08 Janvier 2014 À 17:43
La relation entre les salariés et leur entreprise commence à changer au Maroc. Outre les multinationales, de grands groupes locaux - bancaires ou de télécommunications notamment - cherchent de plus en plus une collaboration active entre les salariés et les dirigeants/propriétaires d’entreprise et une cohésion accrue pour accomplir des objectifs communs. Le partage des fruits de la croissance et du risque devient un élément prisé. A l’international, devenir actionnaire de son entreprise en est le meilleur et le plus fréquent exemple. Associant le salarié patrimonialement à la performance de l’entreprise, l’actionnariat salarié a des effets positifs sur la sensibilisation aux résultats et perspectives de la structure, la motivation et la cohésion, notamment dans le cas de groupes internationaux où l’actionnariat salarié a été mis en œuvre dans de nombreux pays dont le Maroc. Zakaria Fahim, président de la Commission ethique et bonne gouvernance à la CGEM estime, en effet, que ce sont des filiales de groupes étrangers qui ont ouvert le bal de l’actionnariat salarié au Maroc plusieurs années avant la mise en place du Plan épargne entreprise (PEE). Notons que les dispositifs d’actionnariat salarié sont parties intégrantes de l’épargne salariale et de la participation. Le PEE a été introduit par la loi de Finances 2013 modifiant le code général des impôts, qui a institué des dispositions fiscales incitatives en faveur des salariés adhérents à ce plan.
Avant cette date, les opérations de l’actionnariat salarié étaient régies soit par le Code général des impôts (cas des stock-options par exemple) ou encore le droit commun (cas de cession d’actions ou de parts de capital). Les premières initiatives d’actionnariat salariale prises par des entreprises marocaines ont été développées avec les opérations de privatisation. Mais ce n’est que depuis 2001, quand le cadre réglementaire est devenu plus transparent, que les opérations se sont multipliées. Même si le régime au Maroc ne bénéficiait pas encore des mêmes avantages fiscaux que dans les pays développés.
Aujourd’hui, le PEE permet au personnel d’une entreprise de constituer, avec l’aide de leur structure, une épargne complémentaire à moyen terme, dans un cadre fiscal et social jugé avantageux. Les avantages fiscaux sont multiples. A titre d’exemple, l’abondement versé par l’entreprise au salarié en vue de l’aider à constituer son épargne n’est ni considéré complément de salaire, ni imposable sur le revenu sauf lorsqu’il dépasse 10% du montant annuel du salaire imposable. De plus, les revenus et profits réalisés par le portefeuille de valeurs mobilières sont totalement exonérés. «Cet avantage fiscal est conditionné par le plafonnement des versements à 600.000 dirhams et par l’indisponibilité des sommes épargnées sur le PEE pendant une durée minimale de 5 ans. Les produits générés par le portefeuille doivent également être conservés pendant la période de 5 ans», précise le Conseil déontologique des valeurs mobilières (CDVM). L’actionnariat salarié constitue un véritable outil de la politique sociale. Il permet de fidéliser et de motiver les collaborateurs, de renforcer l’attractivité de l’entreprise sur le marché de l’emploi et d’optimiser les coûts salariaux.
Plusieurs grands groupes bancaires marocains y recourent dont BMCE Bank, Attijariwafa bank, Groupe Banque Populaire ou encore S2M dans la monétique dont la dernière opération en date remonte à décembre 2013. Cependant, l’actionnariat salarié est encore trop peu connu et utilisé par les PME. Par ailleurs, malgré ses avantages, les actionnaires salariés supportent un risque maximal, selon Xavier Hollandts, professeur de stratégie et gouvernement d’entreprise à France Business School campus de Clermont. Car ils investissent leur capital humain dans l’entreprise qui les emploie mais également une partie significative de leur épargne, issue de la participation et de l’intéressement, généralement bloquée pour cinq ans. Si leur entreprise a des difficultés, ils risquent de tout perdre : emploi et épargne. La mise en place d’un PEE reste en tout cas facultative. Lorsqu’une entreprise l’établit, tout salarié qui souhaite adhérer au plan peut en bénéficier. Des efforts de communication et de formation sur la culture boursière est nécessaire pour développer le dispositif. Mais ce n’est pas tout. «Le développement et l’encouragement de la politique d’actionnariat du personnel requièrent à notre avis une révision à la hausse du montant de l’exonération de l’IR et une fiscalité dérogatoire du surplus de même qu’ils requièrent une fiscalité avantageuse sur les dividendes et leur conversion en actions», résume le top management d’Attijariwafa bank.