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«Nous voulons être un challenger beaucoup plus agressif»

Dans un marché très concurrentiel, Meditel a jusqu’ici bien tiré son épingle du jeu. Cependant, avec l’installation de la marque Orange, l'opérateur doit passer à une nouvelle phase de développement. Orange Maroc se veut désormais un challenger beaucoup plus agressif pour gagner des parts de marché aussi bien sur le marché du mobile que celui du fixe.

Stéphane Richard affirme que le Maroc est l’un des grands pays dans lequel Orange est présent sur le continent africain. Ph. Seddik

09 Décembre 2016 À 18:29

Le Matin : Votre investissement dans Méditel, devenu Orange, remonte à 2010. Quel bilan en dressez-vous et que pensez-vous du marché télécoms marocain globalement ?Stéphane Richard : C’est pour nous un investissement important puisque le Maroc est l’un des grands pays dans lequel Orange est présent sur le continent africain. Néanmoins, c’est un marché difficile et extrêmement concurrentiel où il y a eu une guerre des prix, ramenant ceux-ci à des niveaux très bas. Globalement, le marché n’a pas connu beaucoup de croissance ces dernières années, parce que cette guerre des prix est tellement forte que la croissance en volume est extrêmement faible, voire négative. Les conditions sont donc difficiles, mais pour nous l’investissement au Maroc est un choix de long terme, convaincus du potentiel de croissance de ce marché et de l’économie marocaine. Notre politique d’investissement s’inscrit dans ce sens ; ce sont des investissements continus et réguliers pour disposer d'un réseau de qualité et devenir un opérateur vraiment digital et pas uniquement dans la téléphonie mobile, en proposant de nouveaux services et peut-être, si possible, en rentrant aussi sur le marché du fixe.

Êtes-vous satisfait des performances réalisées jusqu'ici par Méditel ? Oui, je pense que dans un marché très difficile et concurrentiel, Méditel a bien tiré son épingle du jeu. J’aurais préféré que la croissance soit plus forte et que la profitabilité s’améliore davantage, mais dans ces conditions difficiles, je suis globalement satisfait.

Méditel est donc devenu Orange, une opération attendue depuis déjà plusieurs mois. Pourquoi aujourd’hui et quels en sont les objectifs ?Tout vient à point nommé à qui sait attendre, comme dit le dicton. Il y a un temps pour tout. Il fallait préparer cette opération et la réaliser au bon moment. Il fallait aussi que dans le tour de table de Méditel, dans lequel Orange n’est pas tout seul, mais avec deux grands partenaires marocains, nous partagions la conviction que c’était une étape importante à franchir.

Les négociations ont-elles été difficiles avec vos partenaires marocains ?Non. Cela n’a pas été difficile parce que tout le monde a vu l’intérêt pour cette société de prendre l’identité Orange, qui est l’une des grandes marques du secteur. Tout le monde considère ainsi que cela représente une grande opportunité pour l’opérateur. Il fallait donc tout préparer pour prendre cette décision et c’est maintenant que ça s'est fait. Cela va nous permettre d’enclencher toute une série de nouvelles actions, d’apporter des innovations. Je vois cela comme une nouvelle étape dans l’histoire de la société. Ce n’est pas une façon de tourner le dos à son histoire. Nous sommes très fiers de ce qui a été fait avec Méditel.

Quels impacts sur la gouvernance et la gestion ? Aucun. Pas de changement ni du tour de table, ni de la gouvernance. M. Benjelloun reste président. En tout cas, il y a une évolution de cette présidence qui est prévue par nos accords, mais cela ne change rien. Il y a un directeur général qui vient d’arriver et qui restera en poste.

Votre situation au Maroc est particulière. Vous avez deux partenaires et votre participation au capital est de 49%, alors que le groupe est majoritaire dans les autres pays. Est-ce que vous étiez et êtes toujours prêt à monter dans le capital d’Orange Maroc ? Oui, nous avons 49%, mais du point de vue financier et comptable, le Maroc fait totalement partie du groupe Orange. Moi, je souhaite qu’on garde un partenariat fort avec de grands acteurs marocains. C’est important pour notre présence dans ce pays, pour nos rapports avec ses institutions. L’objectif donc n’est pas de prendre 100% de Méditel. S’il doit y avoir des évolutions futures dans le tour de table, nous les examinerons. Comme je vous l'ai dit, Orange est un investisseur de long terme et il souhaite donc se renforcer, mais en gardant des partenaires marocains solides.

Quels sont les défis majeurs qui se présentent à vous sur le marché marocain ?D’abord, il y a le défi de l’internet mobile. Le Maroc s’ouvre à l’internet via essentiellement le réseau mobile. Pour nous, cela implique beaucoup d’investissements dans la 4G. Ensuite, il y a le défi du marché du fixe puisqu’aujourd’hui ce marché est, de fait, complètement fermé avec un opérateur historique qui en détient pratiquement 100%. Nous pensons qu’il serait bien pour le Maroc d’avoir de la concurrence sur le fixe comme c’est le cas pour le mobile. Cela bénéficierait au consommateur, qu’il soit particulier ou entreprise. Il y aurait plus d’investissements et peut-être des prix plus accessibles. Orange a le désir de rentrer plus nettement sur ce marché du fixe, d’y investir. Dans la pratique cela s’avère encore très compliqué, même si sur le papier, il y a une régulation qui devrait nous permettre d’y rentrer. En tout cas, notre ambition est d’être un acteur convergent Fixe-Mobile et un acteur de la transformation digitale qui apporte tous les services du digital au grand public et aux entreprises.

En mars 2015, Orange avait présenté son nouveau plan stratégique «Essentiels2020». Quelles déclinaisons sur le marché marocain ?Tous les objectifs du plan vont trouver une application au Maroc, puisque son objectif est d’offrir la meilleure expérience Client possible aux 250 millions de clients Orange dans le monde. Cela commence par la connectivité et là nous réalisons de grands efforts d’investissement dans les réseaux. Je rappelle qu’au Maroc, le groupe investit 1,2 milliard de DH par an. Il y a, également, tout un chantier autour de la relation client, notamment la digitalisation et la rénovation des boutiques. En outre, il y a tout un volet interne, c’est la promesse de l’employeur, c'est-à-dire que nous allons nous occuper de nos employés et collaborateurs du groupe en leur donnant plus de formation, plus d’accès à la mobilité et en allant plus vite vers la digitalisation. De même, nous avons un chantier qui concerne le marché Entreprise, parce que nous sommes un grand acteur de ce marché dans le monde et que nous voulons l’être aussi au Maroc. Il y a enfin de nouveaux métiers avec deux priorités : la banque mobile et l’internet des objets.

Vous êtes parmi les 10 premières marques mondiales dans les télécoms. Au Maroc, est-ce que vous ciblez la première position ?Aujourd’hui, il y a un leader historique très fortement implanté. Dire qu’on veut prendre la place du leader est un peu présomptueux et pas très crédible. Ce que nous voulons, c’est être un challenger beaucoup plus agressif, plus fort et quelque part, beaucoup plus menaçant qu’on ne l’a été aujourd’hui, pour gagner des parts de marché, dans le mobile d’abord. Et là, je crois que nous en avons les moyens. Puis, au moins déjà rentrer sur le marché du fixe.

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