Nation

«Le Sommet sur le financement des économies africaines, où le Maroc a toute sa place, vise à poser les bases d’un New Deal africain»

Hélène Le Gal.

17 Mai 2021 À 18:19

Les outils de financement du continent africain devront être à la hauteur des défis posés par la crise sanitaire. La pandémie de la Covid-19 a provoqué une crise économique mondiale. Bien que remarquablement résiliente, l’Afrique a connu sa première récession en un demi-siècle, son PIB s’étant contracté de 2,1% en 2020.r>A l’instar du reste du monde, les États africains ont été contraints de mettre en œuvre des mesures d’urgence pour limiter l’impact social de la crise et de planifier des plans de relance d’une ampleur sans précédent historique. À cet égard, la réaction des autorités marocaines a été exemplaire : instauration d’une aide aux ménages les plus démunis et d’une indemnité forfaitaire chômage, moratoires fiscaux et bancaires, soutien à la liquidité des entreprises, notamment à travers les crédits garantis Damane, puis programmation d’un plan massif de relance visant à injecter l’équivalent de 11% de son PIB dans l’économie nationale. Ces mesures ont toutefois un coût, provoquant une hausse des dettes publiques qui peut se traduire pour certains États par des difficultés de refinancement.r>Dans cette perspective, la communauté internationale a réagi de manière rapide et coordonnée : outre les décaissements d’urgence des principaux bailleurs, un moratoire sur le service de la dette a été acté par le G20 et le Club de Paris. Plus de quarante pays, dont une trentaine de pays africains, en ont déjà bénéficié, représentant un apport immédiat de plus de 10 milliards de dollars. Néanmoins, la question de la dette doit être replacée dans celle plus générale du financement du développement du continent. Le FMI a en effet évalué à 290 milliards de dollars le besoin de financement externe de l’Afrique subsaharienne entre 2020 et 2023. Ainsi, la réflexion doit désormais porter sur la définition d’une stratégie plus globale de financement, incluant davantage de nouveaux flux externes et des réformes permettant de renforcer le secteur privé africain et l’attractivité économique du continent. Au-delà des volumes financiers, la crise est aussi une opportunité pour «faire différemment» en s’accordant sur des règles collectives de financement durable, afin de conjuguer financement du développement et maîtrise de la dette. C’est dans cette perspective que, à l’initiative du Président de la République française, le Sommet sur le financement des économies africaines qui se tient ce jour à Paris vise à définir un nouveau modèle de croissance soutenable pour l’Afrique dans l’après-Covid-19.r>En s’appuyant sur les premières avancées (moratoire du service de la dette pour les pays les plus fragiles décidé en 2020) et pour faire face aux défis de long terme, le Sommet sur le financement des économies africaines réunit des dirigeants d’États africains ainsi que d’États partenaires, y compris des dirigeants d’institutions financières internationales, afin d’élaborer conjointement des mesures qui permettront de stimuler une reprise forte et inclusive en Afrique, fondée sur un secteur privé dynamique, et de favoriser la prospérité et d’accélérer les transitions écologique et numérique, conformément aux Objectifs de développement durable (ODD) et à l’Accord de Paris sur le climat.r>D’une part, la crise impose de trouver des solutions profondément novatrices en matière de financement, notamment pour financer davantage de programmes en faveur de l’éducation, de la santé, ou encore du climat – le Maroc l’a d’ailleurs bien compris avec l’opérationnalisation en cours du Fonds Mohammed VI pour l’investissement. D’autre part, la perspective de croissance africaine doit s’appuyer davantage sur le secteur privé africain, principale source de croissance à terme. C’est pourquoi le Président de la République française souhaite fédérer une coalition des grands bailleurs pour mettre en place un fonds de soutien au secteur privé africain et œuvre au développement d’instruments de garantie innovants pour faciliter la venue en Afrique de flux privés internationaux.

Plus largement, la volonté de la France est d’établir un New Deal avec l’Afrique. C’est ce que la France portera quand elle assurera la présidence française de l’Union européenne au premier semestre 2022 en vue du prochain sommet UE-UA. C’est également l’enjeu du Nouveau Sommet Afrique-France qui se tiendra à Montpellier, avec pour ambition de poser un regard neuf sur la relation Afrique-France et de mettre au centre du jeu des nouveaux acteurs du renouvellement de cette relation, y compris la jeunesse et les diasporas qui ont un rôle essentiel à jouer.

Le continent dispose d’atouts essentiels qui peuvent être mobilisés pour faire face aux défis actuels : une population jeune et dynamique, désireuse d’entreprendre, une aptitude à l’innovation, y compris dans le secteur numérique, des progrès en matière d’infrastructures et un potentiel de forte croissance, comme l’a démontré au cours des dernières années la présence de nombreux États africains dans la liste des dix États à plus forte croissance. Dans cette perspective, le Maroc occupe une place stratégique. Il est tout d’abord à la confluence de l’Afrique et de l’Europe. Son engagement multisectoriel sur le continent africain, en faveur du développement durable et du climat, du développement économique et social, mais aussi de la stabilité et de la paix, tout comme son statut avancé auprès de l’Union européenne et son partenariat d’exception avec la France en font un acteur de premier plan pour cette ambition. Le Maroc fait également figure de référence dans la gestion de la crise de Covid-19 en Afrique, aussi bien sous l’angle sanitaire (que ce soit pour endiguer la propagation du virus ou assurer la vaccination de sa population), ou sous celui des mesures de relance post-Covid-19. Il dispose donc à cet égard d’une expérience précieuse en vue du Sommet du 18 mai, où il sera représenté par son ministre de l’Économie et des finances. 

Par Hélène Le Gal, r>ambassadrice de France au Maroc

 

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