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Football marocain 2000–2025 : entre percées historiques et chantiers inachevés

Des demi-finales de Coupe du Monde aux triomphes en futsal, des académies à la renaissance du football féminin, les sélections marocaines ont marqué ce début de siècle par des avancées notables. Mais à l’heure du bilan, la fragilité des clubs et l’absence de réforme structurelle rappellent que l’équilibre reste à trouver. Décryptage du rapport "Football Marocain : Bilan d’un quart de siècle 2000-2025" du think tank Omega.

01 Juillet 2025 À 11:38

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À l’heure où s’achève la saison 2025, le football marocain apparaît à un tournant décisif, à la lumière du rapport "Football Marocain : Bilan d’un quart de siècle 2000-2025" publié par le think tank Omega, sous la direction de Samir Chaouki. Vingt-cinq années de compétitions, de déceptions et de triomphes permettent aujourd’hui de dresser un bilan contrasté entre performances sportives remarquables et défaillances systémiques persistantes. Si les sélections nationales ont connu une progression spectaculaire sur plusieurs volets, les clubs marocains, eux, peinent à sortir de la crise de gestion qui les mine depuis deux décennies.

Un quart de siècle de métamorphoses pour les sélections

En équipe A, les Lions de l’Atlas ont offert au pays ses plus grandes joies et ses plus cruelles déceptions. Après une finale de CAN en 2004 et une longue traversée du désert, l’exploit retentissant de la Coupe du Monde 2022, avec une quatrième place historique, a replacé le Maroc sur l’échiquier mondial. Ce succès a couronné une stratégie de recrutement axée sur la diaspora et une continuité technique retrouvée avec l’arrivée de Walid Regragui. Mais les espoirs ont été douchés à la CAN 2023, où le Maroc a été éliminé en huitièmes de finale.

En parallèle, les catégories inférieures ont montré des signes clairs de montée en puissance. Les U17 ont remporté la CAN 2025, les U23 ont glané la médaille de bronze aux JO de Paris 2024, confirmant l’impact positif de l’Académie Mohammed VI et du recours aux talents de la diaspora. Le futsal marocain, dominé par la continuité du sélectionneur Hicham Dguig, s’est imposé comme une référence continentale et mondiale, avec trois CAN remportées et deux quarts de finale mondiaux.

Le football féminin, enfin, s’est épanoui grâce à une stratégie volontariste de la FRMF : participation à la CDM 2023, finale de la CAN 2022 et apparition en CDM U17. Une progression encore freinée par un engouement public et médiatique trop timide.

Clubs marocains : un palmarès dense, une gestion fragile

Sur le front continental, les clubs marocains ont accumulé 16 titres majeurs en Afrique, parmi lesquels deux Ligues des Champions et dix Coupes de la CAF. Le Raja, le Wydad, la RSB, le MAS ou encore l’AS FAR ont tour à tour brillé, mais souvent sans réussir à installer une domination durable. Des occasions manquées, à l’image du Wydad, finaliste malheureux à trois reprises ces huit dernières années.

L’édition 2013 de la Coupe du Monde des Clubs, marquée par le parcours du Raja jusqu’à la finale face au Bayern Munich, reste l’unique éclair d’une participation souvent timide à ce niveau. Sur le plan national, la Botola et la Coupe du Trône ont été dominées par un quatuor récurrent : RCA, WAC, AS FAR et RSB, concentrant plus de 50 titres à eux seuls.

Mais au-delà du terrain, la gestion des clubs reste le talon d’Achille du football marocain. La professionnalisation lancée en 2011-2012 a été fragilisée par l’absence de contrôle budgétaire strict, entraînant une inflation des salaires et des dérives de gouvernance. En dehors des clubs institutionnels comme l’AS FAR ou le FUS, la majorité des entités souffre de déficits chroniques. Un constat alarmant que la FRMF devra placer au cœur de ses priorités pour l’après-2025.

Vers un nouveau cycle ?

Ce quart de siècle aura donc été celui des percées sur la scène internationale, mais aussi des occasions manquées sur le plan structurel. Pour que les exploits individuels et collectifs se traduisent par une excellence durable, le football marocain devra s’attaquer à ses dysfonctionnements internes. L’avenir de la discipline repose moins sur ses talents que sur sa capacité à bâtir une gouvernance à la hauteur de ses ambitions.
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