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L’image du Roi Mohammed V à travers une collection d’objets

La Galerie 127 à Marrakech accueille, jusqu’au 15 décembre, une exposition originale. Il s’agit de 127 objets de collectionneurs autour de l'image du Roi Mohammed V. L’intitulé «Mohammed V, icône d’un Roi» veut dire bien des choses à travers cette prestation qui met en exergue l’amour d’un peuple pour son Souverain.

04 Novembre 2014 À 18:28

«C’est une idée de la propriétaire de la galerie et collectionneur, Nathalie Locatellie, qui a remarqué un engouement autour de la photo de feu Mohammed V. Elle a été étonnée par les différentes formes d'utilisation de sa photo et comment à partir de son portrait, les gens s’ingénient à créer d’autres supports pour exprimer leur passion pour ce Roi», souligne l’écrivain et chercheur Abdelghani Fennane qui a assuré le commissariat scientifique de cette exposition formée d’objets appartenant à des collectionneurs privés, principalement étrangers, notamment la collection de Nathalie Locatellie. «Depuis que je suis au Maroc, j’ai constaté la présence de la photo du Roi Mohammed V dans beaucoup de maisons que j’ai visitées. Alors, j’ai commencé moi aussi à en collectionner. J’ai même pensé à faire un livre. Mais, comme je n’ai pas le financement qu’il faut, je me suis dit pourquoi ne pas organiser d’abord une exposition. Et c’est là où j’ai fait appel à Abdelghani Fennane».

Ce dernier précise que l’intérêt de cette exposition est multiple. D’une part, elle essaye de montrer les différentes facettes de l’icône royale et, d’autre part, mettre en relief l’aura de la figure du Roi Mohammed V, son inscription dans l’imaginaire collectif marocain, et ce à travers les différents usages dont son image est l’objet. Photos, affiches, boîtes, timbres de poste, montres et cendriers sont les divers objets utilisés, en plus de supports, d'encadrements, d'inscriptions, ainsi que la palette chromatique qui sera aussi l’occasion pour découvrir un volet souvent négligé de l’imagerie marocaine qu’on pourrait situer entre l’art populaire, l’art brut ou encore le kitsch.

«En parlant du projet de faire une exposition réunissant des objets autour de la photo du Roi Mohammed V, il s’est avéré que beaucoup de gens se partagent cette même passion et possèdent des photos et autres supports qui répondent à cette thématique. Et comme la Galerie 127 est spécialement dédiée à la photographie, nous avons respecté ce concept, avec à la base de cette prestation le portrait du Roi d’où découle, par exemple, la sculpture, le dessin… Mais, le noyau est toujours la photo», explique Fennane qui n’a pas manqué d’ajouter que le rôle de l’image, celui de la photographie en l’occurrence, fut capital dans la cristallisation de cet imaginaire autour de la figure du Roi défunt. «Au Maroc, on a apparemment compris très tôt le pouvoir de l’image, avant même l’Indépendance. La légende est encore entretenue aujourd’hui par des Marocains d’un certain âge : on parlait de l’apparition du visage du Sultan dans la lune, alors qu’il était exilé à Madagascar. Le principe de l’impression du subjectile, le miracle de la révélation de la photographie latente favorisée par la technique, la dualité de la présence-absence sont tous contenus là. On peut y voir le premier usage politique de l’image dans l’histoire contemporaine du Maroc».

Il a, aussi, fait état au recours à la photographie comme moyen de propagande politique, centralisée autour de la personne du Roi, en est un des signes indubitables, avec l’avènement de l’indépendance, en 1956, qui coïncida également avec la modernisation progressive de l’État. C’est là où on a assisté, continue le chercheur Fennane, à une propagation déferlante de l’icône royale, sur différents supports, avec différentes techniques, dans la sphère publique et privée. L’ensemble de ces représentations du Roi peut être ramené à quatre figures-clés : le Chef de l’État, le Chef spirituel, le Père de famille et le Père de la nation. Ces différentes figures sont, comme on peut imaginer, adaptées à un contexte national, régional et mondial, avec ces moments de crise et de liesse. 

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