’eau à la bouche des spectateurs potentiels, tombent à l’eau pour céder la place à une déception qui vire au cauchemar.
Concrètement, et pour résumer le film de Saïd Naciri: «Un Marocain à Paris» est un amas de clichés, ponctués par des gags désuets que le spectateur reçoit en pleine figure, sans esthétique aucune. Le pitch est le suivant: «Najib, un jeune Marocain, rêve d’une nouvelle vie en Europe. Il quitte le Maroc clandestinement pour rejoindre son frère, marié depuis 20 ans à une Française… Il croise Attila et se trouve malgré lui impliqué dans une histoire sordide de drogue dans laquelle il mêle son frère et toute la petite famille de son copain d’enfance, le Juif marocain David. Najib, David et Attila vont vivre de nombreuses aventures pleines de rebondissements où l’humour est au rendez-vous.» Pour le réalisateur, le choix des trois confessions dans le film n’est pas fortuit. Le fait qu’il les ait réunis aurait pour vocation de symboliser le dialogue des cultures et de célébrer la tolérance. Dans le cafouillage de l’action, ces valeurs se sont perdues. Tout ce qui en reste, c’est un mélange d’ingrédients incompatibles qui n’arrivent pas à s’harmoniser. Des ingrédients qui font de cet OVNI du cinéma un ratage absolu.L’histoire du film est d’un simplisme assommant. Rabâcher aux spectateurs une idée (sur) exploitée sous d’autres cieux, avec plus ou moins de succès, relève de l’audace.
La ressasser d’une manière niaise et inintelligente relève du manque de respect envers ces mêmes spectateurs. Mais Saïd Naciri ne s’arrête pas là. Il exploite à l’infini une idée qui a eu du succès avec la Sitcom «Ana Ou khouya ou mratou» (Mon frère, sa femme et moi). Le public avait apprécié cette idée simple d’un jeune homme qui s’incruste dans le domicile de son frère et de sa femme. Il s’impose, avec lourdeur, et empoisonne la vie du couple avec ses interminables problèmes.
User et abuser de cette idée en l’exploitant dans tous les genres artistiques possibles et imaginables demande un culot dont seul Saïd Naciri dispose. C’est dire que Saïd Naciri a fait de la loi de Lavoisier, un credo dans la vie. «Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme», disait le savant chimiste, philosophe et économiste français. Notre cinéaste a bien retenu la leçon au point de faire de l’art du recyclage et de la «transformation» une spécialité.
À la lourdeur de l’histoire s’ajoutent la maladresse du scénario et le mauvais jeu des acteurs qui plombent ce film, magistralement raté. Et là une question s’impose : Comment Saïd Naciri est-il parvenu à convaincre les acteurs français de s’engager dans cette aventure à haut risque? Décidément, celui qui a réussi à bénéficier du fonds d’aide à la production cinématographique octroyé par le CCM (Centre cinématographique marocain) pour réaliser son film ne manque pas de ressources.
Fidèle à lui-même, Saïd Naciri nous ressort, à chaque fois, la même panoplie de gestes qui constituent son personnage. En une dizaine d’années, à jouer la comédie, il n’a pas réussi à se renouveler ou à enrichir son jeu de nouvelles techniques (par paresse ou par manque de ressources). Résultat, le spectateur s’est lassé de le voir cabotiner sans réellement faire l’effort d’interpréter un rôle. Seul public qui l’admire encore : les enfants qui trouvent du plaisir à le regarder faire le pitre sans vraiment se soucier de l’action.