Fête du Trône 2006

Le Sahara et la Constitution marocaine de 2011

Par Michel Rousset professeur honoraire à la Faculté de droit de Grenoble, conseiller auprès du Centre d’études internationales

Michel Rousset

12 Novembre 2012 À 18:41

La promulgation de la nouvelle Constitution du Maroc, le 29 juillet 2011, coïncide à quelques mois près avec le 36e anniversaire de la Marche verte et la récupération des provinces sahariennes occupées pendant près d’un siècle par l’Espagne. La Constitution ne pouvait naturellement pas ignorer le Sahara qui a été l’objet d’un souci permanent de tous les Marocains et de tous les Souverains qui se sont succédé sur le Trône chérifien depuis le fameux discours de Mohammed V, prononcé à M’Hamid El Ghizlane le 25 février 1958, exaltant «(…) la fidélité des tribus sahariennes» et affirmant «(…) sa volonté de poursuivre son action pour la restitution du Sahara au Maroc». Il faisait ainsi de l’intégrité territoriale du Royaume une cause sacrée de la monarchie et du peuple marocains.

Dès le préambule de la Constitution marocaine de 2011, celle-ci affirme que l’État est «(...) attaché à son unité nationale et à son intégrité territoriale (…)». Le chef de l’État est d’ailleurs le garant de l’intégrité territoriale du Royaume dans ses frontières authentiques (article 42, alinéa 2) et la Constitution lui en donne les moyens exceptionnels si cette intégrité venait à être gravement menacée (article 59).La nouvelle Charte fondamentale du Royaume affirme de même que le Maroc «(…)entend préserver, dans sa plénitude et sa diversité, son identité nationale (…)». Des confins du Rif, à travers le Moyen et le Haut Atlas, les plaines atlantiques, le Souss et jusqu’au Sahara, c’est un Maroc multiple par la diversité de ses régions, mais c’est un seul Maroc dont l’unité s’exprime par l’attachement des Marocains à son intégrité territoriale de Tanger à Lagouira. Cette unité, une et indivisible, rappelée dans le préambule de la Constitution, est hautement revendiquée parce qu’elle est le produit «d’affluents multiples», parce qu’elle a été «(…) forgée par la convergence de ses composantes arabo-islamique, amazighe et saharo-hassanie (…)». Ainsi, les collectivités régionales et la patrie nationale s’affirment comme des parties complémentaires qui s’épaulent mutuellement comme de nombreux événements historiques l’ont démontré par le passé ; le passé lointain et récent comme l’illustre, il y a trente-six ans encore, la grande Marche verte.

Ce sont ces composantes diverses qui ont contribué à la naissance de l’identité culturelle marocaine ; celle-ci, à l’instar de l’identité nationale, est le résultat de ces différents apports qui, au cours des siècles, ont enrichi le patrimoine culturel national. C’est pourquoi l’article 5 de la Constitution précitée dispose que «L’État œuvre à la préservation du Hassani, en tant que partie intégrante de l’identité culturelle marocaine unie (…)».En tant que tel, le Sahara est ainsi au cœur des principes et des constantes du Royaume, mais il l’est aussi par les dispositions du projet de statut d’autonomie des provinces du Sud. Il faut en effet rappeler que ce projet prévoit son intégration dans la Constitution du Royaume. Ce qui permettra aux populations des provinces du Sud de bénéficier des dispositions constitutionnelles qui garantissent à l’ensemble des Marocains le bénéfice des droits et libertés solennellement proclamés le 29 juillet 2011. Parmi ces libertés figurent en bonne place, à l’article 136, les principes de libre administration, de coopération et de solidarité qui sont le fondement de l’organisation régionale et territoriale. Or, ces principes ont été initialement affirmés et développés dans le projet de statut d’autonomie déposé le 11 avril 2007 à l’Organisation des Nations unies par le gouvernement marocain.

En effet, les populations du Sahara pourront gérer, selon le point 5 de l’initiative marocaine, «(…) démocratiquement leurs affaires à travers des organes législatif, exécutif et judiciaire dotés de compétences exclusives». Conformément au principe démocratique, l’organe législatif procède de l’élection au suffrage universel direct et le Parlement de la région élira le chef du gouvernement régional. En outre, les provinces du Sahara pourront, comme toutes les régions du Royaume, participer à l’élection des membres de la Chambre des conseillers et participer ainsi, à travers leurs élus à la Chambre des représentants, à l’exercice du pouvoir législatif national, à l’approbation de la politique générale du gouvernement et au contrôle de l’action de ce dernier. De cette façon, elles pourront participer, en vertu du point 5 susdit, «(…)de manière active, à la vie économique, sociale et culturelle du Royaume».On peut donc affirmer que la Constitution promulguée par dahir du 29 juillet 2011 reconnaît à la région du Sahara, davantage qu’aux autres régions du Maroc, une singularité et une autonomie qui se combinent harmonieusement avec l’appartenance à la grande nation marocaine.

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