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Expulsion du domicile conjugal : plus de 1.400 poursuites en 2024, les femmes en première ligne

Les cas d’expulsion du domicile conjugal continuent de concerner très majoritairement les femmes, même si le volume global des affaires connaît un recul. C’est ce que révèle le huitième rapport annuel de la Présidence du Ministère public, qui dresse un état des lieux détaillé des procédures engagées en 2024 au titre de la contravention d’expulsion du domicile conjugal.

31 Décembre 2025 À 16:13

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Selon ce rapport, les parquets ont reçu 3.110 demandes dans le cadre de la procédure relative à l’expulsion du domicile conjugal. 2.842 demandes ont été introduites par des épouses, contre 268 par des époux, confirmant la poursuite d’une tendance structurelle : les femmes demeurent les principales victimes de ce type d’atteinte à la vie conjugale.

Sur le plan répressif, l’année 2024 a été marquée par l’enregistrement de 1.421 affaires liées au délit d’expulsion du domicile conjugal, ayant donné lieu à des poursuites judiciaires contre 1.422 personnes. Par ailleurs, 213 affaires ont concerné le délit de refus d’exécuter une décision de réintégration du conjoint expulsé, impliquant 213 personnes poursuivies. Si ces chiffres témoignent de la persistance du phénomène, le rapport souligne néanmoins un recul notable du nombre de dossiers. Les affaires d’expulsion du domicile conjugal ont enregistré une baisse d’environ 29 % par rapport à 2023, tandis que les cas de refus de réintégration ont diminué de près de 40 % sur la même période. Une évolution que la Présidence du ministère public interprète comme le signe de légères transformations dans les modes de commission de ces infractions, étroitement liées aux tensions au sein du couple.

La voie de la médiation privilégiée

Au-delà de l’action pénale, les parquets ont poursuivi une approche à forte dimension sociale. En 2024, 1.926 décisions de réintégration au domicile conjugal ont été exécutées, dont 871 ont abouti à une réconciliation entre les conjoints. À l’inverse, 833 demandes ont fait l’objet de décisions de classement sans suite, à l’issue des enquêtes et investigations menées. Cette orientation s’inscrit dans la mise en œuvre de la loi n°103.13 relative à la lutte contre les violences faites aux femmes, qui a expressément criminalisé l’expulsion du domicile conjugal ainsi que le refus injustifié d’exécuter une décision de réintégration, en vertu de l’article 1-480 du Code pénal, tel que modifié. Ces dispositions confèrent à la justice pénale un rôle central dans la protection de la sécurité familiale et la préservation de la dignité des conjoints.



La base juridique de cette intervention est également consacrée par l’article 53 du Code de la famille, qui prévoit que, lorsqu’un conjoint est expulsé sans motif légitime, le ministère public intervient sans délai pour assurer sa réintégration et prendre les mesures nécessaires à sa protection. Un dispositif qui renforce la vocation protectrice et préventive de l’institution judiciaire dans les conflits conjugaux.

Mariages mixtes : une activité soutenue sous contrôle judiciaire

Le rapport met également en lumière le rôle du ministère public dans la gestion des mariages mixtes, dans lesquels il intervient en tant que partie principale, conformément aux dispositions du Code de la famille. En 2024, les parquets ont enregistré 10.035 demandes d’autorisation de mariage entre Marocains et étrangers, donnant lieu à 10.422 réquisitions. Pour instruire ces dossiers, 7.680 enquêtes ont été diligentées par les services de police judiciaire, afin de vérifier l’identité du conjoint étranger et l’authenticité des documents produits. À l’issue de ces procédures, 8.977 autorisations judiciaires de mariage mixte ont été délivrées.

Dans le détail, le ministère public a formulé 3.357 réquisitions favorables, 6.175 réquisitions tendant à l’application stricte de la loi, ainsi que 350 réquisitions de rejet, auxquelles s’ajoutent 540 autres réquisitions liées à des situations particulières.

À travers ces données, la Présidence du ministère public met en avant une double exigence : protéger l’institution familiale, tout en veillant au respect strict du cadre légal, tant dans la prévention des violences conjugales que dans l’encadrement juridique des unions familiales impliquant des ressortissants étrangers.
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