22 Septembre 2025 À 17:16
Chaque année, la rentrée scolaire marque pour les enfants un moment de transition exigeant: nouveau rythme, devoirs, leçons à assimiler, longues heures passées à lire et à écrire, sans oublier l’usage croissant des écrans. Autant de situations où la vision est fortement sollicitée. Pourtant, nombre d’élèves reprennent le chemin de l’école avec des troubles visuels non détectés, qui peuvent freiner leur apprentissage sans que leurs parents ou enseignants en aient conscience. Les spécialistes recommandent ainsi un dépistage précoce, particulièrement à la rentrée, afin de préserver la santé visuelle et de garantir aux élèves des conditions d’apprentissage optimales. Wiam El Jaï, orthoptiste, explique que «la rentrée scolaire est une période où les sollicitations visuelles augmentent fortement: lecture soutenue, écriture fine, devoirs sur écran, passages fréquents entre tableau et cahier. Tout cela suppose une vision performante, fluide, stable. Or, de nombreux troubles visuels peuvent s’installer sans bruit, perturber l’apprentissage... sans que l’enfant ou l’enseignant en prenne conscience. Vérifier la vision au retour des vacances permet de s’assurer que l’élève dispose de toutes les capacités visuelles nécessaires pour apprendre dans de bonnes conditions». Elle poursuit: «En tant qu’orthoptiste, je constate chaque année à cette période une recrudescence de consultations liées à des troubles visuels passés inaperçus, mais dont les répercussions sur la scolarité et le bien-être sont bien réelles».
La spécialiste rappelle que plusieurs troubles peuvent passer totalement inaperçus, tout en ayant un impact direct sur l’apprentissage. C’est le cas du trouble de la convergence, lorsque l’enfant a du mal à aligner ses yeux lors de la lecture, ce qui rend le suivi des lignes difficile. La fatigue accommodative est, également, fréquente: elle se traduit par une difficulté à passer rapidement de la vision de loin, indispensable pour lire au tableau, à la vision de près, nécessaire pour écrire dans le cahier. Un astigmatisme léger, souvent non détecté, peut, quant à lui, brouiller certaines lettres et entraîner des confusions. L’amblyopie, ou «œil paresseux», reste sournoise puisqu’elle ne se remarque pas toujours si un seul œil est atteint. Enfin, un strabisme discret ou intermittent peut perturber la vision binoculaire sans être évident à l’œil nu. «Ces troubles peuvent provoquer lenteur, erreurs de copie, désintérêt ou épuisement en fin de journée scolaire», précise Wiam El Jaï. Selon elle, le premier dépistage visuel de l’enfant devrait idéalement avoir lieu entre 9 mois et 2 ans, surtout en cas d’antécédents familiaux, puis avant l’entrée au CP, vers 4-5 ans, car la lecture exige un bon équilibre entre vision de loin et de près. Ensuite, il est recommandé de faire un bilan tous les deux ans, ou plus tôt si des signes d’alerte apparaissent. «Il y a plusieurs signes inquiétants qui doivent alerter parents et enseignants: se frotter souvent les yeux, cligner et fermer un œil, se rapprocher exagérément du tableau ou du cahier, sauter des mots, des lignes, ou éviter la lecture, se plaindre de maux de tête ou de fatigue visuelle, ou encore être facilement distrait, lent ou avoir du mal à se concentrer. Ces signes peuvent sembler anodins, mais méritent une évaluation orthoptique pour écarter un trouble fonctionnel», insiste-t-elle.
En conclusion, la spécialiste souligne que «la vision est un pilier silencieux de la réussite scolaire. Un trouble non détecté peut fragiliser un enfant sans que personne ne s’en rende compte. La rentrée est le moment idéal pour faire le point, dépister, rassurer ou corriger. Car bien voir, c’est mieux apprendre, mieux se concentrer, et souvent... mieux s’épanouir».
Ces troubles visuels peuvent se manifester de plusieurs façons dans le quotidien scolaire de l’enfant. On observe souvent une baisse des performances, avec une lenteur inhabituelle, des fautes liées à l’inattention et des difficultés en lecture. Ils peuvent également entraîner une chute de motivation, l’enfant se sentant découragé sans comprendre pourquoi il «n’y arrive pas». Enfin, des problèmes de concentration apparaissent: dès que la vision devient un effort, la charge cognitive augmente et l’enfant peine à suivre le rythme des cours ou à terminer ses devoirs.
Ces troubles visuels peuvent-ils aussi influencer le comportement ou l’estime de soi de l’enfant ?
En effet, les conséquences peuvent être importantes. Un enfant mal à l’aise visuellement peut devenir irritable, éviter les tâches complexes ou même développer une anxiété de performance. Il peut être injustement perçu comme «rêveur», «maladroit» ou «agité». À terme, cela peut impacter l’estime de soi et créer un cercle vicieux: une moindre confiance en soi entraîne un moindre investissement et davantage de difficultés.
Quels conseils donner aux parents pour protéger les yeux des enfants avec l’utilisation croissante des écrans ?
Il est important de limiter la durée d’exposition aux écrans, tout en appliquant la règle du 20-20-20: toutes les 20 minutes, l’enfant doit regarder un point situé à environ six mètres pendant 20 secondes afin de relâcher la fatigue visuelle. Autant que possible, il est conseillé de privilégier les supports papier pour les devoirs et d’éviter l’utilisation des écrans avant le coucher. La posture joue, également, un rôle clé: l’écran doit être placé à hauteur des yeux et à une distance minimale de 40 centimètres pour réduire la tension sur les yeux et le cou.
Existe-t-il des habitudes simples pour entretenir la santé visuelle ?
Il est recommandé de favoriser les activités en extérieur, car la lumière naturelle et la vision de loin contribuent à protéger la vue et à limiter la progression de la myopie. Les enfants doivent lire dans de bonnes conditions d’éclairage, sans forcer sur leurs yeux, et faire des pauses régulières lors des devoirs ou de l’utilisation des écrans pour réduire la fatigue visuelle. Des jeux manuels et visuels, comme les puzzles, les constructions ou le dessin, sont également très bénéfiques, car ils stimulent la coordination œil-main tout en offrant un temps d’activité moins contraignant pour la vision.