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Elon Musk : L’argent et le travail seront inutiles dans 20 ans

Et si l’avenir ne ressemblait plus à nos certitudes les plus anciennes ? Lors du U.S.-Saudi Investment Forum à Washington, Elon Musk esquisse un monde où les robots produisent, où la monnaie s’efface et où l’humain réapprendrait à exister sans la boussole du travail. Selon lui, cette bascule pourrait survenir dans les dix à vingt prochaines années, portée par l’essor fulgurant de l’IA et l’arrivée annoncée des humanoïdes. Il décrit une société d’abondance où l’effort ne serait plus une nécessité mais un choix, une vision futuriste séduisante pour certains, dérangeante pour d’autres, tant elle remet en question ce qui, depuis toujours, donne forme à l’existence humaine.

Elon Musk et Jensen Huang lors du U.S.-Saudi Investment Forum au Kennedy Center à Washington

21 Novembre 2025 À 16:53

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L’avenir imaginé par Elon Musk ressemble de moins en moins à une fiction et de plus en plus à un vaste chantier technologique. Lors du U.S.-Saudi Investment Forum à Washington, puis sur le plateau du Joe Rogan Experience, le PDG de Tesla et fondateur de xAI a multiplié les déclarations, bousculant les repères traditionnels du travail, de l’économie et même de la société.

Pour Musk, l’essor fulgurant de l’IA et de la robotique annonce une transformation irréversible. Il estime que le travail deviendra une activité libre, proche d’un loisir, « comme jouer à un jeu vidéo ou faire du sport », dit-il. L'entrepreneur reprend l’exemple du jardinage pour expliquer que, même si cultiver des légumes demande de l’effort, beaucoup continuent parce qu’ils y trouvent du plaisir. De la même manière, il imagine que le travail deviendra une activité choisie pour son intérêt, et non plus une nécessité pour vivre.

Cette vision s’étend jusqu’à l’économie, où Musk imagine un futur tellement porté par l’IA et la robotique que la monnaie elle-même finirait par perdre son sens. Une idée qu’il relie directement à l’univers de la série Culture de Iain M. Banks, un modèle où la technologie assure l’abondance et où la monnaie n’a plus de raison d’exister. Les seules limites, affirme-t-il, resteront physiques, comme l’énergie ou la matière.

Pour asseoir ce scénario, Musk mise sur un acteur central, son robot humanoïde Optimus, censé accomplir des tâches qui dépassent déjà les capacités humaines. À ses yeux, ce robot pourrait éliminer la pauvreté, révolutionner les soins de santé et redéfinir entièrement l’organisation sociale. Il va jusqu’à évoquer des applications qui relèvent aujourd’hui de la science-fiction, comme un futur système de sécurité où le robot suivrait les individus pour prévenir les crimes.



Cette promesse d’abondance ne s’annonce pourtant pas sans secousses. « Il y aura beaucoup de traumatisme et de disruption », reconnaît Musk. Les métiers physiques seront profondément transformés, remplacés ou redéployés, tandis que les tâches numériques basculeront intégralement vers les machines. L’évolution sera fulgurante, résume-t-il, un « tsunami supersonique ».

Face à un monde sans revenus traditionnels, Musk imagine un filet social totalement nouveau. Non pas un simple revenu universel, mais un "revenu universel élevé” qui garantirait à chacun l’accès aux biens et aux services essentiels. Ce système reposerait sur une économie où les robots produiraient massivement, générant la richesse nécessaire pour financer cette redistribution.

À ses côtés, Jensen Huang, PDG de Nvidia, élargit la perspective en rappelant que l’IA ne se limite pas à remplacer des tâches, mais qu’elle transforme profondément la manière de travailler. Il cite l’exemple de la radiologie, annoncée comme l’un des premiers métiers menacés, alors qu’elle recrute aujourd’hui davantage grâce aux outils d’analyse automatisée. Pour lui, l’IA permet aux professionnels d’examiner plus d’images, de croiser davantage de données et de consacrer plus de temps aux patients, ce qui renforce les équipes au lieu de les réduire.

Le débat reste ouvert, et Musk persiste dans son pari d’une humanité libérée des contraintes. Mais à vouloir effacer le travail, il bouscule un pilier vieux comme l’espèce humaine, forgée justement par l’effort, la création et l’utilité sociale. Derrière la promesse d’un futur sans labeur, demeure une vraie inquiétude : que deviendra l’homme lorsqu’on lui retirera ce qui a toujours structuré sa place dans le monde ?
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