20 Septembre 2014 À 15:03
En général, tout recrutement commence par une période d’essai pendant laquelle les deux parties signataires du contrat de travail vont se tester mutuellement sur leurs attentes. «Le législateur n’a pas donné de définition de la période d’essai. Il en a uniquement défini les effets juridiques. En général, sa vocation est de permettre aux deux parties de se tester et de s’évaluer mutuellement. Il s’agit de la période précédant l’engagement définitif du salarié et destinée à permettre à l’employeur de vérifier et juger les qualifications professionnelles du salarié ainsi que son aptitude à occuper ses futures fonctions ; et au salarié d’apprécier à son tour si le poste ainsi que les conditions de travail dans l’entreprise lui conviennent. C’est seulement au terme de cette période que le contrat de travail devient définitif», souligne Me Mohamed Oulkhouir.
Et d’ajouter que le Code du travail n’impose pas d’effectuer une période d’essai avant d’embaucher le salarié définitivement. Les parties peuvent donc convenir de s’en dispenser. La clause prévoyant une période d’essai ne se présume pas, il faut donc la prévoir de façon expresse auquel cas elle n’est pas opposable au salarié. À défaut d’une telle clause, l’engagement de part et d’autre, est considéré comme définitif dès le premier jour de travail dans l’entreprise.
Pa conséquent, pour qu’un salarié soit soumis à la période d’essai, il faut que le contrat de travail, la convention collective ou le règlement intérieur prévoie de façon expresse une telle disposition. Pour ce qui est de la durée de la période d’essai, l’expert précise qu’elle est fixée par l’article 14 du Code du travail selon les fonctions occupées par le salarié en CDI. Elle est de 15 jours pour les ouvriers, de 1 mois et demi pour les employés (45 jours) et de 3 mois (90 jours) pour les cadres en CDI.
Le Matin Emploi : Peut-on prévoir une période d’essai dans le cadre d’un contrat à durée déterminée (CDD) ? Mohamed Oulkhouir : En effet, il est parfaitement possible de prévoir une période d’essai pour un salarié embauché en CDD. Cependant, la durée de la période d’essai variera non pas en fonction du poste occupé, mais en fonction de la durée du CDD. C’est-à-dire que pour un salarié engagé dans le cadre d’un CDD dont la durée ne dépasse pas 6 mois, la période d’essai sera d’un jour pour chaque semaine de présence sans dépasser 15 jours. Lorsque la durée du contrat est supérieure à 6 mois, la période d’essai sera d’un mois au maximum.
Peut-on convenir d’une durée inférieure à ce que le législateur a prévu ? Il est opportun de rappeler aux lecteurs que le Code du travail fixe uniquement la durée maximum de la période d’essai. Par conséquent, rien n’empêche les parties de prévoir une durée inférieure ou de ne pas prévoir de période d’essai du tout.
Qu’en est-il d’une période d’essai qui excède le maximum légal ? Lorsque le contrat de travail prévoit une durée supérieure au plafond légal, la partie dépassant la période maximum fait partie d’un engagement définitif. À titre d’exemple, je suis embauché en CDI le 1er octobre 2014 en tant qu’ouvrier. Mon contrat de travail prévoit une période d’essai de 30 jours. Or le plafond légal est de 15 jours. De ce fait malgré les dispositions contractuelles, mon embauche deviendra définitive non pas au bout du 31e jour, mais bien au 16e.
La période d’essai peut-elle être renouvelée ?Effectivement, la période d’essai peut être renouvelée une seule fois pour une durée équivalente à la première. À titre d’exemple, un cadre qui a une période d’essai de 3 mois, peut se la voir renouveler de 3 mois supplémentaires. Le contrat de travail deviendra ainsi définitif au bout de 6 mois d’ancienneté. Dans ce cas, l’employeur est tenu d’informer son salarié, par écrit, de son intention de renouveler la période d’essai avant l’expiration de celle-ci, à défaut, le contrat devient définitif. S’agissant des contrats à durée déterminée, la période d’essai ne peut pas être renouvelée.
L’employeur peut-il mettre fin au contrat pendant la période d’essai ?Le législateur a prévu la possibilité pour chacune des parties de rompre unilatéralement la période d’essai, sans préavis ni indemnité. En revanche, un préavis doit être nécessairement effectué lorsque la rupture de la période d’essai n’est pas motivée par une faute grave du salarié et qu’elle intervient après au moins une semaine de travail. La durée de ce préavis est fixée en fonction de la périodicité de la rémunération. L’employeur doit observer un préavis de 2 jours pour le personnel payé à la journée, à la semaine ou à la quinzaine. Ce préavis est de 8 jours pour le personnel payé au mois.
Une rupture du contrat de travail par l’employeur pendant la période d’essai peut-elle être abusive ? Qu’il s’agisse de contrat à durée déterminée ou indéterminée, pendant la période d’essai, la rupture du contrat n’obéit ni aux règles des articles 33 et suivants du Code du travail, ni à celles des articles 62 et suivants du même Code. De là il suit que, en présence d’un contrat de travail, la rupture, lorsqu’elle est décidée en période d’essai par l’employeur, n’a pas à découler d’une faute grave du salarié. Bien plus, l’employeur qui met fin au contrat pendant la période d’essai, n’a même pas à formuler le motif de sa décision. En un mot, la notification de la rupture du contrat de travail pendant la période d’essai relève du pouvoir discrétionnaire de l’employeur. Certes, en cette matière comme en toute autre, la liberté des parties trouve sa limite dans la théorie de l’abus de droit. Ainsi, serait irrégulière une rupture notifiée dans l’intention de nuire au salarié, ou même fondée sur des motifs étrangers à la personne même du salarié dont, rappelons-le, la période d’essai a pour objet d’évaluer les capacités professionnelles. Mais, c’est au salarié qui se prétend victime de l’abus d’apporter la preuve de la faute commise par l’employeur.
En cas de changement de poste au sein d’une même entreprise, peut-on imposer au salarié une nouvelle période d’essai ?Non cela n’est pas possible. En revanche, il est recommandé de prévoir une période probatoire permettant à l’employeur d’apprécier la capacité d’un salarié ayant changé de poste à exercer ses nouvelles fonctions. S’il s’avère que le salarié ne donne pas satisfaction à son nouveau poste, la période probatoire peut être interrompue. À la différence de la période d’essai, la rupture de la période probatoire n’entraîne pas la rupture du contrat de travail, mais a simplement pour effet de renvoyer le salarié à ses fonctions antérieures.