07 Juin 2015 À 13:09
Opérant dans un environnement complexe et incertain, les entreprises doivent veiller à l’équilibre entre les dimensions économique, sociale et environnementale afin de s’inscrire dans une logique de développement durable et pérenniser leurs activités. La prise de conscience des préoccupations sociales et environnementales est essentielle pour l’avenir de ces entités. C’est le constat établi il y a déjà plus d’une cinquantaine d’années, dans des études visant à déterminer les responsabilités des entreprises envers les sociétés. Et les nombreuses crises sociales qui ont touchées les entreprises les obligent définitivement à intégrer ces dimensions «exogènes» dans leurs stratégies.
En effet, le volet RSE est présenté comme un vecteur pour la réussite des entreprises qui créent de la valeur, qui est partagée avec la communauté de manière équitable, dans le respect des ressources de la planète. Le but étant d’établir un climat serein pour pérenniser leur développement. Ce faisant, les organisations améliorent leur capacité à faire face aux crises internes, et ce, en créant une relation de confiance avec leurs collaborateurs qui développent un sentiment d’appartenance à la structure. Aussi, elles se positionnent en tant que partenaires privilégiées des écosystèmes dans lequel elles évoluent, ce qui leur permet de mieux résister aux crises externes. La réflexion sur l’industrialisation massive et ses conséquences sur l’environnement a également encouragé la mise en place des démarches RSE, preuve que les entreprises se développent en conformité avec les lois et les normes en vigueur.
La notion de responsabilité sociale des entreprises a été ainsi associée à des enjeux sociaux et environnementaux. Le développement durable, l’amélioration de l’emploi ou encore la cohésion sociale, autant de concepts qui ont fait que la RSE transcende les objectifs de croissance d’une organisation, se transformant en un gage de développement pour sa communauté, sa nation et sa planète. En vue de son intérêt économique et son impact positif sur les salariés et donc la productivité des entreprises, la RSE devient de plus en plus un élément stratégique dans toute démarche de développement. Mais entre nécessité et contraintes, des efforts sont encore à fournir pour inciter davantage d’entreprises à adhérer à cette démarche, comme le note Aziz Derj, président de l’association RSO au Maroc. «Dans la pratique, nous constatons que ce sont les grandes entreprises marocaines et les filiales de grands groupes internationaux qui déploient des démarches RSE».
C’est d’ailleurs dans ce cadre, et pour généraliser cette approche auprès des entreprises cotées et des PME, que le label de la responsabilité sociale des entreprises a été mis en place en 2006 par la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM). Ce label, attribué pour une durée de trois années, a été accordé à plus de 70 entreprises, à ce jour. Il est basé sur la charte de responsabilité sociale de la CGEM, qui s’inscrit dans la droite ligne des normes et standards internationaux.
Éco-Emploi : Quel est l’état des lieux de la RSE au Maroc ?Aziz Derj : L’intégration de la RSE dans les organisations interpelle de plus en plus le monde des affaires. Dans la pratique, nous constatons que ce sont les grandes entreprises marocaines et les filiales de grands groupes internationaux qui déploient des démarches RSE. Quant à la PME marocaine, même si la grande majorité n’a pas encore eu l’opportunité d’adopter des démarches RSE structurées, certaines mènent, des pratiques respectueuses de l’environnement, de la qualité de vie et des droits de leurs salariés. Étant donné leur impact important, tant sur les plans économique, social et environnemental, ces PME peuvent exercer leurs responsabilités sociétales de manière plus organisée et efficace si elles pouvaient être informées et accompagnées. En 2006, la CGEM a créé une commission RSE, et a adopté une Charte RSE, puis lancé son Label RSE. Ce dernier a permis d’encourager et de valoriser les démarches RSE des entreprises marocaines. Aujourd’hui, prés de 70 d'entre elles ont obtenu le Label RSE.Depuis 2011, une notation extra-financière des entreprises cotées à la bourse de Casablanca est assurée au Maroc par Vigeo Rating, cabinet de rating RSE français. L’entreprise marocaine est de plus en plus sous les projecteurs