06 Avril 2014 À 14:41
L’Union marocaine du travail (UMT), la Confédération démocratique du travail (CDT) et la Fédération démocratique du travail (FDT) ont organisé, hier à Casablanca, une grande marche pour dire toute leur colère contre le gouvernement Benkirane et pour attirer l'attention sur le malaise social qui traverse de larges couches de la classe ouvrière. Dans une démonstration de force, les trois centrales qui ont constitué un front syndical uni ont ainsi mobilisé leurs troupes et réitéré leur attachement à leurs revendications, exprimées à travers des slogans scandés et des banderoles déployées pendant les quatre heures qu’a duré cette manifestation.
En effet, avant 9 heures du matin, les militants des trois syndicats ainsi que ceux qui soutiennent leur cause (représentants de partis politiques, d’ONG féminines…) avaient envahi la place de la Victoire à Derb Omar. Les masses humaines qui sont venues de toutes parts ont pris leur départ au boulevard Lalla Yacout. Les chefs des trois centrales syndicales étaient sur place après 10 heures. Venant chacun de son quartier général, Miloudi Moukharik de l’UMT, Noubir Amaoui de la CDT et Abdarrahmane Azouzi de la FDT ont stimulé l’ardeur et l'enthousiasme des manifestants. Ainsi, les partisans de chaque leader se sont agglutinés autour de lui en improvisant un rempart humain interdisant l'accès aux militants désireux poser en photo ainsi qu'aux journalistes souhaitant avoir des déclarations sur l'évènement.Cette situation a retardé le démarrage de la marche qui a été lancé non sans difficulté. Or, une fois en marche, la manifestation a suivi le parcours qui a été tracé par le comité d’organisation composé des représentants des trois syndicats (de Boulevard Lalla Yacaout en direction du boulevard Hassan II, boulevard Mers Sultan, boulevard Rahal Meskini puis retour à la place la Victoire). Les slogans scandés rappellent le cahier revendicatif contenu dans le mémorandum adressé par les trois syndicats au début du mois de mars : institutionnaliser le dialogue social, associer les syndicats aux réformes en cours, notamment de la retraite et de la Caisse de compensation, prendre en considération le pouvoir d’achat, stopper les augmentations des denrées alimentaires et revaloriser les salaires, abolir l’article 288 du Code pénal qui porte atteinte au droit de grève, respecter la liberté syndicale…
Parallèlement, des revendications sectorielles ont été également exprimées, portant notamment sur la nécessité de l’amélioration du niveau de l’enseignement public, le droit à la santé, le droit au travail… De même, les manifestants n'ont pas manqué de huer le Chef du gouvernement et son équipe.Approchés par «Le Matin» au sujet de la signification de cette marche et le message qu’ils adressent à travers elle, les trois leaders de l’UMT, de la FDT de la CDT n’ont pas mâché leurs mots. Noubir Amaoui, le secrétaire général de la CDT, a déclaré que «cette marche est un communiqué de mise au point. C’est aussi un message de la part de la CDT pour dire que nous refusons l’absurdité. Que ce soit au niveau de la gestion ou dans le dialogue social formel, ainsi que les coups bas en direction des syndicats. Nous vivons une situation dramatique qui peut à tout moment mener à l’éclatement. Il faut donc entendre la voix de la raison», a-t-il martelé.
Versant dans le même sens, Abderrahman Azouzi a affirmé que «cette marche représente un message clair que seuls les analphabètes peineront à lire. Nous espérons que les responsables vont pouvoir lire ce message de manière correcte», a-t-il dit. Le secrétaire général de l’UMT, Miloudi Moukharik, a également appelé le gouvernement à bien lire le message que renferme le nombre important des participants à cette marche. «Le gouvernement doit revenir sérieusement à la table des négociations et cesser de porter atteinte au pouvoir d’achat de la classe ouvrière, agir pour une augmentation générale des salaires, augmenter le taux du SMIG et en faire de même pour celui relatif au secteur agricole pour les rendre unifiés, ainsi que pour relever les pensions accordées aux retraités…», explique-t-il.
La marche de dimanche dernier a été un signal fort adressé par une partie des représentants des travailleurs au gouvernement (trois syndicats ont organisé cette marche, l’UGTM de Hamid Chabat, qui y était attendue, n’y a pas participé). Ce qui laisse la porte ouverte à toutes les éventualités quant à la reprise du dialogue social, dont la date a été fixée au 15 avril par le Chef du gouvernement. Les trois chefs de la FDT, de la CDT et de l’UMT nous ont affirmé qu’ils n’avaient pas encore décidé s’ils allaient répondre favorablement ou non à cette invitation. En tout cas, Noubir Amaoui nous a expliqué que la classe ouvrière exigeait que le dialogue social soit mené selon un ordre du jour préétabli, selon des conditions claires. «Nous n’accepterons plus de dialogue juste pour la forme».