De 135 MDH versés en 2009 au Fonds national de développement du sport, la MDJS compte porter sa contribution à hauteur de 400 MDH en 2015. Voilà le défi que cette institution, créée en 1962, compte relever. Mais pour plusieurs personnes interrogées, la MDJS est la caisse noire de l'Etat.
LE MATIN
12 Octobre 2010
À 12:24
«Caisse noire de l'Etat», voilà la réponse fournie par la majorité des personnes à qui nous avons posé la question : quelle est la mission de la Marocaine des jeux et des sports ? Une image qui ne colle pas avec la vraie mission de cette entreprise qui œuvre inlassablement pour le développement du sport national, comme nous l'a bien précisé Younès El Mechrafi, administarteur-directeur général de la MDJS. Créée en 1962, la mission de la MDJS consiste à accompagner le sport national, nous a-t-il expliqué. De ce fait, l'entreprise verse annuellement au fonds de développement du sport 18% de son chiffre d'affaires brut. Toujours selon M. Mechrafi, la MDJS a versé au fonds précité 135 MDH au terme de l'exercice 2009 et 104 millions en 2008.
Aujourd'hui, l'objectif est beaucoup plus ambitieux, affirme Mechrafi puisque, à court terme, la Marocaine des jeux et des sports compte porter sa contribution à hauteur de plus de 400 millions de dirhams. Pour atteindre cet objectif, la MDJS entend se développer davantage. L'effort, affirme Mechrafi, portera notamment sur Cote & Foot avec la possibilité de parier sur le score à la mi-temps, à la fin du temps réglementaire, sur le premier but marqué, etc.
Pour ce qui est des jeux instantanés, de nouveaux tickets à gratter devraient faire également leur apparition sur le marché national. Enfin, concernant également sa stratégie de développement, la MDJS a aussi pris l'engagement de lancer, à travers son site Internet (www.mdjs.ma), au moins un jeu en ligne avant la fin de l'année, a indiqué Younès Mechrafi.
La Marocaine des jeux et des sports entend aussi élargir sa clientèle. Elle compte ainsi séduire les femmes. Selon Mechrafi, les femmes sont prédisposées à jouer à condition que la MDJS leur assure un certain confort et une certaine confidentialité. L'ouverture de point de vente par exemple dans des salons de coiffure ou autres endroits fréquentés par les femmes n'est pas exclue.
Concernant le risque de dépendance, Mechrafi se veut rassurant en affirmant que la MDJS pratique le jeu responsable. «Nous sommes certifiés "jeux responsables" par la World Loto Association. Cela veut dire prévenir l'addiction au jeu et protéger les mineurs. Nos points de vente ne sont pas implantés à côté des mosquées ou des écoles. Nous avons ainsi une charte d'éthique qui stipule que la protection des mineurs est un souci présent dans toute la stratégie de développement adoptée par la MDJS. Elle appelle également les joueurs à se fixer un budget minimal pour le jeu qui doit rester juste un moyen de divertissement et non pas une source de revenus et ne jamais emprunter de l'argent pour jouer. El Mechrafi assure également que la MDJS travaille activement pour obtenir le niveau 2 de cette certification.
Mais selon le sociologue Mohamed Serbouti, l'appât du gain pour ceux qui ont des petits salaires ou ceux qui n'ont pas de travail est grand. En dépit donc des mesures prises, il y a toujours un risque de devenir dépendant.
Ce n'est pas tout. La MDJS s'est fixé plusieurs autres objectifs à atteindre avant la célébration de son cinquantenaire prévu en 2012, notamment son fameux projet Cap 50 qui ambitionne de renforcer quantitativement et qualitativement sa présence sur le marché marocain des paris sportifs.
Réunir plus de fonds au profit du fonds national de développement du sport est une initiative louable, mais il faut qu'il se fasse dans le cadre du respect des principes d'éthique pour éviter de ruiner certaines âmes faibles qui courent derrière l'illusion de devenir riches un jour en décrochant le jack pot. Entre jouer juste par loisir et jouer pour gagner, il n'y a qu'un fil ; c'est pour cela que la MDJS et les autres opérateurs du jeu du hasard doivent doubler d'efforts pour prévenir l'addiction.
Interview: Younès El Mechrafi, administarteur-directeur général de la MDJS.
« La MDJS est une entreprise qui pratique le jeu responsable»
Matin Sports : Quelle est la mission exacte de la Marocaine des jeux et du sport ?
