22 Août 2013 À 15:21
Au Maroc, quand un couple ne parvient pas à avoir d’enfant, l’épouse est bien souvent tenue pour responsable. Pourtant, il n’a jamais été prouvé que les femmes étaient plus stériles que leurs homologues masculins. D’ailleurs, il semblerait que parmi la population stérile, la proportion soit quasi équivalente pour les deux sexes, à savoir environ 40% chez l’homme et 40% chez la femme, selon les statistiques mondiales. Dans 10% des cas, la responsabilité serait commune, et les 10% restant concerneraient des couples ne souffrant d’aucun souci particulier, mais n’arrivant pourtant pas à enfanter.
Force est de constater que chez nous, quand un couple ne parvient pas à avoir d’enfant, c’est toujours la femme qui fait le premier pas en prenant rendez-vous avec son médecin. Grâce à elle, le spécialiste pourra clairement déterminer lequel des deux conjoints est stérile. Et quand la femme a été lavée de tout «soupçon» par son médecin, vient alors le tour de l’homme de se faire examiner. Mais là, c’est une autre histoire. Certains exigent que le médecin ré-ausculte leur femme, car «cela ne peut venir que d’elle». Pour ceux qui ont joué le jeu jusqu’au bout et à qui on a confirmé leur stérilité, là encore on doute des propos du spécialiste de la santé : c’est leur virilité qui est en jeu, pardi ! «Mon époux refusait d’admettre que c’était bel et bien lui qui était à l’origine du problème et non moi. Lors de nos récurrentes scènes de ménage, il remettait toujours le sujet sur le tapis. Et devant sa mère, il ne cessait de se plaindre de son sort et se demandait pourquoi il avait choisi une femme “stérile comme moi”.
Au final, sa mère lui a conseillé de me quitter, ce qu’il a fait. Il s’est depuis remarié… et n’a toujours pas d’enfants», explique une jeune trentenaire. En effet, l’infertilité d’un couple est parmi les premières causes du divorce, ou une femme divorcée qui serait réputée stérile voit ses chances de refaire sa vie avec un nouvel époux très fortement réduites. À elle seule, alors, de subvenir à ses propres besoins. Et quand il ne s’agit pas de divorce, c’est alors la porte ouverte à la polygamie… «Mon époux a eu pitié de moi. Il ne m’a pas répudiée. Par contre, il a pris une seconde épouse, car il n’imaginait pas ne pas avoir d’héritier.
Aujourd’hui, il vit avec sa nouvelle femme et ses deux enfants et moi je suis un peu la cinquième roue du carrosse», déclare avec amertume une autre victime des préjugés de notre société. Mais fort heureusement, les mentalités évoluent. Tous les couples stériles n’en viennent pas au drame et nombreux sont ceux qui, au fait des avancées médicales, refusent de se plier à leur sort. «Mon mari et moi avions essayé tous les moyens pour avoir un enfant. Après examens, il s’est avéré que j’avais des fibromes sur les ovaires assez mal placés.
Ma vie était en jeu. J’ai dû être hospitalisée, mais cette intervention avait un prix : celui de ma fertilité. Les risques après l’opération que je ne puisse plus enfanter étaient de l’ordre de 70%. Mais mon mari a toujours été derrière moi et m’a soutenue pour traverser cette épreuve. Mais un an et demi après mon intervention, je suis tombée enceinte, grâce à Dieu ! J’ai accouché avant le terme, à 8 mois, mais mon bébé va très bien», se réjouit Souad.
Dans plus de 30% des cas, la stérilité chez la femme est due à des troubles ovulaires dont les symptômes peuvent être une aménorrhée (absence de règles) ou une spanioménorrhée (irrégularités menstruelles). Dans 26% des cas, elle est liée à une obstruction tubaire plus connue sous l’appellation de «trompes bouchées» et causées par une maladie infectieuse, comme les pathologies sexuellement transmissibles ou une chirurgie pelvienne.
Dans 4% des cas, la stérilité peut être due à une malformation de l’utérus ou à la présence de fibromes ou de polypes sur les ovaires. Chez l’homme aussi les causes sont multiples. Souvent, il s’agit d’un mauvais fonctionnement des testicules, d’une anomalie au niveau de la production de spermatozoïdes ou d’une obstruction (ou absence) des canaux acheminant les spermatozoïdes vers l’urètre. Pour goûter au bonheur de la paternité, certains ont recours à l’adoption, car dans notre société, il est difficilement admis qu’un couple marié soit sans enfants. De plus, famille, entourage et amis mettent souvent la pression sur les jeunes mariés n’ayant pas encore enfanté, alors que leur union ne date que de quelques mois. Or, médicalement parlant, on ne peut parler de stérilité, selon les spécialistes, qu’au bout de deux années de rapports sexuels réguliers.
D’autres corrigent leurs troubles hormonaux à l’aide de médicaments prescrits par leur médecin. Pour la femme, la chirurgie tubaire permet de remédier au phénomène d’adhérence des trompes (bouchées). Pour l’homme dont le taux de spermatozoïde est trop faible, les inséminations artificielles sont le seul remède (FIV, ICSI).
La fécondation in vitro (FIV) est un traitement de la stérilité qui consiste à réaliser en laboratoire la formation d’un embryon puis à le replacer dans l'utérus. «Il existe deux variantes de la FIV : la FIV classique où les spermatozoïdes sont simplement mis dans une éprouvette en contact avec l'ovocyte qu'ils doivent pénétrer pour le féconder, et la FIV avec micro-injection appelée ICSI (Intra Cytoplasmic Sperm Injection) où un spermatozoïde est injecté à l'intérieur de chaque ovocyte», peut-on lire sur le site de la Société marocaine de fertilité et de contraception (SMFC).
En FIV classique, 50% des ovocytes obtenus seront fécondés et donneront des embryons. Parmi les couples qui tentent une ICSI, le taux de grossesses est de 25% (source FIVNAT). En ajoutant le(s) tansfert(s) d'embryons congelés, le taux passe à 23%. Ces résultats sont non négligeables pour des couples qui n'avaient d'autres choix que l'adoption. En effet, le don de spermatozoïdes et/ou d'ovules est interdit au Maroc.