Spécial Marche verte

Les enfants sont-ils exploités par la publicité ?

De plus en plus de régies publicitaires et d’agences de casting font appel aux enfants pour apparaître dans des spots publicitaires, ce qui n'est pas du goût de la Fédération marocaine des droits des consommateurs qui trouve que cela rentre dans le cadre du travail des mineurs.

La publicité fait très souvent appel aux enfants.

02 Août 2014 À 15:56

L’utilisation des enfants dans la publicité est rentable partout dans le monde. En effet, les plus petits sont devenus de véritables vendeurs de marques de produits. C’est ce qui pousse les régies publicitaires et les agences de casting à faire de plus en plus appel à eux pour des spots publicitaires. Résultat : il ne se passe pas une journée sans qu’on voie des bambins partout dans les différents supports médias : télévision, panneaux d’affichage, dépliants, presse écrite, magazine et même sur Internet. Dès leur plus jeune âge, ces enfants sont mis sous les feux des projecteurs et des caméras pour tourner des publicités pour des produits destinés aux enfants, mais aussi des publicités pour d’autres produits qui n’ont aucune relation avec les enfants, comme les agences de voyages, les banques, etc., l’apparition de l’enfant exprimant dans ce cas l’entente familiale.

Bien que le fait de voir un enfant apparaitre dans un spot publicitaire soit devenu normal et n’ait rien de choquant, certains considèrent que cela rentre dans le cadre du travail des mineurs où on utilise l’enfant comme un objet et on se sert de lui, de son image, de ses stéréotypes pour attirer les consommateurs. C’est le cas de la Fédération marocaine des droits des consommateurs (FMDC) qui déplore «l’exploitation» des enfants dans ce domaine. «En ratifiant les conventions internationales et en consacrant l’interdiction du travail des enfants de moins de 15 ans, le Maroc avait franchi législativement la frontière lui permettant de figurer sur la liste des pays défendant et respectant les droits des enfants. Mais entre la promulgation d’un texte et son application réelle, il y a une grande faille due à l’analphabétisme et à la recherche rapide du gain. C’est ce dernier objectif qui motive l’utilisation des enfants de moins de 15 ans dans les différents spots publicitaires des sociétés de publicité. D’abord, par l’exploitation de l’amour filial et la faiblesse de la population jeune cible, l’objectif in fine est d'amener à la consommation des produits ou des services proposés», fustige Kherrati Bouazza, président de la FMDC. Et de poursuivre : «La loi marocaine n’a pas prévu la classification des travaux à effectuer par les enfants de moins de 15 ans. Le travail des mineurs est interdit quelle que soit sa nature. Il faut appliquer la loi fermement, surtout pour les entreprises de publicité qui disposent de cadres très performants et de moyens financiers exorbitants. Il faut également mener des campagnes de sensibilisation pour que la population soit consciente et y participe».

De son côté, Mohamed Seggam, avocat, assure qu’il n’y a aucun mal à ce que les enfants apparaissent dans des spots publicitaires, sur le plan juridique. «Le travail des enfants dans la publicité ne peut pas être considéré comme les autres formes de travail. Les spots publicitaires rentrent dans le cadre de la participation ponctuelle. Ces enfants n’ont pas la qualité de salariés, donc ils ne sont pas concernés par le Code du travail. De plus, leur passage dans la publicité passe d’abord par l’accord des parents ou du tuteur. Donc, il n’y a aucune loi qui empêche les enfants de tourner des pubs», explique-t-il.

En général, ce sont les parents souhaitant voir leurs enfants à la télévision ou sur des affiches publicitaires qui contactent les agences pour passer le casting. «Beaucoup de parents nous contactent pour inscrire leurs enfants dans les castings dans l’espoir d’être sélectionnés pour jouer dans une publicité. Seuls quelques-uns, les plus mignons, mais surtout les plus éveillés et les plus confiants, sont choisis pour jouer dans les spots de publicité. Après sélection, un contrat est conclu entre la maison de production et les parents», explique Bouchra, directrice d’une agence publicitaire. «Il y a certaines conditions de travail des enfants dans la publicité qu’il faut absolument respecter. Il s’agit d’abord des horaires. Les enfants ne doivent pas tourner par exemple pendant les heures d’école. Aussi, ce n’est pas la peine de les faire venir sur le plateau de tournage pendant les préparatifs. Ils ne doivent être là qu’au moment du tournage à des durées bien précises, en fonction de leur âge. La présence d’un pédiatre est également obligatoire sur le plateau de tournage. Malheureusement, ces règles ne sont pas respectées par tout le monde», ajoute-t-elle. 

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