Younès Mechrafi : La principale mission de la MDJS est le financement et le soutien du sport à travers le versement de sa contribution au fonds national de développement du sport.
Vous réfutez donc l'idée qui avance que la MDJS est une caisse noire de l'Etat ?
Moi je réfute catégoriquement cette idée qui est absolument fausse. Pour ce qui me concerne, je fais un virement au fonds national de développement du sport qui correspond à 18% de notre chiffre d'affaires brut. On a versé 135 millions de DH pour le compte de l'exercice 2009, 104 millions de DH pour l'exercice 2008 et à peine 40 millions de DH en 2001. Ce budget est la contrepartie du monopole que nous accorde l'état.
Quel est le nombre de personnes qui pratiquent ce jeu au Maroc ?
Selon nos statistiques, 14% de Marocains en âge de jouer jouent. Ce chiffre représente 850.000 joueurs réguliers. Sur l'ensemble des Marocains en âge de jouer, 50% sont réfractaires aux jeux du hasard et 50% ne le sont pas. Sur les 50% qui ne sont pas réfractaires, 14% jouent de manière régulière et les 36% restant se déclarent disposés à jouer s'ils étaient sûrs que leur argent iraient au développement du sport ou aux actions humanitaires. C'est ce que nous faisons exactement à la MDJS. Toutes nos actions visent à soutenir directement le développement ou à venir en aide aux associations qui œuvrent dans ce sens. D'ailleurs, je me définis comme un incubateur de projets à vocation sportive et sociale. On essaye à la MDJS de contribuer avec modestie au lancement d'événements sportifs et au bout de trois ou quatre ans une fois que le projet arrive à maturité on le laisse prendre son envol tout seul et on soutient un autre.
Quel est le profil d'un joueur de la MDJS ?
C'est un homme âgé de 18 à 45 ans des catégories C et D qui n'a pas fait d'études supérieures, qui a un revenu moyen de 3.000 DH et qui dégage entre 1000 et 1100 DH pour ses loisirs.
Combien mise en moyenne un joueur marocain ?
La mise moyenne au Maroc est de 100 DH par an, alors qu'elle est de 190 euros en Europe et 135 euros en France par an. Nous avons un point de vente pour 30.000 habitants contre un point de vente pour 2000 habitants en Europe. La modestie de la mise annuelle et le faible maillage du réseau de vente sur le territoire rendent nos perspectives de développement énormes.
Quelles sont donc vos perspectives de développement?
Nous avons des ambitions réalisables et réalistes. Je pense que nous allons atteindre nos objectifs. Nous sommes aujourd'hui, à 800 millions de DH du chiffre d'affaires. Notre ambition est d'atteindre 1,85 milliard DH du chiffre d'affaires en 2015. Et cela grâce à différentes actions qui vont être mises en place par notre partenaire Intralot qui est tenu contractuellement à développer le chiffre d'affaires sur les cinq prochaines années. Et cela en développant le réseau de vente. Aujourd'hui, notre réseau est de 1200 points de vente. Intralot doit porter ce réseau à 4500. S'il n'atteint pas ces objectifs, il payera des pénalités.
Quelle est votre part de marché ?
Pour le moment, trois opérateurs se partagent le marché des jeux aux Maroc. Le PMUM qui réalise un chiffre d'affaires de 4,2 milliards de DH, la MDJS qui réalise 800 millions de DH et la loterie nationale avec 500 millions de DH. Par rapport au PMUM, nous avons des parts de marché à prendre.
Est-ce que vous avez relevé des personnes accros aux jeux ?
Honnêtement, on n'a pas ce genre de problème. Pour votre information, la MDJS est une entreprise qui pratique le jeu responsable. Nous sommes certifiés "jeu responsable" qui protège les mineurs et qui évite l'addiction.
Est-ce qu'il vous arrive de refuser à quelqu'un de jouer ?
Ça arrive. Souvent on tempère les ardeurs de nos joueurs. Par exemple quand quelqu'un gagne, il peut nous arriver de ne pas lui verser son gain dès qu'il se présente. On lui demande de revenir dans trois ou quatre jours pour faire baisser son euphorie. C'est ce qu'on appelle des bests practices. On fait aussi de l'accompagnement psychologique soit pour les grands gagnants ou pour ceux qui jouent trop. Mais chez nous, on n'est pas dans ce schéma. Non seulement nous sommes certifiés dans le niveau un dans le référentiel de l'association mondial de loterie, mais nous préparons en ce moment le passage au niveau 2 de la certification.