08 Juin 2021 À 18:30
Après des années de négociations infructueuses, les États du G7, à savoir le Royaume-Uni, la France, l’Italie, le Canada, le Japon, l’Allemagne et les États-Unis ont approuvé à Londres une réforme qui semblait encore une vue de l’esprit il y a peu. Elle repose sur deux piliers : une répartition équitable, entre les pays, des recettes fiscales provenant des 100 entreprises les plus rentables au monde, dont les fameux Gafa, et un impôt mondial sur les entreprises à un taux d’au moins 15%. «C’est une première étape très importante mais il y a encore du travail à faire pour aboutir à un accord au G20» des 9 et 10 juillet à Venise, puis «rallier la majorité des 139 pays qui négocient» sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), souligne une source proche des discussions. «Une négociation aussi compliquée, avec autant de parties prenantes, ne peut aboutir que s’il y a un effet d’entraînement», estime Sébastien Jean, directeur du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii).
Or l’administration Biden, en quête de ressources pour financer son méga-plan de relance, a donné une impulsion décisive selon lui. «Il y a une masse critique» de pays engagés dans le processus et «une volonté d’aboutir qui rend plutôt optimiste», renchérit Nicolas Véron, économiste au Peterson Institute et à l’institut Bruegel, qui se félicite du «sursaut» des gouvernements après des décennies de laxisme. Jusqu’à présent, un État qui décidait de durcir sa fiscalité prenait le risque de faire fuir les entreprises. Mais «à partir du moment où il y a une masse critique de pays qui le font, alors la logique se retourne, et ce sont ceux qui restent en dehors qui sont pénalisés», analyse Sébastien Jean. Pour autant, «aucun détail qui fâche n’a encore été résolu, que ce soit le taux exact, l’assiette fiscale, les seuils d’imposition, ou la manière de garantir la mise en œuvre effective», souligne Simon MacAdam, expert chez Capital Economics. L’Europe est divisée. D’un côté, les Etats qui cherchent à financer la reprise post-Covid, et sont prêts pour cela à sévir contre les stratégies d’optimisation fiscale : France, Allemagne, Italie, Espagne et même les Pays-Bas. De l’autre, ceux qui ont fondé leur modèle économique sur une fiscalité attractive : Irlande, Hongrie, Bulgarie, Chypre, Malte ou Luxembourg. Ou encore la Suisse, qui applique dans certains cantons un taux inférieur à 12%, et a fait savoir qu’elle prendrait «les mesures nécessaires pour conserver une place économique très attractive». Hors d’Europe, il faudra aussi convaincre la Chine qui affiche un taux nominal de 25% sur les bénéfices des entreprises, lequel descend toutefois à 15% dans certains secteurs innovants.