Les banques marocaines affichent, à nouveau, des résultats exceptionnels.
LE MATIN
28 Mai 2009
À 17:36
Solides et rentables, elles restent sereines même si, par précaution, la plupart d'entre elles se révèlent moins prêteuses. La tendance est principalement dictée par les comptes courants en recul de près de 9%. La part des MRE dans les dépôts se stabilise autour de 20%. Face à la sous-liquidité qui pèse sur l'économie marocaine, la titrisation, novatrice, permettra aux banques d'accroître leurs ressources.
Actuellement se dessine le portrait d'un secteur bancaire marocain toujours en progression. Les indicateurs y restent logiquement positifs. Les banques ont ainsi augmenté leurs crédits à l'économie de 20% au premier trimestre 2009, portés par les prêts immobiliers et à la consommation. Il n'y a pas d'effets liés à la crise si ce n'est en matière de crédits automobiles. Les prêts immobiliers et à la consommation restent soutenus. Pour les banques qui, comme Attijariwafa bank et BMCE Bank, ont développé des sources externes de revenus, en investissant hors de leurs frontières, l'activité restera bonne en 2009. D'autres groupes marocains pourraient connaître des situations différentes. Ainsi, le CIH (Crédit immobilier et hôtelier) a déjà connu un ralentissement de l'activité en 2008, car, en voulant se positionner dans la banque de détail, il a perdu son rang de leader dans le crédit immobilier. Le système bancaire et financier solide, moderne et structuré a permis au Maroc de limiter l'impact de la crise financière planétaire.
Le Maroc n'a pas été durement touché par la crise actuelle grâce à l'équilibre de son système financier. Multiples institutions financières internationales convergent vers cette constatation : FMI, BM, BAD, BID… La donne est partagée notamment par les agences de notation, dont Fitch Ratings qui, en analysant l'étendue de l'exposition des banques de l'Afrique du Nord aux turbulences des marchés, conclut que le système bancaire marocain est bien placé pour y résister. D'autant que le cadre réglementaire est contraignant et n'a pas permis aux banques d'avoir des engagements importants envers des contreparties étrangères, et ce malgré des allègements progressifs depuis 2007. Le Maroc a fait face à cet ouragan financier et pourra faire face à d'autres chocs grâce aux réformes qu'il a entreprises depuis 15 ans et à une conjoncture agricole favorable.
Les différentes politiques sectorielles nationales, rationnelles et intelligentes, particulièrement le ''plan Maroc vert'', sont parmi les raisons qui ont prémuni le Royaume contre cette crise. La maîtrise des impacts de la crise financière dépend notamment de l'amélioration de la capacité d'achat des citoyens, l'appui de la classe moyenne et une bonne gouvernance aux niveaux politique, économique et social. Le système bancaire marocain "se porte bien" confirmant sa capacité à résister aux répercussions de la crise financière mondiale, a affirmé le ministre de l'Economie et des Finances, Salaheddine Mezouar, qui répondait en fin avril à une question sur "la crise financière mondiale" devant la Chambre des conseillers, comme en témoigne la confiance dont il jouit auprès des investisseurs et opérateurs économiques. Sur le terrain, la liquidité monétaire connaît un retournement de situation depuis 2007, en passant d'une surliquidité à une sous-liquidité. C'est désormais la principale préoccupation aussi bien de la Banque centrale et du département des Finances que des banques, promoteurs touristiques et immobiliers ainsi que des industriels en général.
Au cours de l'appel d'offres du 20 mai 2009, Bank Al-Maghrib a servi un montant de 15 milliards de dirhams au titre des avances à 7 jours au taux de 3,25% pour un montant demandé de 17,8 milliards de dirhams. Cette situation de sous-liquidité représente un danger potentiel pour l'économie nationale. Il faudrait s'attendre à un durcissement des conditions d'octroi de crédits aussi bien pour le compte des particuliers que des entreprises. L'incertitude demeure quant à la capacité des banques à résister durablement à un ralentissement économique mondial prolongé. Elles pourraient, dans ce cas, réaliser des performances en baisse et voir une détérioration de leur qualité d'actifs du fait d'un environnement macro-économique local moins favorable. Cela pourrait exacerber les difficultés actuelles du système bancaire, telles que leur faibles qualité d'actifs et niveau de capitalisation, et compromettre leurs avancées récentes dans ces domaines. Au Maroc, le tourisme, secteur économique prioritaire, devrait être touché, poussant les banques à augmenter leur niveau de provisionement. Le niveau des liquidités nécessaire pour accorder des crédits vient d'être augmenté, ce qui a forcément des conséquences sur les crédits nouvellement octroyés.
De plus, certaines banques ont limité leurs provisions en 2008 pour améliorer mécaniquement leurs bénéfices. Elles devraient être contraintes à plus d'efforts en 2009. De quoi amputer leurs profits… Innovation et pas des moindres. La titrisation (cf page finance) a fait son entrée dans les statistiques officielles du Groupement professionnel des banques du Maroc (GPBM). Le concept, existant officiellement depuis 1998, a été utilisé à ce jour uniquement par le CIH (un cumul de 3 milliards DH). Seulement, sur le plan de la comptabilisation, ces opérations n'apparaissaient pas sur les statistiques. Désormais, les chiffres du GPBM signalent, à titre indicatif, l'encours des prêts immobiliers titrisés. A fin mars 2009, cet encours atteint 1,96 milliard DH. -----------------------------------------------
Ressources «novatrices»
Etape cruciale dans le processus de la réforme et de la modernisation du secteur financier marocain, la nouvelle loi sur la titrisation (décret d'application adopté par le Conseil des ministres du 7 mai) est d'autant plus utile qu'elle est innovante. Structurante, elle ouvre de nouvelles perspectives, crée des passerelles entre la sphère du crédit et celle de l'épargne et fournit de nouvelles possibilités de financement de l'économie nationale pour une accélération de la croissance. Ses mécanismes permettront, entre autres, de financer les infrastructures, accroître les ressources des banques (celles-ci ont enregistré un déficit des trésoreries de 13 MMDH à fin avril 2009), améliorer leurs ratios de solvabilité… Par ailleurs, les créances éligibles à la titrisation sont estimées à plus de 500 MMDH sous la loi 33-06, alors que ce montant ne dépassait pas 60 MMDH sous la loi 10-98. De même, cette année, au moins 2 Fonds de placement collectif en titrisation (FPCT), totalisant 2 à 3 MMDH, sont en phase de structuration et de nouvelles sociétés de titrisation sont en projet. En outre, il est à noter que le volume de l'épargne institutionnelle détenu par les banques est d'environ 120 MMDH.