Monde

La pandémie, à double-tranchant pour le climat

«Nous craignons que les fonds nécessaires pour s’attaquer au Covid-19 soient pris sur les actions climatiques», explique Harjeet Singh, de l’ONG Action Aid. Ph.DR

21 Avril 2020 À 20:06

Alors que les gouvernements du monde entier se battent pour protéger leurs populations sans anéantir leurs économies, la pandémie de Covid-19 a relégué la crise climatique au second plan. Mais elle offre aussi une chance d’un «monde d’après» plus durable et décarboné.  À court terme, la lutte contre le virus est évidemment la priorité des dirigeants mondiaux. Mais si la question climatique n’est pas intégrée dans les décisions des semaines et mois à venir, l’espoir de limiter le réchauffement à +2°C, objectif minimal de l’Accord de Paris, pourrait s’évaporer une fois pour toutes. «Les gouvernements dépensent des fortunes pour maintenir leurs économies à flot», commente Michael Oppenheimer, de l’université de Princeton. «Cet argent peut être dépensé soit de manière neutre pour le problème climatique, soit en aggravant la situation, soit en l’améliorant», explique-t-il à l’AFP. Pour Stephen Hammer, responsable climat à la Banque mondiale, les priorités actuelles ne doivent pas évincer les objectifs de long terme. «Et en premier lieu : la décarbonation de l’économie mondiale», a-t-il écrit dans un récent blog avec son collègue Stéphane Hallegatte. Les plans de relance de centaines de milliards de dollars, d’euros, de yens et de yuan, doivent inclure des investissements vers les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique, la résilience des infrastructures aux inondations ou aux sécheresses, et des transports publics durables, plaident-ils. «Somme toute, la crise va réduire les émissions de CO2 et accélérer la transition vers les énergies renouvelables», assure à l’AFP Jeffrey Sachs, directeur du Center for Sustainable Development à l’université de Columbia. Ce confinement pourrait aussi changer les habitudes des populations qui pourraient ne plus avoir envie de prendre un avion pour un week-end. «Les gens pourraient réaliser qu’ils peuvent se passer de pratiques coûteuses et pénibles, comme les déplacements domicile-travail», estime ainsi Michael Oppenheimer. Alors que le nouveau virus pourrait venir selon certains scientifiques d’une espèce de chauve-souris, l’humanité a peut-être aussi pris conscience du message martelé depuis des années par les défenseurs de l’environnement : son action sur la nature a des conséquences. n

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