41,5 millions DH pour la réhabilitation des trois grandes tanneries
Les tanneurs tablent sur l'appui du gouvernement pour insuffler une nouvelle dynamique à une activité en perte de vitesse.
LE MATIN
12 Juillet 2010
À 13:01
Les tanneurs de Fès se mettent à niveau. Et il était temps. Le secteur du cuir vit des moments difficiles alors qu'il était la référence de la ville.
La diminution des effectifs, du chiffre d'affaires, des investissements et de la productivité, conjugué au tassement de la croissance et à la détérioration de la compétitivité mettent en mauvaise posture les tanneurs de Fès. Ils ont d'ailleurs saisi l'occasion de la visite éclair du Secrétaire d'Etat chargé de l'artisanat, Anis Birou le 5juillet qui est venu s'enquérir de l'état des tanneries, pour réclamer plus d'appui du gouvernement à l'activité.
Les tanneurs tablent surtout sur la mise à niveau des trois grandes tanneries traditionnelles de Fès Chouara, Ain Zliten et Sidi Moussa pour insuffler une nouvelle dynamique à l'activité. Le site des battoirs (gharna) jouxtant la tannerie Choura est d'ores et déjà réhabilité dans le cadre de l'INDH. Le secrétariat d'Etat en charge de l'artisanat dédie à son équipement une enveloppe de 5,3 millions DH. « Une enveloppe globale de 11,5 millions DH est dédiée à la mise à niveau de Chouara dont 5,3 millions DH est consacrée par l'INDH à réhabilitation et l'achat des vêtements protecteurs aux tanneurs, 3,5 millions DH pour l'équipement, 0,8 millions DH d'équipement et 1,9 millions DH consacré à l'étude technique supportés par le secrétariat d'Etat à l'artisanat », précise Abderrahim Belkhayat, Délégué régional de l'artisanat dans une note sur les tanneries traditionnelles de Fès.
La mise à niveau de la tannerie Ain Zliten devrait absorber quelques 16 millions DH (14 millions DH pour le ré aménagement et 2 millions DH pour l'équipement). De son côté la tannerie de Sidi Moussa nécessite pour sa mise à niveau, une enveloppe de 14 millions DH ( 12 millions DH pour la réhabilitation et 2 millions DH pour l'équipement ).
« Les travaux de réhabilitation dont les trois tanneries ont besoin sont entre autres le renforcement et la réhabilitation des constructions avec la réparation des murs, des plafonds et des réservoirs ( les sahrijs), la réhabilitation des façades, la menuiserie, l'entretien et la réhabilitation du réseau d'électricité, la réhabilitation du réseau d'assainissement et la mise en place d'un système de collecte des déchets pour limiter la pollution et préserver l'environnement », précise Abderrahim Belkhayat.
L'idée étant d'améliorer les conditions de travail des tanneurs et rendre leur environnement quotidien plus attractif pour un meilleur développement de l'activité.
La plus grande étant la Tannerie Chouara qui s'étale sur quelque 7115 m2 dont 4000 m2 couverts. Elle comprend 193 ateliers, occupant plus de 419 artisans et produisant quotidiennement de 2977 à 5132 de peaux de cuir traitées. La tannerie Ain Zliten s'étale sur 1103m2 dont 480 m2 couverts. Elle dispose de 57 ateliers de travail occupant 229 artisans et produisant quotidiennement de 990 à 2010 peaux traitées. La tannerie de Sidi Moussa s'étale sur 2300 m2 dont 1168m2 couverts. Elle dispose de 62ateliers et occupe plus de 115 artisans et apprentis et produit de 2022 à 2845 peaux traitées.
Ces tanneries sont par ailleurs une composante importante de l'économie régionale. Outre l'approvisionnement de l'industrie de cuir en matières premières de qualité et leur rôle social en tant que génératrices de l'emploi, elles attirent, grâce à leur cachet médiéval et leurs fosses multicolores, prés de 90 % des touristes en visite à Fès. Ne dit on pas jadis « Dar Dbar Dar Dhab », « Maison du cuir maison de l'or ».
Interview: Anis Birou Secrétaire d'Etat chargé de l'Artisanat.
«La délocalisation des tanneries n'est pas au programme»
Pourquoi vous avez effectué une visite éclair le 5 juin aux tanneries traditionnelles de Fès ?
Anis Birou Les tanneries traditionnelles de Fès représentent une part importante du patrimoine nationale. Et c'est important de les préserver et de les réhabiliter. Il fallait donc faire le déplacement pour les visiter, voir l'état des lieux et aussi pour rencontrer les tanneurs et discuter avec eux pour connaitre leurs besoins et doléances. Et puis au-delà de la composante historique de ces tanneries, il y a une composante socio-économique importante. Les trois tanneries font travailler prés de 900 personnes et produisent quotidiennement prés de 10 mille peaux traitées. Les réhabiliter et les mettre à niveau permettrait de préserver l'emploi et sauvegarder une activité économique et un pan important de l'artisanat national. Ces tanneries sont abritées dans des constructions très fragiles notamment la tannerie de Ain Zliten et celle de Sidi Moussa et les tanneurs y sont exposés à plusieurs risques d'accidents et de maladies à cause des matières utilisées dans le traitement des peaux et des conditions de travail difficiles.
Est-ce qu'il n y a pas une réflexion pour délocaliser ces tanneries dans d'autres sites de la ville pour faire face à la pollution engendrée par l'activité?
Je ne pense pas qu'il y aura la délocalisation de la tannerie Chouara. C'est une grande tannerie chargée d'histoire. Elle a besoin d'être réhabilitée pour améliorer les conditions de travail de ses tanneurs et leur productivité. C'est aussi une destination touristique par excellence qui attire prés de 90% des touristes en visite à Fès. Sa mise à niveau est sur les rails et il lui est consacré une enveloppe de 11,5 millions DH. La délocalisation des autres tanneries n'est pas au programme. Mais si cela devrait se faire, il se fera en accord avec tous les intervenants du secteur. L'urgence aujourd'hui est de réhabiliter les sites des tanneries, améliorer les conditions d'hygiènes et de sécurité et sauvegarder les emplois. Il y a aussi des problèmes de foncier qu'il faut résoudre. Les sites abritant les tanneries sont propriétés des Habous et du privé.
Peut-on savoir où en est aujourd'hui le PDRA de Fès ?
Le PDRA Fès-Boulemane est le premier du genre lancé dans le cadre de la vision 2015 pour l'artisanat. C'est un plan exemplaire et constitue un modèle pour les autres régions du Royaume qui va créer des emplois et augmenter le volume des ventes de produits d'artisanat. Il est aujourd'hui sur les rails et il est doté d'une enveloppe budgétaire de 1,344 milliard de DH pour le réussir. Ce plan, enrichi par les projets inscrits dans le MCC, fera de cette région une locomotive pour le développement national du secteur de l'artisanat.