26 Octobre 2017 À 19:21
Le 20 octobre dernier, à l’occasion de la tenue de l’Université d’été du Forum des chefs d’entreprises (FCE), des entrepreneurs algériens ont interpellé le ministre des Affaires étrangères, M. Abdelkader Messahel, sur les difficultés qu’ils connaissent dans les opérations d’exportation vers les pays du continent africain. Ils ont reproché au gouvernement algérien le manque de soutien dans les opérations d’exportation vers ces pays, contrairement aux entreprises marocaines qui connaissent un développement sans précédent en Afrique, grâce notamment à l’accompagnement des autorités marocaines.
M. Messahel répond par une attaque virulente contre le Maroc, en accusant l’État marocain d’encourager le blanchiment d’argent à travers l’implantation de plusieurs banques en Afrique et d’accuser Royal Air Maroc de transporter «autre chose que des passagers». Il accuse le «Makhzen» de faire du Maroc une «zone de libre-échange offerte tout particulièrement aux opérateurs français».
Pour M. Messahel, dans le «Doing Business» (Baromètre du climat des affaires), il n’y a que l’Algérie en Afrique du Nord, ni l’Égypte qui ne fait qu’emprunter, ni la Tunisie qui a d’énormes difficultés économiques, ni la Libye et bien sûr pas le Maroc.r>Que penser de ces déclarations du premier responsable de la diplomatie algérienne ? Jamais un responsable algérien n’est allé aussi loin et n’a exprimé, à l’égard du Maroc, autant de haine, à travers des déclarations puériles et infondées.
Ces déclarations sont d’abord une insulte à l’intelligence des entrepreneurs algériens, qui connaissent la place de l’Algérie dans le «Doing Business», véritable baromètre du Climat des affaires établi par la Banque mondiale, cité par M. Messahel. Ainsi, en 2017, sur 190 États, l’Algérie est classée 156e, loin derrière la Tunisie 77e et surtout le Maroc, classé 68e ; ce qui est le meilleur classement dans la région. Dans le rapport de la Banque mondiale de 2017, on peut lire que «le Climat des affaires en Algérie souffre toujours d’une grande complexité dans le domaine de la création d’entreprises, de l’obtention des permis de construire et en matière fiscale». Les mêmes conclusions se retrouvent dans une étude publiée le 10 août 2016 par le Bureau des investissements relevant du département d’État américain.
Ces déclarations sont ensuite une insulte à l’intelligence des agences de notation qui décernent aux banques marocaines des appréciations plus qu’honorables au niveau de l’éthique et de la gouvernance, contrairement aux banques algériennes. Ces déclarations sont également une insulte à l’intelligence des Chefs d'État africains qui ont conclu avec le Maroc des centaines de conventions de coopération dans tous les domaines. Lesquels Chefs d’État sont accusés par M. Messahel de complicité, en acceptant des investissements en argent «blanchi». Le problème des autorités algériennes est qu’elles ont toujours réduit leurs relations avec les pays africains à une question d’argent et ceci contrairement au Maroc. Les pays d’Afrique ont, certes, besoin d’investissements, d’expertise, de coopération, mais dans le respect et la dignité.
Comment voulez-vous que l’Algérie soit reçue à bras ouverts dans ces pays alors que leurs populations font l’objet d’arrestations et de traitements inhumains sur le territoire algérien ?r>D’après un rapport d’«Amnesty International», dont le contenu est rapporté par le journal algérien «Le Matin» du 23 octobre 2017, 2.000 ressortissants d’Afrique subsaharienne ont été arrêtés depuis le 22 septembre 2017 en Algérie et expulsés vers le Mali et le Niger. Il s’agit de Nigériens, de Guinéens, de Burkinabés, de Béninois, de Maliens, d'Ivoiriens, de Sénégalais, de Nigérians, de Libériens, de Camerounais et de Sierra-Leonais.
En juin dernier, M. Ahmed Ouyahia, devenu Premier ministre en août, a accusé les «étrangers d’amener en Algérie le crime, la drogue et d’autres fléaux». Le lendemain de cette déclaration, M. Messahel, le même, a réclamé des «mesures urgentes contre le flux de migrants subsahariens en Algérie».
Maintenant, il faut situer les déclarations de M. Messahel dans leur contexte temporel et par rapport à l’affaire du Sahara. Les déclarations de M. Messahel ont été faites le 20 octobre 2017, soit trois jours après une tournée qu’il a faite en Mauritanie, au Tchad, au Mali et au Niger des 13 au 17 octobre. Cette tournée était liée à deux évènements majeurs qui devraient connaitre leur dénouement en décembre 2017.r>C’est d’abord la création, dans le cadre de la participation française au sommet de G5 Sahel, le 2 juillet dernier à Bamako (Mali), de l’«Alliance pour le Sahel» dont le but est de s’attaquer aux racines du terrorisme dans la région du Sahel. À cet effet, une conférence internationale de planification des contributions à la force conjointe G5 Sahel devrait être organisée en décembre 2017 à Bruxelles.
L’autre évènement est la clôture du processus d’adhésion du Maroc à la Communauté des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), qui devrait avoir lieu en décembre 2017 à Lomé (Togo).
Or, en rapprochant les deux évènements, la présence de l’armée marocaine au sein d’une force de la Cédéao au Mali n’est pas exclue. Concernant la relation des déclarations de M. Messahel avec le problème du Sahara, il faut rappeler que cette affaire est, depuis son origine, étroitement liée à l’Afrique. En effet, la principale raison objective de cette affaire, car il y a probablement des raisons personnelles et celles qui relèvent de la psychanalyse, est la décision de M. Boumédiène et M. Bouteflika, il y a 43 ans, d’éviter que le Maroc récupère ses provinces du Sud et devienne une puissance régionale susceptible de concurrencer l’Algérie sur le continent africain. Pour cela, il fallait créer un État inféodé à l’Algérie pour couper le Maroc de ses racines africaines, aboutir à son encerclement terrestre et disposer d’un passage vers l’Atlantique.
Malgré de gros moyens et une politique d’acharnement sans précédent contre le Maroc, ces objectifs n’ont pas été atteints. Au contraire, l’objectif consistant à couper le Maroc de ses racines africaines a complètement échoué et a abouti au résultat inverse : le Maroc est dans son Sahara et sa présence en Afrique est saluée de partout.
Il s’agit là d’un échec programmé des autorités algériennes, mais aussi d’un échec personnel de M. Messahel qui s’occupe des affaires africaines depuis 1987. Ce qui explique, en grande partie, ses déclarations haineuses, dénoncées publiquement par de nombreux patriotes algériens.
Par Rachid Lazrak*
* Rachid Lazrak est l'auteur du livre «Le contentieux territorial entre le Maroc et l'Espagne». Il a été membre de la délégation marocaine à l'ONU en 1974 et 1975. Il a été membre de la délégation marocaine qui a défendu le dossier du Sahara devant la Cour internationale de justice de La Haye. Après avoir été professeur de droit et de fiscalité d'entreprise, il exerce aujourd'hui l'activité de conseil juridique et fiscal.