Le WAC impérial

La centralité des droits de l'Homme dans la doctrine de Sa Majesté le Roi Mohammed VI

Mohammed Jamal MAATOUK, Professeur à la Faculté de droit de Settat

30 Juillet 2009 À 19:14

L'attachement aux droits de l'Homme et à leur promotion est une constante dans la doctrine de Sa Majesté le Roi. Dès le premier discours du Trône, Sa Majesté exprimait en effet son extrême attachement à l'édification de l'Etat de droit et à la sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés individuelles.

Dix années plus tard, le Souverain, dans le message adressé à la réunion biennale du Réseau des droits de l'Homme des académies et des sociétés savantes le 21 mai 2009, réitère son attachement ferme au respect des droits de l'Homme dans leur indivisibilité, évoquant les réformes profondes et les grands chantiers lancés…
De fait, les droits de l'Homme se sont non seulement exprimés dans la pensée du Souverain, en tant que doctrine, mais concrétisés sur le terrain par des avancées réelles. Cette double dimension – approche théorique et engagement solennel d'une part, concrétisation et réalisation d'autre part - me paraît essentielle dans la détermination de la place qu'occupe les droits de l'Homme dans la doctrine de Sa Majesté.

Notre doctrine du pouvoir, a affirmé Sa Majesté, s'articule autour de la volonté d'assurer à chaque marocain une citoyenneté digne s'alimentant de ses droits dans leur pleine et concrète expression.Elle se fonde de même sur le concept de Monarchie citoyenne, une monarchie au service de la dignité et de l'épanouissement de tous les Marocains.

1-Une vision indivisible et globale des droits de l'Homme
A l'occasion de la célébration du 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, (Rabat,10-12-08)
Sa Majesté le Roi réaffirmait son ferme attachement aux droits humains dans leur universalité et leur globalité.
Cet attachement se fonde sur l'idée que la jouissance des libertés civiles et politiques, ainsi que celle des droits économiques, sociaux et culturels, sont interdépendantes et parce que, au cas où l'individu se trouve privé de ses droits économiques, sociaux et culturels, il ne représente pas la personne humaine que la Déclaration considère comme l'idéal de l'homme libre .
Force, en effet, est de reconnaître que les libertés civiles et politiques, les droits de l'Homme traditionnels sont indispensables à la revendication et à l'obtention des libertés économiques, sociales et culturelles et que ces dernières sont indispensables à l'exercice par tous des libertés civiles et politiques. Au surplus, par delà l'indivisibilité nécessaire des catégories des droits de l'Homme apparaît celle de chacun des droits par rapport aux autres. La perte du travail peut entraîner l'expulsion du logement, l'échec scolaire des enfants, et la perte de la dignité. L'absence d'un droit compromet tous les autres. "L'effectivité d'un droit est toujours le soutènement des autres. » L'universalité, l'indivisibilité, l'interdépendance et l'interrelation des droits de l'Homme conduisent à traiter des droits de l'Homme globalement de manière équitable et équilibrée, sur un pied d'égalité et en leur accordant la même importance.
En maintes occasions, Sa Majesté le Roi a ainsi exprimé avec force l'idée que « les droits politiques et civiques n'auront de portée concrète pour le citoyen dans son vécu quotidien que s'ils se recoupent et se complètent avec la promotion des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux, auxquels nous accordons la priorité dans les politiques publiques du pays ».
On comprend dans ces conditions l'intérêt que le Souverain accorde à la lutte contre l'exclusion, la marginalisation et la précarité, l'ignorance et l'analphabétisme. C'est dans cette perspective qu'il faut situer le lancement par Sa Majesté de l'INDH qui se décline sous le signe de la citoyenneté réelle et agissante.

