05 Décembre 2013 À 16:42
«Ne touche pas à mon jouet», «rends-moi ma poupée», «éloigne-toi de mon petit vélo», «ce ballon est à moi !»… Combien de fois n'avons-nous pas entendu ces paroles formulées par les enfants à bas âge ? Pour ces bambins, la notion de partage est le dernier des soucis. Dans leur petit microcosme, ils sont rois. Tout leur appartient, tout leur est destiné. Bref, c’est l’égocentrisme primaire. Mais attention, ces sentiments et comportements de l’enfant sont loin d’être anodins, c’est le résultat de plusieurs facteurs ! En effet, les attitudes des enfants divergent selon les tranches d’âges. Les bébés et les tout-petits sont très attachés à leurs mamans. Ce cordon ombilical très étroit et très fort les pousse à percevoir leurs propres jouets comme des biens maternels. De ce fait, ils ne se montrent pas disposés à prêter une chose qui leur est si chère.
Outre cette perception, ils développent parallèlement d’autres types de comportements. Pour eux, tous les objets qui se trouvent dans leur environnement leur appartiennent, ils veulent prendre possession de quelque chose à l’instant même. Ils souhaitent être à côté d’autres enfants, les imiter, tout en ayant l’envie d’avoir un espace de jeux propre à eux. La notion du partage n’est qu’infime chez eux. Ils acceptent d’échanger un jouet, à condition d’obtenir quelque chose en retour. À l’âge de 3 ans, les parents peuvent assister à quelques changements. Leur enfant a souvent plus de facilité de partager ses jouets. Un an plus tard, il se montre de plus en plus généreux en acceptent d’échanger des idées et des objets avec ses petits camarades et les disputes sont moins fréquentes. En effet, c’est durant cette période que l’enfant essaie de maîtriser les codes du langage.
Que faire quand notre enfant est égocentrique ? Voilà une question qui taraude certainement l’esprit de bon nombre de parents ou tuteurs. Selon Bernard Corbel psychologue-psychothérapeute Individuel-couple-famille, le forcing n’est pas la bonne solution dans pareil cas. «En contraignant l'enfant, on augmente son sentiment d'insécurité et on lui donne un exemple de brutalité. Les enfants ont seulement besoin de sécurité et de compréhension. Il faut les éveiller progressivement en cherchant tout d'abord à les accepter comme ils sont quand ils ont peur ou qu'ils disent non et en leur donnant le temps nécessaire pour accepter le partage et le prêt», suggère-t-il. Qui d'autre que les parents serait le mieux placé pour changer ces genres de comportements ? Les enfants les perçoivent comme des modèles. Ils essaient d’imiter leurs moindres faits et gestes. Il leur sera donc très difficile de vouloir encourager leurs enfants à adopter certaines pratiques comme le partage, s’ils développent des comportements égoïstes dans leurs relations quotidiennes.
«L'initiation au prêt doit être progressive et bienveillante»
On constate que beaucoup d'enfants, surtout les tout-petits, refusent souvent de partager leurs jouets ou autres objets avec leurs camarades. Qu'est-ce qui pourrait expliquer ce refus ?Le bébé et le tout jeune enfant sont dans un lien d'attachement très fort à leur mère. Le sentiment d'attachement va structurer la relation aux jouets qui deviennent des substituts maternels partiels. Il est donc difficile de confier ses jouets à de petits inconnus qui pourraient bien disparaître avec.
Ce phénomène est-il inné chez l'enfant ou est-ce le résultat de son environnement ?Comme indiqué dans sa relation au lien d'attachement maternel, le phénomène est donc naturel. Mais les éducateurs de l'environnement peuvent jouer un rôle stressant en voulant contraindre l'enfant qui pourra éprouver une panique à l'idée de ce prêt forcé. Il faut au contraire être rassurant devant cette réaction normale et compréhensive. L'initiation au prêt doit être progressive et bienveillante. L'attachement peut être perturbé et dans ce cas l'enfant peut avoir du mal à prêter surtout s'il est jaloux d'un petit frère.
Quelles sont les tranches d'âge les plus concernées par ce phénomène ?Depuis l'âge de 2 ans jusqu'à l'âge de 4 ans, l'enfant est dans une phase d'affirmation de soi qui passe par l'affirmation du non. Non aux demandes pressantes de ses éducateurs et donc aussi aux demandes de prêts de ses jouets. C'est la période ou il peut apprendre le oui et progressivement le non. Les éducateurs doivent montrer l'exemple en famille en étant partageurs et prêteurs. «Je te prête mon téléphone et toi tu me le rendras. Prête-moi ton jouet et je te le rendrai.»
Quelles stratégies suggérez-vous aux parents pour corriger ce genre de comportement ?En contraignant l'enfant, on augmente son sentiment d'insécurité et on lui donne un exemple de brutalité. Les enfants ont seulement besoin de sécurité et de compréhension. Il faut les éveiller progressivement en cherchant tout d'abord à les accepter tels qu'ils sont quand ils ont peur ou qu'ils disent non et en leur donnant le temps nécessaire pour accepter le partage et le prêt. Sans pression, en donnant l'exemple chaque fois que c'est possible et en expliquant, l'enfant intègrera les comportements sociaux sans se renier lui même et sans avoir à souffrir un jour (devenu adulte) de troubles de la confiance en soi. Il saura donner sans avoir peur, sans se renier ou au contraire dire non quand cela sera nécessaire.