30 Octobre 2014 À 13:12
étant donné l’aspiration du Maroc à être un pays émergent, les autorités marocaines sont confiantes par rapport à la place du pays, eu égard aux différents enjeux régionaux et de son importance dans son environnement africain, méditerranéen, reflétant ainsi l’ambition de ce dernier d’exercer une influence décisive sur son environnement géographique. Cela dit, le Maroc, si on se réfère au lexique courant de la notion de hub, est une plateforme riche et prometteuse. L’émergence de notre pays serait inéluctable en cas d’une bonne conjugaison du local et du régional.
Le lexique de puissance, appréhendé par l’école réaliste, définit que «la politique internationale […] est un combat pour la puissance. Peu importe le but ultime…, la puissance est toujours le but immédiat». Ainsi, la notion de puissance doit toujours être conçue comme une relation dynamique dans un contexte historique particulier. Sous cet angle, la puissance est un comportement naturel, puisque la société internationale est conflictuelle par nature, comme le conçoit Max Weber. La politique étrangère des États cristallise une réalité inéluctable, celle de la quête de puissance. Selon les pères fondateurs de la théorie réaliste des relations internationales, un État conduit sa politique étrangère soit pour «maintenir le statu quo», soit pour «exercer l’influence» en augmentant sa puissance, soit pour afficher «le prestige de la puissance». Dans cette perspective, les États misent sur l’acquisition des instruments d’influences, principalement la puissance économique. Celle-ci est la pièce angulaire du statut «émergent». Ce dernier modèle est le plus adapté à la réalité marocaine, pour de multiples raisons :• L’Occident s’est bâti sur un «nationalisme expansionniste», chose que le Maroc ne pourra pas faire, parce que le monde est déjà partagé entre les différentes puissances (d’ailleurs c’est un défi qui fut, reste et demeure pour les émergents).• La facture lourde et le chemin lent de l’industrialisation pour rattraper le décalage historique supposent un budget colossal et une aventure incertaine.• les émergences s’accomplissent rapidement et courtement, préférant l’investissement dans des infrastructures capables d’attirer les capitaux étrangers. Le Maroc ne déroge pas à cette logique, du moment qu’il mise dans un premier temps sur l’acquisition des moyens d’influence nécessaires pour s’imposer dans une des régions les plus convoitées du monde. Le destin de ce pays lui impose d’augmenter sa puissance, tout d’abord pour se prémunir des dommages collatéraux de la compétition des grands acteurs planétaires pour le contrôle du monde. Les apports de l’histoire, de la géographie et de la démographie affectent largement la perception des dirigeants et du peuple marocain. Nos ascendants avaient le regard au-delà de nos frontières. Par conséquent, notre pays a été longtemps perçu comme un État fort et fut craint, respecté et indépendant. Le facteur de l’histoire est important comme paramètre, car notre passé glorieux pèse lourdement sur notre présent et notre futur. Actuellement, la prospérité de notre pays dépend de notre perception d’un monde globalisé. Cela dit, la dynamique externe est étroitement liée à la dynamique interne.
Car en géopolitique, «il ne faut jamais oublier qu’à l’instar de la politique nationale, la politique internationale est d’abord locale et régionale». Disposant d’une population de plus de 33 millions d’habitants et d’une superficie de 710.000 km², Le Maroc est un pays du nord-ouest de l’Afrique. Avec une longue façade côtière donnant sur l’océan Atlantique et l’autre sur la Méditerranée. Il a un soft power indéniable dans sa région. La donne géopolitique du Maroc est dorénavant régie par quatre points essentiels : sa place géostratégique, située sur le détroit de Gibraltar par lequel transit plus de 20% du trafic international ; son positionnement africain, c’est la porte du continent ; sa proximité de l’Europe via la Méditerranée ; une façade atlantique très importante qui est la seule ouverture des pays du Maghreb arabe sur l’Atlantique et qui est dorénavant un aspect essentiel pour l’avenir dans tous les cas de figure. Durant les deux dernières décennies, la politique étrangère marocaine s’est dirigée vers quatre pôles différents, chacun ayant des traits caractéristiques propres : au nord vers l’Europe, à l’ouest vers les USA, à l’est vers le Maghreb arabe, au sud vers l’Afrique. Parmi ces quatre pôles, le plus stratégique est bien évidemment l’Afrique. Compte tenu de son importance économique : zone géographique la plus dynamique en termes de croissance après l’Asie, avec plus d’un milliard d’habitants, l’Afrique représente 16% de la population mondiale en 2014. Un marché estimé à plus de 300 milliards d’euros d’ici 2020. C’est dans cette région que le Maroc devait réaliser les résultats les plus probants. N’est-il pas le deuxième investisseur en Afrique après l’Afrique du Sud ?
L’acquisition du statut avancé et les accords de libre-échange conclus avec l’Europe et les USA témoignent de la confiance et de l’assurance dont bénéficie le Maroc. Cela dit, le Maroc peut devenir le pivot d’une intégration économique régionale. De plus, la mise en place d’un corpus juridique et institutionnel relatif à la réforme de l’administration, l’établissement de concepts directeurs pour la circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux permettront au Maroc de devenir un hub économique et financier régional. De même, une dynamique interne suppose une classe moyenne capable de développer une perception pertinente du monde globalisé, sachant que l’expérience des émergents a démontré que la classe moyenne est un vecteur inévitable de la croissance. Faut-il rappeler qu’elle était le moteur des trente glorieuses européennes ?La prise de conscience de l’ensemble des atouts dont dispose le pays et l’élaboration d’une politique multidimensionnelle interne et externe mettra le train de l’émergence sur les rails. Le pas est déjà franchi..