2- Une promotion effective des droits de l'Homme
La promotion effective des droits de l'Homme s'inscrit dans la vision de bonne gouvernance de Sa Majesté le Roi. Les droits de l'Homme ne se résument pas à des textes et des normes mais à des avancées concrètes, sur le terrain. Pour Sa Majesté le Roi, « l'ancrage de la citoyenneté digne ne peut s'effectuer uniquement en édictant des lois ou en instaurant des institutions, nonobstant leur importance. » On comprend dans ces conditions l'importance que Sa Majesté accorde à l'éducation aux droits de l'Homme , considérée comme priorité absolue et qui s'est notamment traduite par la valorisation de l'enseignement des droits de l'Homme, la création de chaires au niveau des universités, la création du centre de documentation et d'information et de formation aux droits de l'Homme en collaboration avec le Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme . Il faut y ajouter la proposition faite par le Royaume pour l'adoption d'une " Déclaration internationale sur l'éducation et la formation dans le domaine de la culture des droits de l'Homme » , ainsi que le projet de résolution présenté par le Maroc au sujet du rôle des ombudsmans et des institutions de médiation dans la promotion et la protection des droits de l'Homme dans le cadre de la consolidation des mécanismes du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU. Les avancées sont également perceptibles tant au niveau des droits civils et politiques qu'à celui des droits économiques, sociaux et culturels. Le code de la famille qui constitue une illustration concrète du renforcement de l'égalité entre l'homme et la femme, la réforme du code de la procédure pénale (octobre 2003) , l'adoption du code du travail qui se fonde largement sur la dignité du travailleur (2003), la restructuration du CCDH, l'institution de Diwan Al Madhalim (intermédiation entre les citoyens et l'administration), l'élargissement de l'espace de la liberté d'expression et d'opinion dans toute sa diversité à travers notamment la révision des textes relatifs aux libertés publiques et à la presse, la création de la Haute autorité de la communication audiovisuelle, ... sont autant d'illustrations de ces avancées.
L'INDH, la création de l'lnstitut royal de la culture amazighe, la loi portant code la couverture médicale de base (octobre 2002), la loi relative aux accessibilités, (mai 2003), les actions en faveur du droit au logement sont également à inscrire au titre des avancées pour la promotion des droits économiques, sociaux et culturels.
Il faut y ajouter les avancées réalisées en matière de justice transitionnelle afin d'assurer la réconciliation, l'équité et la réparation du préjudice individuel et collectif. Une avancée saluée par les instances et les organisations internationales des droits de l'Homme. D'ailleurs, le Royaume a passé avec brio, en avril 2008 lors de la 7e session du Conseil des droits de l'Homme (CDH) à Genève, l'Examen périodique universel (EPU), une épreuve d'évaluation du degré du respect des droits de l'Homme, redoutée par nombre de pays. L'harmonisation des législations nationales avec les conventions internationales est également une dimension essentielle dans la promotion des droits de l'Homme comme en témoigne notamment la levée par le Royaume du Maroc des réserves enregistrées au sujet de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard de la femme ainsi que la ratification par le Royaume de la Convention internationale sur la protection des personnes handicapées, la loi sur le blanchiment d'argent qui est promulguée en aval avec la convention de l'ONU sur la lutte contre la corruption, d'ailleurs, tout récemment, l'association Transparency Maroc vient de décrocher le titre d'association d'utilité publique.
En dépit de toutes ces avancées, qui se fondent sur une détermination forte et une doctrine claire ayant enclenché un processus irréversible en direction de la promotion des droits de l'Homme et de le consolidation de l'Etat de droit, Sa Majesté garde pleinement conscience que « Le processus de promotion des droits de l'Homme demeure long, ardu et toujours perfectible » et qu'il n'y a pas de limite d'horizon pour les droits humains, lesquels connaissent une dynamique soutenue et relèvent d'un système cohérent mettant en corrélation la portée démocratique qui leur est sous-jacente et la dimension de développement dont ils sont porteurs ».

Intervention lors d'une rencontre scientifique sur le thème « La pensée juridique et diplomatique de Sa Majesté le Roi Mohammed VI », organisée à l'occasion du dixième anniversaire d'intronisation de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, par l'association Ribat Al Fath pour le développement durable, le Centre marocain des études juridiques et l'association marocaine d'Etudes et de recherches internationales.
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