13 Mars 2013 À 13:26
Le Matin Eco : Avez-vous constaté une augmentation du nombre de patients étrangers qui viennent se faire soigner au Maroc ?Professeur Salaheddine Slaoui : Il y a effectivement une affluence particulière des étrangers et leur nombre augmente ces dernières années pour trois raisons. La réputation de la chirurgie esthétique marocaine est excellente. Les Marocains sont formés, comme leurs collègues européens, soit en Europe, au Brésil ou aux États-Unis. D’ailleurs, la première clinique dans le monde spécialisée en chirurgie a vu le jour au Maroc dans les années 1950. Mais le nombre de chirurgiens plasticiens reste faible et ne dépasse pas les 50 ou 55. Au Maroc, les patients profitent et font du tourisme avec la même qualité de soins que dans leurs pays d’origine. Plusieurs d’entre eux découvrent le pays pour la première fois et viennent parfois en famille. Enfin, il y a les avantages financiers. Les prix chez nous sont entre le tiers et la moitié des prix pratiqués en Europe
Quels sont les principaux pays émetteurs pour le Maroc ?Nous recevons trois catégories. Les demandes européennes sont représentées par la France, l’Espagne, l’Italie, la Hollande et l’Amérique, surtout Canada où les durées d’attente avant l’opération sont très longues. La deuxième demande émane des Marocains qui vivent à l’étranger et qui connaissent le niveau de la chirurgie marocaine. La troisième, et c’est très important de le souligner, c’est la demande africaine. Ces patients viennent d’Algérie, de Mauritanie, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, du Burkina-Faso et de la Guinée. Le créneau africain mériterait d’être plus développé pas seulement en chirurgie esthétique, mais en médecine en général.
Comment s’organise, à votre niveau, le tourisme médical ? Je fais partie de ceux qui essayent de se limiter à la profession de médecin. Le premier contact avec les patients étrangers se fait par Internet. A partir de ce moment, on établit un devis approximatif. Les personnes qui viennent de l’étranger s’occupent elles-mêmes de leur billet. La seule faveur qu’on peut leur faire, c’est que le chauffeur de la clinique va les attendre à l’aéroport pour les amener à la clinique puis les rendre à l’aéroport. Si jamais ils le désirent, le secrétariat peut les aider à réserver une chambre à l’hôtel pour leur séjour extra clinique, car les gens qui viennent de l’étranger passent seulement une à deux nuits en clinique, mais restent une ou deux semaines au Maroc. C’est vous dire qu’il y a des retombées économiques positives pour le pays. C’est ce que les Tunisiens ont compris depuislongtemps.
Est-il vrai que les médecins européens refusent d’assurer le suivi des patients opérés au Maroc ?
Nous sommes extrêmement déçus, et nous l’avons dit dans toutes les instances, par le comportement inamical, anti-déontologique et anti-éthique de nos confrères européens, français en particulier. Les chirurgiens esthéticiens français disent tout haut, dans les micros, dans les congrès à leurs confrères qu’ils refusent de prendre en charge un patient qui a été opéré en Tunisie ou au Maroc. Le tourisme esthétique a toujours existé, mais dans l’autre sens et il y a encore des Marocains et des Tunisiens qui vont en France pour se faire opérer. Et les médecins français ne se soucient pas de savoir qui va s’occuper d’eux une fois de retour au Maroc.
La Société marocaine d’ingénierie touristique a introduit dans son agenda le tourisme médical. Quelles sont vos attentes ?Je souhaite que l’État aide les médecins marocains qui ont décidé d’investir dans ce créneau au niveau de la fiscalité, des crédits et de l’aspect juridique... Les médecins se sentent un peu vulnérables.