22 Avril 2021 À 01:50
Quels sont les nouveaux défis de l’enseignement supérieur imposés par le contexte actuel ?r>Mohammed Aziz Lahlou : Les systèmes d’enseignement supérieur ont considérablement changé au cours des deux dernières décennies. Ces changements touchant aussi bien les lieux, les espaces que les modalités de l’enseignement cherchent à trouver des réponses aux nouveaux défis de l’enseignement supérieur et à entreprendre des réformes en profondeur pour les relever avec urgence et pertinence. Les pressions exercées pour réformer les politiques de l’enseignement supérieur et repenser les priorités institutionnelles sont donc immenses.r>La révolution numérique, y compris l’émergence de l’intelligence artificielle, le développement de l’éducation et de la formation sur le web, perturbe tous les aspects de la vie et du travail par la création de nouveaux emplois et la destruction d’autres. Les récentes crises conséquentes de la pandémie du Covid-19 ont provoqué des impacts majeurs sur les systèmes éducatifs du monde entier, y compris l’enseignement supérieur.r>Au niveau de notre pays, ces deux dernières années, plusieurs mutations organisationnelles et structurelles des universités marocaines ont été prévues, aussi bien au niveau de la formation que de la recherche. Parmi les actions pratiques annoncées par le ministère de tutelle, on peut citer celle de repenser les cursus de formation de façon à renforcer l’employabilité des étudiants à travers une nouvelle architecture et des contenus adéquats (mise en place du système Bachelor). On peut citer également le grand défi de la restructuration de la recherche scientifique, son autonomie et la réforme des études doctorales…r>De son côté, l’Université privée de Fès, sans le contexte de la pandémie mondiale du Covid-19, s’est adaptée à cette nouvelle donne, en mettant en place des plans stratégiques idoines sans toutefois s’écarter du cap de la stratégie générale guidée par la vision, citée plus haut, de la réforme des volets de la formation et de la recherche. Ce plan de gestion de la crise nous a permis une diligence dans notre réactivité et une réorientation de nos actions pour assurer la bonne mise en œuvre de nos actions stratégiques.
Face à une économie en mutation, les besoins des entreprises en termes de compétences changent aussi. Comment vous répondez à ces changements ?r>Notre monde actuel est caractérisé par des économies en mutation rapide ainsi que par des défis sociétaux et environnementaux qui ont un impact direct sur les systèmes d’éducation supérieure. Cette transformation sans précédent est due essentiellement aux nouveaux modes de travail et aux évolutions technologiques et surtout au fait qu’une société informée a besoin de travailleurs hautement qualifiés et compétents.r>Les établissements d’enseignement supérieur sont ainsi soumis à des exigences qui justifient leur pertinence : ce qu’ils enseignent et comment ; ce qu’ils recherchent et pour qui ; comment ils utilisent leurs ressources et mettent en place des structures de gouvernance et de gestion ; quel est leur champ d’action et quels sont leurs partenariats avec les différentes industries ; et dans quelle mesure leurs diplômés sont préparés pour apporter une contribution significative aux plans de développement nationaux ou régionaux.r>Pour accompagner ces transformations, nous adoptons au niveau de notre université une stratégie de formation qui vise d’atteindre l’excellence et aussi d’améliorer les rendements internes et externes de notre système ; ce qui nous a amenés à repenser l’ensemble de notre dispositif de formation, et ce, en assurant :r>- une offre de formation avec des parcours et des référentiels de compétence clairs et compréhensiblesr>- une organisation pédagogique et une mutualisation de l’ingénierie pédagogique permettant de répondre aux grands enjeux sociétaux du 21e siècle en termes de préparation des jeunes générations à un marché de l’emploi en pleine mutationr>- une réussite de carrière pour nos lauréats en développant les compétences humaines- soft-skills et life-skills- indispensables telles que le multilinguisme, l’autonomie, la capacité de rebond, la prise d’initiative, la créativité, l’innovation et l’esprit critique.
