18 Mai 2012 À 17:01
Les promoteurs immobiliers, les médecins et les entreprises arborent fièrement sur les affiches publicitaires leur emplacement près de ce projet», explique un responsable de la ville. Il ajoute que ce nouvel engouement ne peut être que bénéfique pour les commerces du boulevard et surtout pour ses immeubles où se mêlent, avec beaucoup de charme, inspirations européennes et orientales. En effet, les anciens immeubles délaissés auparavant sont actuellement convoités par les Casablancais amoureux du patrimoine art déco où il fait bon de vivre et de respirer l’Histoire. Sur plus de deux kilomètres, cette artère commerçante rassemble les plus beaux bâtiments de la ville. La rencontre de motifs décoratifs marocains et de configurations art déco européennes a produit des décors originaux où les éléments d’ornement viennent agrémenter les façades blanches et nues caractéristiques des années 1930.
Des angelots, des corbeilles de fruits, ou des têtes de lions se mélangent aux frises en zellige, en stuc ou aux balcons en bois de cèdre. Voulu par le protectorat, ce style mélange harmonieusement bien la modernité des lignes aux références décoratives traditionnelles (zellige, tuiles vertes, arcades, ferronneries, etc.). Un nombre impressionnant de bijoux art déco s’y tiennent toujours debout, pour la plupart depuis plus de 70 ans, et racontent inlassablement l’histoire d’une ville, d’une époque. Au niveau de cette artère, dénommée auparavant boulevard de la Gare, on trouve le fameux Marché central avec ses portes rappelant la Médina de Fès, le cinéma ABC, la Banque du Maroc (ancienne Bourse de Casablanca), l’immeuble Maroc-Soir (ancienne Vigie marocaine) et l’immeuble Glaoui avec ses tourelles couvertes de zelliges. L’ancien boulevard de la Gare est également connu pour ses passages : Grand Socco, Sumica et Tazi.
On ne peut parler du boulevard Mohammed V sans évoquer l’immeuble Bessonneau, communément appelé «hôtel Lincoln». Construit par l’architecte Hubert Bride en face du Marché central, cet immeuble fut le repère sur lequel s’articulait l’organisation de l’espace urbain de la ville de Casablanca au début du 20e siècle. Il fut le résultat de l’hybridation d’une construction monumentale, solennelle et massive, de type européen, avec l’architecture délicate et les ornements tarabiscotés d’inspiration marocaine. L’élargissement du boulevard Mohammed V devant le Marché central est destiné à donner du recul à cet endroit particulier. Tous les immeubles construits à la même époque ont été plus au moins calqués sur Bessonneau.
Les façades latérales de cet édifice longent, d’un côté, la rue Ibn Battouta, et de l’autre, la rue Abdelkrim El Mediouni. En 1989, le plancher d’une chambre de l’hôtel Lincoln s’est effondré causant ainsi le début d’une longue histoire de décrépitude. Ce bâtiment, classé par le ministère de la Culture, depuis l’an 2000, parmi les monuments historiques du pays, s’est transformé en un point noir de la ville blanche. Autre point noir du boulevard, l’immeuble Piot-Templier, un des vestiges coloniaux de Casablanca, construit en 1925 par l’architecte français Pierre Ancelle qui tombe, lui aussi, en ruine. Actuellement, l’association «Casamémoire» et l’Agence urbaine de Casablanca (AUC) parlent d’un projet de réhabilitation qui concernerait tout le boulevard. Dans ce cadre, un appel à manifestation d’intérêt sera lancé par l’AUC pour la rénovation de l’hôtel Lincoln. Les responsables de la ville se disent optimistes et parlent d’une nouvelle vie pour le boulevard Mohammed V.