À quand la fin de la discrimination ?

« La formation des notaires doit être au niveau des responsabilités de la profession »

Conformément aux termes de la convention signée le 15 septembre 2010, entre la Caisse de dépôt et de gestion (CDG) et la Chambre nationale du notariat moderne du Maroc (CNNMM), visant notamment l'assistance nécessaire par la Caisse aux activités des notaires ainsi qu'au développement de la profession notariale et leur accompagnement, la CDG a structuré un partenariat entre l'Université internationale de Rabat (UIR) et la CNNMM, et ce pour la couverture du volet formation.

Taoufik Azzouzi, notaire, membre du conseil d'administration du Centre international de médiation et d'arbitrage de Rabat

16 Octobre 2011 À 19:25

Une cérémonie de signature d'un accord-cadre a eu lieu le mardi 11 octobre 2011 sous la présidence effective du ministre de la Justice, maître Mohamed Taïb Naciri, et de Anass Houir Alami, directeur général de la CDG, partenaire officiel du notariat marocain. Cet accord marque le début d'une coopération durable entre une profession juridique en pleine mutation et la première université privée sous contrat avec l'État.
--------------------------------------------------------

Le Matin emploi : Comment sont formés les notaires ? Ces derniers suivent-ils une formation au sein d'un institut spécialisé ?

Taoufik Azzouzi :
Actuellement, la profession est régie par un ancien texte qui date du 4 mai 1925. D'après ce texte, sont admis à effectuer le stage du notariat les candidats titulaires d'une licence en sciences juridiques ou économiques, ou d'un certificat d'aptitude délivré par une école de notariat reconnue. En l'absence d'un institut de formation, les clercs de notaires ne bénéficient d'aucune formation pendant la période de leur stage, dont la durée minimale est de quatre ans. De ce fait, les clercs se voient contraints de s'autoformer afin de se préparer aux examens de premier clerc et professionnel, ce qui réduit manifestement leur chance de réussite.
Néanmoins, et face à cette situation qui ne profite à personne, des initiatives en matière de formation ont pu voir le jour dans certaines villes du Royaume, notamment à Rabat, à Mohammedia, et à Casablanca. Mais, et ceci est regrettable, les clercs effectuant leur stage dans les autres régions restent donc livrés à leur sort, ce qui malheureusement contribue à approfondir les disparités entre les régions du Royaume, phénomène auquel nous nous efforçons de nous attaquer à travers plusieurs projets de formation innovant, notamment l'accord-cadre signé tout récemment avec l'UIR.

Il existe désormais un partenariat entre l'UIR et la Chambre des notaires relatif à la formation des notaires. En quoi consiste ce partenariat ?

Ce partenariat est d'abord le fruit d'un long travail, il se veut un projet structurant qui s'inscrit dans le cadre d'une stratégie globale tracée par le conseil d'administration de la Chambre nationale. Il vise également à pallier le vide juridique dont souffre la profession, puisqu'il faut rappeler qu'avec le texte de 1925, toujours en vigueur pour régir la profession, nous ne disposons pas d'un institut de formation propre au notariat, et comme le projet de loi 32-09 tarde à venir, nous avons pris notre courage à deux mains et avons décidé de franchir le pas. Grâce à ce partenariat, la profession s'appuiera sur le réseau de compétences de l'UIR et sur son expertise académique dans la préparation et l'organisation de programmes et de modules de formation destinés aux notaires, aux clercs de notaires, au personnel des études notariales et, surtout, aux notaires formateurs qui se chargeront de transmettre leur savoir faire aux jeunes notaires.
Arrivée à maturité, la profession, par le biais de son représentant unique la CNNMM, a choisi de prendre les devants et de gérer elle-même cette phase transitoire.

Quelle formation et quels modules seront dispensés ? Qui sont les intervenants ?

