19 Mai 2021 À 20:26
Conseil : Un changement interne est difficile à appréhender, particulièrement en temps difficile, notamment de crise sanitaire. Qu’est-ce que vous pouvez nous dire à ce propos ?r>Malgorzata Saadani : Tout changement est perçu comme un «danger» par une grande partie des gens, et c’est compréhensible. La nature humaine préfère toujours «le connu» à «l’inconnu» et le changement porte toujours en lui une partie de l’inconnu. r>Dans la première partie de notre entretien, nous avons parlé de la transition en entreprise dont la finalité est une nouvelle situation, donc nécessairement le changementr>Si en plus cela se passe pendant une période instable à l’échelle globale, pas seulement au niveau de l’entreprise, il est tout à fait naturel de la redouter, de s’en méfier et d’en avoir peur tout simplement. Repérer, avouer et assumer cette émotion forte et désagréable est un premier pas vers sa maîtrise et vers la réflexion rationnelle sur les solutions à apporter.r>Entre la peur et l’opportunité, chacun perçoit le changement à sa manière. Qu’est-ce qui pourrait justifier une prise de position ?r>Face au changement, il n’y a pas de réponse standard et les premières différences se situent au niveau de l’inné et de l’acquis chez chaque personne. Pour ce qui est de l’inné, il y a des gens qui aiment la stabilité voire la routine par-dessus tout, et il y en a qui adorent les challenges, les découvertes et l’inconnu à explorer. Pourtant, ces deux extrêmes sont tout à fait compréhensibles et peuvent trouver leur place en entreprise : le premier dans les tâches répétitives, formalisées et souvent non évolutives, et le deuxième dans l’innovation, la prise de risques et la conquête de nouveaux territoires et marchés. Pour ce qui est de l’acquis, c’est le fruit de toute une expérience de vie qui nous dicte soit une extrême prudence, soit une attitude beaucoup plus décontractée. Et comme nos parcours sont variés, ils impliquent des attitudes tout aussi variées. Encore faut-il qu’un manager remarque ces traits de caractère et ces préférences personnelles chez les collaborateurs afin de leur confier les missions qui leur conviennent, de mener à bien le changement et de préserver au maximum le bien-être des gens tout en visant la performance business.
Dans quelle mesure un changement interne pourrait-il constituer une opportunité de carrière en temps de crise ?r>Chaque changement porte en lui une part de risque et une part d’opportunité. Le risque est repéré tout de suite et souvent exagéré, mais on a beaucoup plus de mal à reconnaître les opportunités. Dans une situation instable, j’ai pu remarquer deux postures radicalement opposées : ceux qui ont dévoilé leur faiblesse de caractère en cédant à la peur et en se bloquant face à l’inévitable, et ceux qui se sont démarqués par leur souplesse et leur courage et qui ont pu monter en grade et aussi gagner en confiance en soi. Et cela n’a souvent rien à voir avec leurs attributions officielles, mais plutôt avec leur capacité personnelle à affronter l’inconnu et à dépasser les difficultés, à explorer des solutions d’une manière créative. Un manager attentif saura les repérer et les récompenser.r>Comment faire en sorte que le «danger» devienne une opportunité et sortir indemne d’une période difficile ?r>Tout d’abord, je tiens à attirer votre attention sur le fait que le changement n’est pas nécessairement dangereux en tant que tel, c’est notre manière d’y penser qui en fait un scénario angoissant. C’est toute notre manière de penser au changement qu’il faut réévaluer et, si nécessaire, tenter de revoir. Les outils sont multiples et ils doivent tenir compte de la situation d’une personne en particulier : sa nature, son historique, sa position actuelle à 360°, les faits, le relationnel, l’environnement, le potentiel, les ambitions, etc. Autant dire, c’est une situation qui nécessite souvent une intervention externe : celle d’un ami, d’un conseiller ou d’un coach.
Côté management, comment amener les collaborateurs à être résilients ?r>La crise ne concerne pas que les collaborateurs, les managers de tous les niveaux et les hauts dirigeants sont aussi concernés et leur manière d’agir doit en tenir compte. r>La fonction d’encadrement, ce n’est pas seulement faire respecter l’exécution des consignes, mais également entretenir les bonnes relations avec les équipes. Même en temps de crise, garder le contact, être à l’écoute et réagir en adéquation avec la situation distinguent un manager-leader d’un simple administrateur des affaires. La crise sanitaire nous a fourni de nombreux exemples et des contre-exemples dans ce sens. Quand la totalité ou une partie des collaborateurs avaient été priés de travailler à distance, qui ont été les managers qui ont gardé le contact humain avec leurs collaborateurs, qui ont organisé les rencontres en visioconférences à caractère purement humain (en dehors des télé-réunions classiques) ? Celles et ceux qui ont su préserver leur relation directe avec les équipes, qui ont construit un lien fort et crédible qui leur permettra de pousser la performance encore plus loin et réaliser une vision d’avenir définie avec la contribution active des collaborateurs. En visant les objectifs communs qu’ils ont formulés ensemble et auxquels ils adhèrent, ils seront un collectif encore plus solidaire et efficace, d’où l’espoir tout à fait légitime de résilience.