Spécial Marche verte

Les cybercafés de plus en plus délaissés

Les faits : Le nom des cybercafés est intrinsèquement lié à l’usage d’Internet. Ils ont pendant longtemps été un lieu de convergence, par excellence, de tous types d’âges, curieux de dénicher les nombreux mystères qui entourent la toile.

Désormais, plus besoin de se déplacer dans un cyber, quand on peut aisément avoir la connexion WiFi chez soi.

22 Octobre 2013 À 13:58

Qui d’entre nous n’a pas un jour mis les pieds dans un cybercafé ? Nous avons tous ou presque visité les salles multimédias des lycées et universités, ou fréquenté un cybercafé de notre quartier, pour découvrir en solo ou avec des amis, les mystères de l’ordinateur. Ce grand appareil a la forme attirante et qui apparaissait comme un luxe, aux yeux de beaucoup d’adolescents. Hélas, les temps ont changé. Cette grosse machine qui nous a tant fascinés semble perdre de son lustre, depuis l’avènement de nouveaux appareils mobiles comme les PC portables, tablettes ou Smartphones. Désormais, plus besoin de se déplacer dans un cyber, quand on peut aisément avoir la connexion wifi chez soi, plus besoin de scruter un chronomètre pour compter jalousement le temps de connexion qui nous est imparti quand on peut surfer en illimité grâce aux offres des différents opérateurs qui foisonnent… Bref, on assiste à la démocratisation du net, au grand plaisir de la génération 2.0.

Les cybercafés désertés

Bien évidemment, le bonheur des uns contraste avec le malheur des autres. S’il y a des gens qui sont durement affectés par cette vulgarisation de l'usage du net, c’est bien les gérants de cybercafés. Leur chiffre d’affaires connait une baisse stratosphérique et la clientèle se fait de plus en plus désirée. Khalid, sur le comptoir de son cyber non loin de la Médina, embouche la même trompette. «Vous le constatez vous-mêmes, tout est quasiment au ralenti. Les clients ne viennent plus. Au début, toutes ces huit machines fonctionnaient, maintenant il y a seulement trois qui marchent», nous révèle-t-il.

Younouss Mandiang, rencontré dans ce cyber, abonde dans le même sens. «Je suis de passage occasionnellement. J’étais en train de marcher et je devais envoyer rapidement un mail, c’est pourquoi je suis passé. Face à la montée des PC portables et smartphones et tous ces appareils qui tendent à s’amenuiser, les cybers, la presse écrite et même le cinéma risquent de disparaitre. Selon moi, ce sont des secteurs qui n’ont pas un avenir prometteur», souligne-t-il. Aujourd’hui, l’homme au body noir semble résigné. «Je vais fermer ce cyber dans deux mois, ma décision est prise. Il y aura autre chose à la place», lance-t-il, l’air dépité. Cette mue qu'évoque implicitement Khalid, nous en avons constaté les prémices de visu, à travers les produits comme les écouteurs, casques, habillages de portables, etc. exposés derrière le comptoir.

S’adapter pour survivre

Il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier, a-t-on coutume de dire. Certains gérants de cyber en sont conscients. Pour échapper à cette nouvelle donne, des alternatives ne manquent pas. Si d’aucuns se tournent vers la photocopie ou l’impression pour limiter les dégâts, d’autres se rabattent sur les recharges de téléphone ou la vente d’appareils numériques pour arrondir leur budget. Rares sont ceux qui parviennent à résister à ce qu’on pourrait qualifier de cyber-crise. Mohamed El Fekkah figure dans ce club restreint. Il gère un atelier d’impression et cyber situé à quelques mètres de la Place des Nations unies. Il est habillé d’un t-shirt avec des rayures vertes et jaunes horizontales. «Les cybers ne sont plus ce qu’ils étaient. Aujourd’hui, la plupart des gens ont facilement accès à Internet via différents appareils numériques. On reçoit encore des clients, mais ils se connectent entre 10 et 15 minutes, juste pour télécharger un document ou effectuer une petite tâche. Auparavant, certains restaient jusqu’à 4 heures, 5 heures ou 6 heures par jour», constate-t-il. Cette crise, il la vit certes, mais à un degré moindre. «Cette crise ne nous affecte pas tellement parce que le cyber pour nous c’est secondaire, c’est juste un outil de travail soit pour récupérer des fichiers sur le net, soit pour les besoins de l’impression», affirme-t-il, tout en sourire.

Les tablettes-café, une nouvelle alternative

La vulgarisation de l’Internet et le développement de plus en plus soutenu des appareils numériques ont fini de mettre sous perfusion l’activité économique des cybercafés. Devant cette réalité, il n’existe pas mille alternatives : s’adapter à la nouvelle donne ou disparaitre. «Ils doivent d’adapter et trouver de nouvelles manières de communiquer. Ils peuvent aller dans des quartiers plus reculés comme les villages ou essayer des formules plus innovantes comme les tablettes café ou les cafés culturels», déclare Younouss Mandiang. Certains gérants ont opté pour la première solution en se tournant vers les «tablettes-café». Autrement dit, en lieu et place d’ordinateurs, ils offrent à leurs clients des tablettes électroniques pour se connecter. Cette méthode a d’ailleurs été expérimentée par Google, dans un quartier populaire, sis à Dakar au Sénégal. De quoi inspirer les gérants de cybers, tenaillés par la cyber-crise.

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