30 Mars 2013 À 14:14
Le Matin : En tant que fervent défenseur d’un tourisme responsable, que pouvez-vous nous dire sur le tourisme durable ?Ouidad Tebbaâ : Le seul tourisme viable aujourd’hui c’est le tourisme durable. Il est évident donc que la question de la durabilité est fondamentale dans la mesure où elle implique l’ensemble des populations et surtout les plus vulnérables. Cette démarche implique aussi la question de l’environnement qui revêt une importance capitale, étant entendu qu’un tourisme durable est là pour préserver les ressources naturelles d’un pays et non pour les dilapider. Le secteur touristique doit impérativement profiter à l’ensemble des couches de la société de par notamment la place qu’il occupe en tant que fer de lance du développement futur du Royaume.
La nouvelle stratégie touristique nationale «Vision 2020» a fait du tourisme durable l’un de ses grands axes. Quels sont à vos yeux les ingrédients à même de propulser le développement durable et accélérer le tourisme ?À mon avis, la «Vision 2020» a largement pris en compte les enjeux du tourisme. Cette stratégie est venue à point nommé pour toucher, outre le balnéaire, les régions les plus enclavées du Maroc où aucun développement n’a été amorcé jusqu’à présent en matière de tourisme. Il est plus que nécessaire de mettre à profit les énormes potentialités dont regorge par exemple la région de Marrakech-Tensift-Al Haouz, telles les montagnes. L’accent doit être mis également sur un tourisme vert qui à la fois respecte l’environnement et favorise le mieux-être des populations. Nous avons longtemps occulté la question du tourisme culturel et celle liée au développement du patrimoine. Le tourisme durable peut contribuer en effet de manière efficiente à la préservation de ce patrimoine. C’est le cas dans la région de Marrakech-Tensift-Al Haouz. Les autorités de la région manifestent désormais une volonté réelle de valoriser le patrimoine pour en faire l’un des fers de lance du développement. Des dizaines de structures du patrimoine sont aujourd’hui en péril dans la région et leur sauvegarde reste tributaire de l’adoption d’une stratégie de valorisation ainsi que de la création de musées qui soient des lieux emblématiques tant pour la culture que pour la forte attractivité touristique qu’ils peuvent susciter.
Vous êtes l’initiatrice de la mise en place de la filière «Tourisme, patrimoine et développement durable» au sein de la Faculté des lettres de Marrakech. Quels sont les objectifs, la finalité et la philosophie de cette formation pédagogique ?Effectivement, la Faculté dispose désormais d’une licence et d’un master en tourisme. Elle a été l’une des premières institutions au Maroc à dispenser ces formations. Notre préoccupation en termes de tourisme et de durabilité ne date pas d’aujourd’hui et ne répond nullement à une mode ou une vogue, mais plutôt aux besoins fondamentaux de notre pays.Ce master constitue une passerelle effective entre l’entreprise et la Faculté et permet d’offrir de réelles opportunités de carrières aux lauréats. Nous avons fait de l’articulation entre durabilité, patrimoine et tourisme la clé de voûte de notre formation qui est pluridisciplinaire et implique une palette de chercheurs, d’universitaires, d’écologues et de professionnels du tourisme. Le Maroc a un besoin croissant de jeunes à la fois solidement formés et ayant une sensibilité à l’environnement et à la durabilité. Cette question doit être au cœur des préoccupations des responsables nationaux du tourisme.Après avoir travaillé très longtemps sur la «Vision 2010», notre action aujourd’hui en matière de formation pédagogique est centrée sur la nouvelle stratégie touristique nationale et la plupart des projets de fin d’études portent désormais sur le tourisme durable, le tourisme vert et la région de l’Atlas. Il serait temps d’engager une réflexion autour de la manière dont le tourisme pourrait assurer le mieux vivre des populations marginalisées et de chercher les moyens dont l’ensemble des régions du Royaume pourrait tirer profit de la manne touristique.
Comment comptez-vous accompagner la «Vision 2020» ?La formation au sein de notre établissement est en adéquation avec les exigences du moment. Les deux tiers de nos étudiants partent à l’étranger pour des stages dans des entreprises touristiques. Grâce au soutien de nombre d’organismes, nous leur offrons l’opportunité de profiter d’autres expériences professionnelles et de conforter leur savoir-faire en la matière. À travers cette formation professionnalisante et ces stages à l’étranger, nous voulons apporter notre pierre à l’édifice et contribuer à la concrétisation de la «Vision 2020». Cet accompagnement se fait également par le biais des projets de fin d’études qui doivent être à la fois en concordance avec cette vision et profitables tant pour la région que pour le pays tout entier.Je tiens dans ce contexte à relever que la Faculté est liée par des conventions de coopération et de partenariat à plusieurs institutions étrangères, dont l’Université française de Corte (Corse). À travers ce partenariat, nos étudiants auront la possibilité de décrocher un double diplôme marocain et français. Des accords de partenariat ont également été conclus avec les Universités du Québec à Montréal, de Jaen et de Murcie (Espagne) et de Genève…