L'entrepreneur principal assure en cas d'insolvabilité
LE MATIN
18 Janvier 2009
À 12:50
Question du salarié
«Je suis salarié dans une entreprise de sous-traitance spécialisée dans le l'éclairage public. Dernièrement, la société a rencontré des difficultés financières. D'ailleurs, nous n'avons pas, mes collègues et moi, reçu nos salaires depuis deux mois. Toutes les tentatives pour trouver une solution avec le directeur de l'entreprise ont échoué. Ce dernier nous demandait à chaque fois de patienter. Pis encore, des rumeurs circulent actuellement sur l'intention de la direction de procéder au licenciement de la moitié des effectifs de l'entreprise. Ces rumeurs n'ont pas encore été confirmées, mais un responsable au service des ressources humaines s'est refusé de faire un commentaire. C'est pour cette raison que nous voulons avoir des informations sur les dispositions du Code du travail concernant les sous-entreprises. Est-ce que l'employeur est tenu de verser toutes les indemnités dues aux salariés en cas d'insolvabilité ? Les salariés d'une entreprise de sous-traitance ont-ils le droit d'ester en justice ? »
Avis de l'employeur
L'entreprise transite par une période particulièrement délicate en raison de la forte concurrence qui règne actuellement sur le marché. Nous avons perdu presque le tiers de nos clients en quelques mois seulement. Cette situation a poussé la direction à adopter une nouvelle stratégie. Malheureusement, nous avons rencontré également quelques difficultés financières. Les crédits, dont dispose l'entreprise actuellement, ne sont pas suffisants pour payer les salaires de tous les employés. Cela ne veut pas dire, bien évidemment que les salariés ne vont pas recevoir leurs rémunérations.
Nous allons d'ailleurs organiser une réunion avec les représentants des salariés pour trouver un terrain d'entente. La solution à cette situation ne saurait tarder. Enfin, la direction saisit cette occasion pour démentir toutes les rumeurs sur l'intention de l'entreprise de licencier des salariés. Il s'agit seulement d'informations purement fausses et infondées. Tous les salariés seront donc maintenus dans leurs postes.
Propos recueillis par Mohamed Badrane
Conseil du juriste
Le Code du travail a prévu le recours à des sous-entreprises pour l'exécution d'une partie du travail. Le recours se fait par le biais d'un contrat dit de sous-entreprise. En effet, l'article 86 du Code du travail stipule que le contrat de sous-entreprise est un contrat écrit par lequel un entrepreneur principal charge un sous-entrepreneur de l'exécution d'un certain travail ou de la prestation de certains services. Toutefois, le recours aux prestations de ses entreprises est toléré uniquement s'il est en faveur de l'entreprise principale et ne porte pas préjudice aux intérêts des salariés.
Le sous-entrepreneur, en sa qualité d'employeur, est chargé de respecter toutes les dispositions du Code du travail et des textes législatifs et réglementaires (carte de travail, bulletin de paie). Selon l'article 88, le sous-entrepreneur doit porter sur la carte de travail et le bulletin de paie les mentions fixées par l'autorité gouvernementale chargée du travail. En outre, il est tenu de se conformer à toutes les dispositions législatives et réglementaires en matière de sécurité sociale, des accidents de travail et des maladies professionnelles.
Pour sa part, l'entrepreneur principal assume également des responsabilités. En effet, si le sous-entrepreneur n'est pas inscrit au RC (registre de commerce) et n'est pas propriétaire d'un fonds de commerce, l'entrepreneur principal est tenu de veiller à l'application des dispositions du Code du travail relatives aux conditions de travail et de salaire vis-à-vis des salariés du sous-entrepreneur.
En cas d'insolvabilité du sous-entrepreneur non inscrit au RC et non affilié à la CNSS, l'entrepreneur principal est tenu, à concurrence des sommes dues au sous-entrepreneur en faveur des salariés travaillant pour le compte de ce dernier, de procéder au paiement des salaires du personnel de la sous-entreprise. Cependant, selon l'article 91, l'entrepreneur principal n'est responsable que si un avis de défaut de paiement des salaires lui est adressé, dans les 60 jours qui ont suivi la date d'exigibilité des salaires du dernier mois ou de la dernière quinzaine, par l'autorité locale ou l'inspecteur du travail.
Par ailleurs, l'entrepreneur principal doit en cas d'insolvabilité du sous-entrepreneur verser l'indemnité du congé annuel payé, les indemnités de licenciement. Il est également tenu de procéder au versement des cotisations à la CNSS, le versement de la TFP (taxe relative à la formation professionnelle) et la réparation des AT et MP si les travaux sont exécutés dans son établissement ou ses annexes.
Enfin, les salariés lésés et la CNSS peuvent intenter des actions judiciaires contre l'entrepreneur principal en cas d'insolvabilité du sous-entrepreneur.
Source : Abdessamad Drissi, inspecteur du travail
Ce que dit la loi
Article 89
Dans tous les cas, que les travaux soient exécutés ou les services soient fournis dans les établissements de l'entrepreneur principal ou leurs dépendances ou qu'ils soient dans des établissements ou des dépendances autres que les siens ou qu'ils soient exécutés par des salariés travaillant à domicile, et en cas d'insolvabilité du sous-entrepreneur non inscrit au registre de commerce et non affilié à la Caisse nationale de Sécurité sociale, l'entrepreneur principal est tenu, à concurrence des sommes dues au sous-entrepreneur en faveur des salariés travaillant pour le compte de ce dernier d'honorer les engagements suivants :
- Le paiement des salaires sous réserve des dispositions prévues à l'article 91.
- L'indemnité de congé annuel payé.
- Les indemnités de licenciement.
- Le versement des cotisations à la CNSS
- Le versement de la taxe relative à la formation professionnelle
En outre, lorsque les travaux sont exécutés ou les services sont fournis dans ses établissements ou leurs dépendances, il est responsable au regard de la réparation des accidents de travail et maladies professionnelles.