Hajjar El Haïti
28 Janvier 2024
À 13:57
L’exposition aux
substances chimiques est en grande partie liée aux
aliments que nous consommons tous les jours. Ces derniers peuvent, en effet, être contaminés de diverses manières, notamment par le transfert de
substances chimiques per- et polyfluoroalkylées (PFAS) depuis les
emballages alimentaires. Une récente étude sur la teneur des emballages alimentaires en PFAS a révélé la présence de ces substances dans certains emballages alimentaires à usage unique, en papier, carton et fibres moulées à base de plantes, achetés dans 17 pays, dont le
Maroc.
Cette étude, menée par l’
Association marocaine Santé Environnement et Toxicovigilance (AMSETOX), en partenariat avec le
Réseau international pour l'élimination des polluants (IPEN) et d'autres pays membres de l'IPEN, a montré que 53,8% des échantillons testés contenaient des PFAS, souvent utilisés pour rendre les emballages en carton des
burgers et des
frites résistants à la
graisse. «119 échantillons d’emballages des différents pays participants à l’étude ont été achetés et envoyés au même laboratoire pour être testés. Les échantillons provenaient de
Tunisie, Égypte, Jordanie, Koweït, Maroc, Irak, Monténégro, Jamaïque, Mexique, Argentine, Bénin, Zambie, Cameroun, Philippines, Taïwan, Népal et Inde. Les tests ont été faits pour 58 PFAS spécifiques et pour le
fluor organique extractible (EOF). L’étude a révélé que sur les 119 échantillons testés, 64 (53,8 %) contenaient des PFAS ou présentaient des niveaux d'EOF indiquant la présence de PFAS», déclare au «Matin» Dr
Naima Rhalem, présidente d’AMSETOX. Elle précise par ailleurs qu’au
Maroc, parmi les échantillons alimentaires achetés au hasard et non de façon exhaustive, deux emballages contenaient des
PFAS. «Il s’agissait d’un emballage pour frites acheté au niveau d’une chaîne de
restauration rapide internationale et un emballage pour cake acheté au niveau d’une franchise internationale installée au Maroc. Les chaînes ont été avisées par courrier. L’association a également avisé les départements ministériels concernés pour prendre les mesures nécessaires et pour les inciter à réglementer cet aspect», affirme Dr Rhalem.
Les PFAS, un danger pour la santé et l'environnement
Il est à noter que les PFAS sont extrêmement persistants dans l'environnement et ont été associés à des maladies comme le cancer, l'infertilité et aux perturbations endocriniennes. «De nombreuses études et recherches ont montré que ces substances, une fois contenues dans les emballages alimentaires, peuvent s'infiltrer dans les aliments et donc dans le sang, si elles sont présentes à des niveaux élevés», indique Dr Narjis Badrane, secrétaire générale adjointe d’AMSETOX. Et d’ajouter que «les PFAS sont largement utilisés dans les emballages alimentaires à usage unique, en particulier en restauration rapide, ce qui expose particulièrement les jeunes qui sont de grands consommateurs de cette restauration rapide, aux effets des PFAS qui peuvent perturber les hormones naturelles du corps».
PFAS : Une réglementation s'impose
La spécialiste souligne également que certaines PFAS ont été réglementées à l’échelle mondiale. «Trois PFAS et leurs substances apparentées comptent parmi les produits chimiques les plus hautement toxiques connus et sont interdits à l’échelle mondiale. Cependant, il n’existe pas de réglementation mondiale complète pour protéger l’environnement et la santé humaine contre tous les PFAS», explique la présidente de AMSETOX. «Au Maroc, le décret, n°2-10-473 du 7 chaoual 1432 (6 septembre 2011), pris pour l’application de certaines dispositions de la loi n°28-07, relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires, et le décret conjoint entre plusieurs ministères, n°3283- 17 du 16 ramadan 1440 (22 mai 2019), fixant les conditions d’hygiène applicables au transport des produits alimentaires et des aliments pour animaux, évoquent les emballages alimentaires sans pour autant fixer leur composition chimique. Une amélioration de ce cadre réglementaire intégrant les PFAS est recommandée pour protéger à la fois la santé des consommateurs et l’environnement en assurant des emballages alimentaires exempts de PFAS», préconise Dr Rhalem. Et d’insister que «l'IPEN et les membres de son réseau, dont l’Association marocaine Santé Environnement et Toxicovigilance (AMSETOX), réclament des règles mondiales pour interdire les PFAS, selon lesquelles les gouvernements mettront en œuvre des restrictions immédiates de leur utilisation».