Spécial Marche verte

Des sourds-muets à l’écoute

L’association «Al Nassr pour les sourds-muets» a ouvert, il y a un an, une supérette entièrement gérée par des sourds-muets.

Une intégration réussie pour ces jeunes sourds-muets.

04 Mars 2012 À 11:48

À Témara, non loin du Collège scientifique, un havre de paix et de calme se distingue des rues bruyantes et animées du quartier. Cet eldorado s’appelle «Sup Sourd», une supérette gérée par cinq jeunes sourds-muets âgés entre 22 et 26 ans. «Nous nous sommes rendu compte que ces jeunes ne pouvaient pas suivre une formation professionnelle ou un apprentissage sur une longue durée. Il fallait donc trouver un moyen de les insérer dans la société», rapporte Brahim El Hamid, président de l’association «Al Nassr pour les sourds-muets ».

Un moyen efficace puisque ces jeunes sont au service d’une clientèle «normale» et la communication n’est pas un obstacle bien au contraire vu que «les gens du quartier les ont adoptés et se sont vite fait à l’idée, il n’y a eu aucune difficulté à se faire comprendre», continue le président de l’association.

Le langage des lèvres

En effet, sur place, une femme d’un certain âge vient faire ses courses et demande un produit à l’un des vendeurs qui s’exécute sur place. «Il vient de lire sur les lèvres ce que lui a demandé la cliente, sinon les gestes nous suffisent pour communiquer », nous expliquera Brahim El Hamid. C’est ainsi que Tarik, Abdelbari, Brahim, Nourredine et Amine ont trouvé un métier qui leur assure un revenu et leur permet de s’insérer dans la société. Ceci est possible grâce au soutien de l’American Women’s Association (AIWA). «AIWA les a accompagnés pendant plusieurs années, et nous avions organisé un “Fun Run”, il y a trois ans à leur profit et au profit de l’hôpital d’enfants, et c’est de cela que nous avions pu financer le projet de la supérette que nous espérons serait un exemple pour d’autres jeunes», explique Oumnia Seghrouchni, membre de l’association.

Un exemple pour d’autres jeunes qui, selon le président de l’association, sont de plus en plus curieux. «Non seulement la communication n’est pas un problème pour ces jeunes sourds-muets, mais ils ont réussi à attirer la curiosité des jeunes du quartier qui veulent apprendre le langage des signes pour mieux communiquer avec eux». Une intégration réussie pour ces cinq jeunes sourds-muets, qui en plus de travailler sont des artistes dans l’âme. En effet, «“Sup Sourd” est une première au Maroc, mais elle n’est pas la seule prouesse de ces passionnés puisque Tarik, Abdelbari, Brahim, Nourredine et Amine font partie du premier groupe de percussions de sourds-muets du Royaume, un des seules au Monde. «Ils n’entendent pas, certes, mais ils ressentent les vibrations et captent les échos, c’est comme cela qu’ils arrivent à faire de la musique et de la bonne musique», confie le président de l’association. Le groupe a participé à des festivals et a animé des soirées privées, laissant l’auditoire pantois et admiratif.

Finalement, l’écoute est une vertu rare. Tarik, Abdelbari, Brahim, Nourredine et Amine sont certes sourds-muets, mais ils sont à l’écoute. À l’écoute de leurs clients, à l’écoute d’un avenir qui leur promet de belles surprises…


L’association «Al Nassr» en bref

L’association «Al Nassr» est une association à but non lucratif et à caractères social, éducatif, culturel et sportif. Elle a été créée en 1990 et pratique diverses activités dans le but de faciliter l’intégration sociale de ses adhérents dans différents domaines. L’association exerce ses activités au sein de l’enceinte du Centre culturel et social «Zhor Zarka» de l’Association de la protection de la famille marocaine siégeant au douar Rja Fellah, Yaacoub Al Mansour à Rabat. L’association œuvre avec abnégation pour la création d’un centre de formation professionnelle sur le terrain de 770 m2 pour ses adhérents dans les domaines suivants : couture moderne : modélisme et stylisme, coiffure, informatique, prothèse dentaire.

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