L'accord de partenariat que vient de signer la Chambre nationale du notariat moderne du Maroc avec L'UIR entre dans le cadre de l'ouverture de la Chambre sur son environnement académique. Cet accord vise deux principaux objectifs : la mise à niveau de L'étude notariale et une représentation optimale de la profession au niveau national et international. En ce qui concerne le premier volet, la formation ciblera les différents intervenants au sein de l'étude notariale, c'est-à-dire le notaire, les clercs de notaire et les collaborateurs (personnel permanent de l'étude notariale). Un programme de formation sera dédié à chaque catégorie selon les besoins recensés par le comité pédagogique, qui se chargera d'établir un catalogue annuel de formation pour chaque cible. Par ailleurs, la formation des notaires portera sur le volet juridique, jurisprudentiel ainsi que sur la médiation, la communication et la gestion de l'étude.
En ce qui concerne les clercs de notaire, la formation couvrira, entre autres, les domaines suivants : la déontologie et les règles de la profession, la pratique notariale, les techniques contractuelles, la méthodologie et sur d'autres thèmes juridiques. Quant à la formation des représentants de la profession (élus au niveau régional et national), elle comprendra des disciplines afférentes au management des projets, la communication et les pratiques de la bonne gouvernance. Ces formations seront assurées par un corps professoral composé de notaires, d'experts et de spécialistes dans des domaines pointus, ainsi que des universitaires nationaux et étrangers.

Qu'en est-il de l'Institut marocain du notariat ?

La création d'un institut de formation professionnelle repose sur trois piliers essentiels, le dispositif juridique, les moyens financiers et enfin, le plus important, l'ingénierie de la formation. Dans notre cas, nous avons choisi de commencer par ce dernier point car si vous disposez d'un projet bien ficelé, vous êtes certain de trouver un bailleur de fonds pour le financer et vous n'aurez pas de difficultés à convaincre les pouvoirs publics de mettre en place le dispositif réglementaire qui va avec.

Qu'en est-il de l'observatoire de recherche et des études notariales, à quoi servirait-il ?

La pérennité et le développement du notariat au Maroc dépendent largement de sa capacité à intercepter et analyser les changements qui affectent son environnement juridique, économique et social. Notre profession ne devrait plus subir les conséquences des mutations que connaît notre société, bien au contraire, elle devrait s'y coller pour anticiper toute forme de dérapage, seul moyen à mon avis, pour préserver sa notoriété et son image qui, je le rappelle, forment un préalable pour lui permettre de jouir pleinement de son rôle de garant de la sécurité juridique.
Ce but, à mon avis, ne sera atteint qu'une fois que la profession aura investi le domaine de la recherche et des études, et c'est ce que nous tenterons de faire via cet observatoire qui sera le couronnement des efforts d'un programme de formation riche et diversifié. L'idée a été encouragée par les différents intervenants lors de la journée de la signature de la Convention, organisée par la CDG. Le représentant du ministère de la Justice et le président de la Chambre des notaires ont montré leur détermination à aller de l'avant pour mettre à niveau cette profession qui joue un rôle social et économique indéniable.

Carte de visite

• À propos de la CNNMM (Chambre nationale du notariat moderne du Maroc)
Actuellement présidée par maître Ahmed Amine Touhami El Ouazzani, la CNNMM est créée en 1979 conformément aux dispositions du dahir du 15 novembre 1958, elle est de ce fait le représentant de la profession notariale au Maroc. La Chambre nationale compte actuellement 897 notaires en exercice et a pour principal objet la défense des intérêts de la profession et la veille au respect de la déontologie et de l'éthique professionnelle. Le mode de fonctionnement de la CNNMM repose sur deux instances : le conseil d'administration et le bureau exécutif.

• À propos de l'UIR (Université internationale de Rabat)
Présidée par Noureddine Mouaddib, l'UIR, première université privée sous contrat avec l'État, est née de la volonté d'offrir des formations d'excellence à la jeunesse marocaine et africaine. Soutenue par les États marocain et français et par des partenaires académiques, industriels et institutionnels de premier ordre, l'UIR propose des formations dans des domaines de pointe : classes préparatoires scientifiques et économiques, sciences politiques et juridiques, aérospatial, automobile, naval, spatial et ferroviaire, électronique, logistique, informatique et télécommunications, énergies renouvelables, business, management, finance et fiscalité. L'UIR, qui accueille cette année plus de 500 étudiants, a déposé 3 brevets en matière d'énergie renouvelable et a créé sa première Start Up.
Copyright Groupe le Matin © 2025