03 Juin 2013 À 15:19
La Direction de l’aménagement du territoire cherche à définir une politique et une vision prospective du littoral marocain. À cette fin, elle vient de lancer une étude qui a pour objectif d’apporter les éclairages nécessaires pour une gestion intégrée et territorialisée du littoral. Action qui va dans le sens de la définition des enjeux, des objectifs, des modes de gouvernance adaptés et des priorités de développement et d’aménagement intégré de cet espace. Ce qui doit être fait en cherchant le juste équilibre entre les impératifs de protection et la nécessité d’aménager raisonnablement le littoral marocain. L’étude doit prendre en compte la mer, la terre et leurs interactions.
Quel est l’intérêt d’une telle stratégie nationale de gestion intégrée du littoral marocain ? Une telle étude est très attendue, étant donné que le Maroc a deux façades maritimes d’environ 3 500 km et une zone maritime qui dépasse un million de km². Or le littoral marocain inspire une forte inquiétude, malgré les efforts et les actions initiées pour sa protection et son aménagement. Il représente, en effet, un axe structurant du territoire national. Mais il reste un espace complexe où toutes les pressions du développement économique et démographique se cumulent et où la compétition pour l’espace est particulièrement sévère. Il est inscrit, à cet effet, parmi les préoccupations et les priorités majeures de la politique d’aménagement du territoire.Car, certes, la zone littorale représente un patrimoine environnemental et écologique riche et varié, tant par sa valeur intrinsèque que par son intérêt démographique et socio-économique. Mais ce patrimoine est convoité pour ses intérêts touristiques et économiques comprenant une faune et une flore riches, des paysages et des sites naturels d’une valeur inestimable. C’est aussi un espace de conflit d’usage et de divergence de plusieurs intérêts et de plusieurs acteurs. Il procure les ressources à la base de diverses activités économiques et fait l’objet de multiples convoitises en matière d’urbanisation, de tourisme, d’industrie, d’activités portuaires, de plaisance, etc.Un milieu instableLe basculement de la population de l’intérieur vers les rivages s’est traduit par un sous-équipement remarqué et un déséquilibre manifeste sur tous les plans. Actuellement, cet espace représente un milieu physiquement et biologiquement instable, et ne fait l’objet, en tant qu’écosystème à équilibre fragile, ni de mesures de protection, ni d’aménagements spécifiques.En effet, cet espace subit actuellement une pression urbaine considérable. Il concentre les agglomérations urbaines les plus importantes du pays, principalement dans sa partie nord-ouest puisqu’il concentre 61% des populations des grandes villes et 80% des travailleurs permanents de l’industrie. Il représente un important pôle d’attraction pour différentes activités, touristiques (53% de la capacité touristique), industrielles et commerciales… Il fait l’objet d’une forte spéculation foncière et un lieu d’urbanisation anarchique provoquant non seulement la dégradation des zones côtières, mais également la pollution des sites. Divers indicateurs poussent à réfléchir à une vision prospective de son évolution. Réflexion qui doit prendre en considération, en premier lieu, la forte tendance à l’urbanisation. Car les taux d’urbanisation sont de l’ordre de 69% sur le littoral atlantique et de 49% sur le littoral méditerranéen, selon les données de 2010. Ce qui s’ajoute à la non-maîtrise du domaine public maritime, en plus des fenêtres naturelles devenant de plus en plus rares. En deuxième lieu, il faut prendre en considération le durcissement de la côte et la tendance, soit à l’érosion (disparition de certaines plages), soit à l’ensablement et à l’envasement. En troisième lieu, la concentration des industries, dont 92% sont situées à proximité de la côte, qui déversent leurs rejets en mer, le plus souvent, sans traitement préalable, en plus des rejets des déchets liquides urbains domestiques, compliquant ainsi le problème de la pollution côtière. Un autre point à prendre en considération est celui relatif au recul des richesses halieutiques par l’action conjuguée de la pollution et de la surexploitation.Planification limitéePar ailleurs, l’impact de la littoralisation est aggravé par une planification limitée, un système juridique inefficace et inadapté aux spécificités du littoral, un éparpillement des compétences et un manque d’arbitrage et de cohérence des actions. Par conséquent, une démarche de gouvernance de cet espace s’impose et sa gestion intégrée doit constituer à l’heure actuelle une priorité des pouvoirs publics. Elle doit être basée sur l’intégration et la cohérence des actions, l’implication de toutes les forces vives de la société et suppose la prise en compte des spécificités des zones littorales selon une approche multidimensionnelle. Dans ce contexte, l’étude commandée par la Direction de l’aménagement du territoire servira, en effet, à forger une vision prospective sur les principales évolutions des espaces côtiers et une stratégie de leur aménagement. Stratégie qui se veut globale, intégrée, préventive et anticipative. La finalité recherchée est de proposer un ensemble cohérent d’instruments adaptables aux spécificités de ces espaces, pour assurer leur gestion intégrée et durable.
Selon la Direction de l’aménagement du territoire, cette étude est appelée à analyser les différentes composantes territoriales : physique et environnementale (sensibilité, dégradation, vulnérabilité, risques…), sociale (démographie, perception…), urbaine et économique (activités, occupations spatiales, convoitises et conflits d’usage…), institutionnels et juridiques (carences réglementaires, incohérences et déphasage de la planification, modalités de gestion, chevauchements, dilution des responsabilités, etc.).