Les étudiants sont lourdement impactés par le contexte de crise que nous vivons. Quel est le rôle de l’université pour les orienter et les soutenir ?r>Comme nous l’avons signalé plus haut, dès l’avènement de la crise Covid-19, nous avons mis en place un plan qui nous a permis d’assurer le maintien du lien pédagogique entre les enseignants et les étudiants et de maintenir les activités de recherche scientifique, et ce, dans une démarche assurant les mesures préventives pour protéger la santé des étudiants, des cadres administratifs et pédagogiques exerçant dans les différents établissements de l’Université privée de Fès.r>Les résultats de l’évaluation de notre plan de gestion de cette crise sont plutôt satisfaisants. Les retours que nous avons à travers les enseignants chercheurs et les étudiants sont très positifs. En effet, les étudiants manifestent une plus grande motivation pour utiliser et s’approprier d’une manière remarquable les outils des plateformes d’enseignement à distance. L’enseignement à distance, loin des espaces institués de formation, s’avère plus à même de répondre à leurs attentes ; ce qui devrait nous interpeller, nous les acteurs de l’enseignement supérieur, pour revoir nos méthodes et nos approches, et les adapter vis-à-vis des attentes des nouvelles générations d’étudiants en reconsidérant les modalités et les canaux d’enseignement et d’apprentissage de l’après-Covid. L’offre de formation, quelle qu’elle soit, pourrait être déclinée sous forme d’enseignements à distance, circonstanciée dans une période de crise épidémique voire même en temps normal.r>Par ailleurs et en parallèle avec ces actions, nous avons assuré un accompagnement de proximité pour nos étudiants à travers des séances de coaching personnalisées et aussi par l’organisation de plusieurs webinaires auxquels nous avons invité des psychologues, des spécialistes en neurosciences et sciences de l’éducation apportant en conséquence un soutien approprié pour réduire tant soit peu l’impact de la crise sur nos étudiants
Vous avez lancé en 2019 l’incubateur UPF «KUB789» pour soutenir l’écosystème entrepreneurial. Quel impact sur les lauréats de l’université et comment s’organise cet accompagnement ?r>Le Centre d’incubateur de l’Université privée de Fès baptisé «KUB789» a pour vocation d’accompagner les porteurs de projets et de développer une communauté d’entrepreneurs au sein de l’université. Le «KUB789» est un espace de convivialité et de co-working et a pour but d’accompagner et de former les étudiants et diplômés pour initier de nouveaux projets d’entreprises.r>Chaque porteur de projet, étudiant ou diplômé est accueilli dans cet espace et orienté vers un coach personnel qui le suivra tout au long de son projet. Des experts partenaires de l’université sont présents pour aider les futurs entrepreneurs à des étapes clés du processus de création d’entreprise.r>Les projets sont sélectionnés sur la base de critères tels que : le concept innovant, la faisabilité technique, la viabilité du business- plan, la disponibilité de la propriété intellectuelle… De son côté, l’UPF s’engage pour la recherche de financements directs ou indirects, la recherche de solutions d’hébergement du projet en plus de l’appui technique et méthodologique et la mobilisation de ressources humaines qualifiées
La transformation digitale accélérée a imposé de nouveaux profils pointus en la matière. Comment vous répondez à ces exigences ?r>Dans un monde qui s’interroge face aux enjeux qu’impliquent les plateformes numériques, mais aussi la robotisation, la réalité augmentée, l’intelligence artificielle, etc. ; l’enseignement supérieur a une carte à jouer : celle d’un enseignement qui ne soit pas uniquement utilitaire, mais qui accompagne les apprenants, qui forme et invite à la réflexion. Ainsi, les institutions d’enseignement supérieur se doivent d’adapter leurs modèles afin de tirer parti des potentialités du numérique, pour accroître la qualité de leurs modèles pédagogiques et surtout l’insertion professionnelle de leurs lauréats.r>Les nouvelles générations d’étudiants que nous recevons à l’UPF ont été bercées par le numérique. Ces jeunes attendent que l’université soit plus flexible, mieux adaptée aux nouvelles technologies et surtout plus accessible pour tous à travers des bibliothèques numériques, des cours disponibles en ligne, des contenus numérisés libres d’accès. Les réseaux sociaux doivent également jouer un rôle central dans les cursus d’études et permettre la mise en place d’un enseignement participatif et collaboratif et d’un suivi réel entre les différentes promotions. Au sein de l’UPF, nous nous sommes adaptés à cette nouvelle donne et nous offrons à nos étudiants des environnements numériques de travail adéquats répondant à leurs besoins spécifiques.r>Par ailleurs, notre stratégie consiste aussi à préparer aux métiers de l’ère numérique grâce à une prise de conscience du besoin de développement des compétences nouvelles et à une meilleure orientation des effectifs vers les formations les plus performantes sur le plan économique et social pour un meilleur accompagnement de l’insertion professionnelle.r>La révolution numérique ne doit pas non plus écarter l’université de ses fondamentaux consistant au développement de l’esprit de recherche, à la transmission d’une culture générale, à l’acquisition d’outils d’analyse, etc. Ils sont autant de compléments indispensables aux compétences techniques et professionnelles spécialisées de l’ère digitale.