12 Novembre 2012 À 20:12
Ce sont quelque 145 milliards de dirhams qui ont été déboursés en guise de subventions à la filière du pétrole au cours des quatre dernières années. Alors que c’est une somme de 188 milliards de dirhams qui a été versée au secteur de 1995 jusqu’à fin septembre 2012. Ce sont ces chiffres qui ont poussé le directeur général de la caisse de compensation, Najib Benamour à dire que la réforme de la caisse de compensation commence par là. Il le soutient en rapportant d’autres chiffres. En effet, selon lui, quand on éclate le volume des subventions octroyées par la Caisse de compensation par catégories l’on se rend compte que 20 milliards de dirhams vont aux gasoils, filière qui était libre par le passé, 13 milliards de dirhams dédiés au butane, huit milliards de dirhams distribués au fuel industriel, au fuel normal et au fuel spécial (selon l’ONE), et 1,5 milliard de dirhams pour l’essence... «Si on prend en considération les produits de base, l’on se rendra compte que ce qui mérite d’être subventionné c’est le sucre, la farine et le gaz butane… Donc, réformer la caisse de compensation c’est d’abord réformer l’utilisation du pétrole, notamment le gasoil», a-t-il dit en rappelant à ce niveau que c’est le transport qui absorbe jusqu’à 70% du gasoil.
Ces affirmations soutenues par le directeur général de la caisse de compensation l’ont été lors d’une rencontre organisée par le Centre de recherches Links et animée par son président Mohamed Berrada. Le directeur général de la caisse de compensation a évoqué à cette occasion les failles de la caisse et les pistes de sa réforme. Interpellé par le président du Centre Links, Mohamed Berrada, il a été amené à parler de la relation entre cette caisse et la politique des subventions. En introduisant son intervention, il a ainsi souligné que «tout le monde est préoccupé par le problème de la caisse de compensation. Mais, tout le monde n’est pas au courant des mécanismes des subventions. Car, il y a des systèmes de subvention et non pas un seul». En effet, ainsi qu’il l’a expliqué, chaque produit à un système de subvention qui lui est propre. C’est pourquoi chaque filière comme chaque produit doit avoir une réforme qui lui est propre.
«On ne peut pas venir codifier une réforme pour toutes les filières à la fois. À moins qu’on raisonne strictement au niveau du prix. Ce qui signifie qu’on va oublier la problématique fondamentale liée à l’économique, aux finances, au social, au psychologique et au politique. Malheureusement, l’on a tendance à régler ce genre de problèmes en agissant sur les prix. Il y a des ministères, où chacun essaye de tirer la couverture de son côté pour régler les problèmes du secteur à travers les prix», a souligné Najib Benamour. Émettant son avis personnel sur le sujet, en tant que chercheur, intellectuel et expert en la matière, il insiste sur le fait d’attaquer chaque filière séparément. Il propose par exemple de libéraliser la filière du sucre et de donner la subvention à l’agriculteur à l’amont pour le pousser à faire de la production sucrière. «Rappelons-le, en 2004, on était entre 60 et 65% de la couverture de nos besoins en culture sucrière. Aujourd’hui, on est seulement à 23%. Pour le sucre, la subvention, nette, était en 1996 d’un million de dirhams. Elle est, en 2012, à quatre milliards 960 millions de dirhams. Augmentation enregistrée face à une augmentation de la consommation de seulement 1 à 1,5% par an. Ce qui tranche avec les produits pétroliers et le butane où la consommation est de 6 à 7%. Ceci vient du fait que les immatriculations nouvelles de véhicules, jusqu’en 2004, ne dépassaient pas 20 à 22 mille. Depuis, on est à 110 jusqu’à 120 mille par an», explique-t-il.
Rappelons les expériences de pays étrangers qui ont du faire des refontes de leur caisse (Mexique, au Chili, Indonésie), Najib Benamour a souligné qu’elles ont un dénominateur commun. Elles ont mis sur pied un système d’information très performant qui a ainsi appelé à mettre en place des fiches synoptiques par ménage avec un suivi informatique. «C’est à ce niveau que l’exemple mexicain pourrait être intéressant, parce que c’est un système qui est centralisé. L’information est saisie au niveau local puis elle est transmise au niveau central. Au Chili, ce sont les communes qui font remontrer l’information. Au Brésil, également, il y a eu un recensement similaire». Najib Benamour, estime que le Maroc doit définir les catégories de populations : la population d’extrême pauvreté, vulnérable, pauvre et classe moyenne. «Car, il ne suffit pas de régler les problèmes de ces classes et de les monter vers le haut et tirer vers le bas la classe moyenne qui est le socle de l’économie», a-t-il dit. Quand les pouvoirs publics auront opéré un tel recensement, la réforme de la caisse de compensation serait alors plus facile à réaliser. Selon lui, la solution est simple, «il faut faire un effort au niveau du gasoil et donner une compensation aux transporteurs».