17 Février 2014 À 16:06
Ils se sont installés à Salé médina, et plus précisément au quartier Ben Aboud en 1968. À l’époque, ils formaient une seule famille. Une vraie famille slaouie. Ils étaient au nombre de huit : un jeune couple avec six enfants. Des enfants qui ont grandi dans l’ancienne médina et qui retracent ses petites ruelles. Il s’agit des membres de la famille Ganoun qui se remémorent avec nostalgie le passé. «La médina de Salé a complètement changé. La plupart des familles slaouies sont parties. Elles ont troqué leurs anciennes maisons contre des petites villas à Labtana et Hay Salam ou encore des petits appartements dans les nouveaux quartiers.»Actuellement, l’ancienne médina est en grave état de délabrement. Délaissées, la plupart des maisons sont au bord de l’effondrement. Certaines sont même tombées en ruine. Les égouts sont défaillants. «Il suffit qu’une légère averse tombe pour que la ville ancienne se transforme en véritable piscine. Malheureusement, les autorités entretiennent uniquement la façade de l’ancienne médina et les grands quartiers comme celui de Bab Bouhaja ou encore celui de Ben Aboud, qui ont déjà bénéficié d’une opération d’entretien. L’architecture authentique de la médina est mal sauvegardée.
Les épiciers fleurissent comme des champignons brouillant ainsi l’image de la ville», explique Noufissa Ganoun, l’une des six enfants de la famille Ganoun, aujourd’hui mariée et mère d’une fille. Il n’en reste pas moins que certaines ruelles gardent encore, comme «par miracle», leur aspect authentique. Il s’agit par exemple des quartiers Boukaâ, Boutouil, Znana, Derb Khiar et d’autres qui n’ont rien perdu de leur charme, malgré le passage du temps, et ce grâce à leur emplacement loin des grandes avenues.En effet, les zones d’habitation peuvent déterminer, d’après Noufissa, la préservation de ces bâtisses historiques ou leur démolition. «On a assisté à plusieurs reprises à la démolition de riads relevant du patrimoine national. Ces derniers avaient cédé la place à de nouveaux immeubles de trois étages», nous confie cette Slaouie. Néanmoins, la famille Ganoun attribue cette modification de l’architecture de la médina aux changements de mentalité. En effet, les familles slaouies ne tiennent plus comme avant aux traditions et célèbrent de moins en moins les cérémonies religieuses.
Elles ne se réunissent plus fréquemment comme avant. Les liens familiaux entre les membres des foyers slaouis deviennent de mois en moins forts. «Il y a à peine une vingtaine d’années, les enfants ne quittaient jamais la grande demeure familiale. Aujourd'hui, cet esprit a cédé la place à l’individualisme. On ne pense plus à l’héritage familial et à la valeur mythique que représente l’espace de l’ancienne médina», ajoute Noufissa.Mais les propos des membres de cette famille deviennent subitement optimistes lorsque ses membres évoquent le grand projet de réhabilitation de cet espace. En effet, cette famille et plusieurs autres voisins que nous avons contactés semblent enchantés du lancement d’un tel projet qui confèrera enfin à Salé la place qui lui échoit en tant que ville ancestrale et authentique. Les associations œuvrant dans le domaine de la préservation du cachet historique de la médina sont également enthousiastes à l’idée de participer à la mise en œuvre d’un tel projet. «Nous avons accueilli avec un grand bonheur le lancement d’un tel projet qui contribuera enfin à sauver la médina de la détérioration rapide dont elle est victime. Nombreux sont les bâtiments qui menacent ruine dans cet espace, alors que plusieurs bâtiments se sont déjà effondrés.
Cette stratégie tombe à point nommé pour faire sortir salé de cette situation de dégradation», nous confie Moulay Ismaïl Alaoui, président de l’association Salé Moustaqbal.