Fête du Trône 2006

Benkirane serait plus prudent que son prédécesseur

Aujourd'hui que le débat sur la consistance du programme gouvernemental a pris de l'envergure, un exercice de comparaison ne serait pas superflu. Qu'est-ce qui manque à la déclaration d'Abdelilah Benkirane par rapport à celle de son prédécesseur Abbas El Fassi. Les partis de l'opposition, principalement le PAM, le RNI et l'USFP, ont pointé du doigt le manque de chiffres.

Le gouvernement est appelé à jouer sur deux fronts en même temps. Ph. KARTOUCH

26 Janvier 2012 À 18:24

Soit. Mais si l'on met les deux déclarations côte-à-côte, le constat du manque de données chiffrées se dégage de lui-même. Les membres de l'actuel gouvernement s'accordent à dire qu'un programme gouvernemental n'est pas censé relater les aspects techniques des objectifs tracés. C'est au niveau de la loi de Finances qu'une telle déclinaison budgétaire doit exister. Ces mêmes partis qui se retrouvent aujourd'hui à l'opposition ont été au pouvoir depuis au moins 2007 et ils savent pertinemment que le menu détail n'est pas du ressort d'une déclaration gouvernementale.

A l'époque, fin octobre 2007, Abbas El Fassi présentait aux députés les grandes orientations de son équipe. Plusieurs promesses n'ont pas été réalisées pour des raisons justifiées ou non. On avait promis qu'en 2012 le taux de la TVA sur les produits courants de consommation baisserait de 20 à 18 %. On a aussi estimé dans les cordes du gouvernement sortant de réduire le taux de chômage à 7 % en 2012, de réduire de 60 % le taux de travail des enfants et d'éradiquer le phénomène des petites bonnes. Qu'en est-il aujourd'hui ? N'aurait-il pas été plus prudent de ne pas s'avancer sur des chiffres, certes accrocheurs, mais difficilement réalisables ? Prenant la mesure des choses, le gouvernement Benkirane, sans trop s'étaler sur les pourcentages, promet de baisser le taux de chômage de seulement un point d'ici 2016 (de 9,1 à 8 %). En contrepartie, l'actuel gouvernement franchit le Rubicon quand il annonce l'amélioration du budget alloué à la recherche scientifique et universitaire. D'un dérisoire 0,67 % du PIB, promesse est faite de le porter à 1 %.

C'est toujours en deçà de l'objectif escompté (la moyenne OCDE est de 2,29 % du PIB), mais c'est un premier pas significatif et une reconnaissance de l'importance de la recherche dans le monde de l'innovation. Parallèlement à cela, l'équipe Benkirane veut aboutir à un taux d'analphabétisme ne dépassant pas 20% en 2016. Très ambitieux comme objectif, sachant que les tentatives pour réduire le nombre d'analphabètes au Maroc ne donnent pas toujours de résultats probants. Abstraction faite de l'effort de projection des objectifs chiffrés sur un mandat, le spectre du degré de réalisation de ces mêmes objectifs ne doit pas être perdu de vue. Après plus de 13 ans au pouvoir, l'USFP n'est pas arrivé à juguler ou du moins atténuer les manifestations du chômage des diplômés. Ces derniers haussent aujourd'hui le ton, d'aucuns s'immolent par le feu, tandis que leurs rangs continuent de grossir. Les postes budgétaires étant limités à une moyenne de 20.000 par an, l'administration est incapable de résorber le phénomène. Aujourd'hui, le gouvernement est appelé à jouer sur deux fronts en même temps : insérer le maximum de diplômés en colère et faire en sorte que la formation réponde réellement aux besoins du marché du travail.

Concernant le taux de croissance, l'actuel Exécutif a visé un peu moins que son prédécesseur, 5,5% contre 6%. Une autre prudence que l'on peut mettre sur le compte du contexte économique difficile et la rétraction de la demande européenne. La question d'amélioration de la croissance est aussi liée à la capacité d'un gouvernement à travailler ensemble. Car souvent les énergies se perdent quand elles ne sont pas mises en faisceaux. Sachant aussi que le Maroc est engagé dans plusieurs plans, programmes et projets structurants, l'action d'un gouvernement est aussi mesurée à l'aune de sa capacité à accélérer la cadence et à améliorer le rendu.

Promesse de campagne

En pleine campagne électorale, l'Istiqlal, via son programme, a osé promettre la généralisation du Ramed avant fin 2011. Pour ceux qui savent que le régime d'assistance médicale pour les démunis est à peine à ses premiers balbutiements dans une zone pilote en l'occurrence Azilal, c'est tout simplement irréalisable. Mais malgré cela, le parti d'Abbas El Fassi a tout fait pour vendre la promesse. L'exemple du Ramed est assez éloquent pour montrer qu'il n'est pas toujours salutaire d'avancer des chiffres et des deadlines que l'on ne peut honorer. Dans le domaine de la santé, le déficit est énorme et les besoins en personnels médicaux le sont également. Il est temps d'avoir une politique volontariste capable de mettre les moyens là où il faut et de suivre de près les réalisations.
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