des investisseurs étrangers dont l’évaluation de leurs portefeuilles de placements ne se limite plus aux seuls critères financiers, mais prend en compte aussi les informations liées aux impacts sociétaux et environnementaux de leurs activités. La RSE est un concept qui mobilise également de plus en plus d’établissements universitaires et centres de recherche marocains : nous assistons à l’organisation de plusieurs workshops et congrès internationaux organisés par les différentes universités marocaines.L'Institut marocain de la normalisation (Imanor) a, de son côté, fait adopter au niveau national la norme internationale ISO 26000 qui définit les lignes directrices de la Responsabilité sociétale des organisations et a formé une dizaine d’experts sur cette norme qui ont accompagné des entreprises volontaires pour sa mise en place.Par ailleurs, il est important de signaler que le Maroc a signé des conventions internationales qui l’amènent à appliquer des réglementations et des normes internationales ainsi que des lignes directrices émanant d’instances internationales telles que les Nations unies, l’Organisation internationale du travail (OIT) et l’OCDE. L’engagement de notre pays se traduit également par l’adoption de la Charte nationale de l’environnement et du développement durable qui a été élaborée suite aux directives royales et qui a été complétée par la loi-cadre 99-12 adoptée en mars 2014. Dans ce cadre, et en conformité avec cette loi, RSO au Maroc œuvre pour la promotion de la responsabilité sociétale des entreprises, mais également de tous types d’organisations.
Quels avantages tirent les entreprises de l'adoption d'une démarche RSE ?En fait, les chefs d’entreprises et autres responsables d’organisations ont plusieurs raisons de mettre en œuvre une démarche RSE. Tout d’abord, elle permet de faire une analyse du contexte de l’organisation, d’identifier les parties prenantes et de mesurer l’impact et les attentes de celle-ci et ainsi d’élaborer une stratégie adaptée et cohérente par rapport à son environnement. Dans un deuxième temps, la démarche consiste à mettre en place des dispositifs de dialogue avec ses parties prenantes, d’être à leur écoute, de se faire comprendre et de pouvoir répondre à leurs attentes en cohérence avec les objectifs de l’organisation. Cela induit un climat de confiance et de compréhension mutuel pour trouver des solutions où toutes les parties y trouvent leur compte. Concrètement, cette approche RSE permet de :• Valoriser l’image, préserver la réputation, satisfaire et fidéliser la clientèle et donc accroître sa valeur et son chiffre d’affaires• Traiter avec des fournisseurs et partenaires de qualité et faire des économies sur les achats. • Améliorer l’environnement de travail et de sécurité des salariés et donc renforcer la satisfaction au travail, optimiser la compétitivité et favoriser la création de valeur.• Accroitre la rentabilité par la réduction des coûts grâce aux réductions des consommations de ressources et d’énergie• Prévenir les risques réglementaires, sociaux & environnementaux. En s’engageant dans une démarche de RSE, l’entreprise se donne également les moyens d’accéder plus facilement aux marchés de capitaux et d’entretenir de bonnes relations avec les pouvoirs publics et ses partenaires.
Quelles actions mener pour promouvoir la RSE au Maroc ?La création même de RSO au Maroc s’inscrit dans cette volonté qui anime toutes les entreprises membres de notre association, à savoir participer à la promotion des valeurs de la RSE dans notre pays. La mise en place d’un observatoire de la RSE est à l’étude au niveau de l’association, dans le but d’établir un baromètre de la RSE au Maroc au travers d’enquêtes terrain et d’études sectorielles, pour permettre de suivre et d’accompagner l’évolution de la RSE au Maroc. Un effort conjoint d’information, de sensibilisation et de mobilisation semble être nécessaire de la part de tous les acteurs socioéconomiques : administrations, entreprises, établissements universitaires, centres de recherche et société civile pour la promotion de la responsabilité sociétale. Nous attendons le déploiement de la Stratégie nationale de développement durable qui, nous l’espérons, sera accompagnée d’un véritable dispositif incitatif encourageant l’ensemble du tissu économique à mettre en œuvre des démarches de Responsabilité sociétale.