21 Février 2012 À 19:11
Le Matin : Peut-on savoir ce qui vous intéresse dans les romans historiques ?Omar Mounir : Certains thèmes m’attirent plus que d’autres. Mon ami l’auteur Mohamed Khaireddine me disait toujours que le roman est essentiellement historique. Moi-même je suis particulièrement intéressé par l’histoire. Notre époque est riche d’hommes extraordinaires qui ont laissé des traces indélébiles. C’est sur ceux-là que je m’attarde.
Quelle époque vous inspire le plus dans vos écrits ?Mes personnages sont à la charnière de deux siècles, c’est-à-dire le passage du Maroc archaïque au Maroc moderne. Cette transition ou transformation était menée par des hommes de grande valeur. Les époques difficiles donnent toujours naissance aux gens importants, comme le cas de Bou Hmara. C’était un homme extraordinaire qui a bataillé durant 7 ans menant un Makhzen à travers des batailles dures. Raissouni fait également partie de ces personnages qui ont marqué l’histoire du Maroc. Il y a de quoi en être fier.
Quelle est la démarche que vous adoptez dans vos écrits ?Ce que je fais est sous-tendu par une certaine méthodologie. J’ai parlé du nord et maintenant je passe au nord-ouest. J’ai envie de faire le tour des régions marocaines et de m’intéresser à tous ceux qui ont dit non au colonialisme. J’espère pouvoir terminer un document historique sur un personnage très important dans la lutte contre le colonialisme, méconnu de la majorité : c’est le caid Hmad Amflous qui a régné sur les Haha et va mobiliser, face à la France en 1912, l’ensemble des Haha et des Chiadma qui étaient de simples paysans. Ces derniers vont pouvoir mener une vraie résistance avec le peu qu’ils avaient, malgré leur ignorance totale de la chose militaire. C’est le roman sur lequel je travaille actuellement.
Où puisez-vous votre inspiration ?Tout simplement en lisant beaucoup de livres que j’achète un peu partout dans le monde. J’en ai trouvé pas mal à Derb Ghallef à Casablanca. Donc, à partir de ces lectures, je pose des jalons et je commence mes recherches dans les bibliothèques à travers des documents historiques marocains, français ou autres. Pour l’ouvrage de Raissouni, je me suis inspiré d’un écrit en Anglais «Le sultan des montagnes» (The Sultan of the Mountains) de l’anglaise Rosita Forbes. Celle-ci étant venue au Maroc dans les années 20 et restée chez Raissouni environ 15 jours afin de l’interviewer. J’ai pu me procurer ce livre en Australie. Raissouni y évoque des choses inédites sur lui et sa vie privée, puis son amitié avec le Sultan Moulay Abdelhafid. C’est pour cela que le roman est écrit à la première personne.
N’envisagez-vous pas d’écrire dans un autre genre littéraire ?Oui, j’ai déjà une idée en tête. Tout simplement en partant de l’histoire, je voudrais marquer une pause. Car jusqu’à présent, j’ai parlé de grandes figures de l’histoire. À présent, j’aimerais aborder la vie d’un simple paysan du 19e siècle, qui va s’adapter à cette nouvelle modernité, à travers son déplacement à Essaouira. Ce paysan à son tour va connaître une grande destinée.
Vos livres trouvent-ils écho auprès des Marocains ? Absolument ! Et pour ne parler que de l’ouvrage sur Bouhmara, on en est à notre troisième édition. Ce qui est surprenant, c’est le fait que ce livre a été plus vendu en France.
Qu’espérez-vous à travers vos ouvrages ? Apporter une information à tous ceux qui ne connaissent pas cette période. Compléter les connaissances de ceux qui la connaissent.
Natif d’Essaouira, Omar Mounir est juriste de formation. Il a enseigné, pendant huit ans, à la Faculté de droit de Casablanca, puis exercé en tant que journaliste aux émissions internationales de Radio-Prague, tout en entretenant, à titre individuel, une activité de recherche sociale par la littérature. Omar Mounir est auteur d’essais et de romans, notamment «Nécrologie d’un siècle perdu», «Les colonialistes», «La partition de la Tchécoslovaquie», «Bou Hmara». Il vit, actuellement, à Prague.