04 Novembre 2013 À 14:08
Le championnat national vit sa troisième saison de professionnalisme, avec une lutte sans fin entre les clubs pour figurer sur le palmarès des titres nationaux et continentaux. Loin des regards, plusieurs clubs, qui ont jadis fait la gloire du ballon rond au Maroc, crépissent dans les divisions inférieures, en attendant un retour parmi l’élite. Beaucoup de ces formations «historiques» se trouvent aujourd’hui dans la difficulté, alors qu’elles figuraient parmi le gotha des clubs nationaux, aussi bien par les titres qu’elles ont glanés, que par le nombre incalculable de joueurs de talents, que ces clubs ont fournis. L’exemple le plus frappant est celui de deux équipes : le Stade marocain et le Chabab de Mohammedia. Le premier fût créé à Rabat, en 1919. La formation était composée en majorité, par des joueurs travaillant à l’office des chemins de fer et a commencé à se distinguer, dès sa première décennie, en remportant la ligue du Maroc de football, en 1928, 1931 et 1944. Le deuxième titre était assorti d’une place de vice-champion d’Afrique du Nord.
Le Stade était aussi un véritable «réservoir», qui fournissait des joueurs de niveau international. À l’image d’Abdelkader Raïs, Antaki, le gardien Hajjam et l’attaquant Bouchta, pour ne citer qu’eux. Certains se sont même reconvertis dans d’autres volets du football, comme Hassan Chafaï, devenu arbitre par la suite. Après l’Indépendance, le Stade marocain a continué à se distinguer lors des premières éditions de la Coupe du Trône. En effet, entre 1957 et 1974, le club a totalisé onze participations, dont notamment deux demi-finales en 1957 et 1965, perdues face au Mouloudia d’Oujda et au Kawkab Marrakech, respectivement. Un glorieux passé bien loin de la réalité actuelle, où le club r’bati se trouve parmi les clubs du championnat amateur 1, qu’il a rejoint depuis sa relégation, au terme de la saison 2011-2012.
Difficile de croire que le Chabab Mohammedia, champion du Maroc 1979-1980 et de la Coupe du Trône en 1975, et qui déplaçait des foules immenses au stade El Bachir, crépit actuellement en championnat amateur. Le club fédalien avait fourni l’un des meilleurs attaquants marocains de l’Histoire, en la personne d’Ahmed Faras, capitaine de l’équipe nationale, championne d’Afrique en 1976. Acila, Haddadi ou encore le keeper Tahar Raâd avaient été les figures de proue de l’équipe rouge et noir. Au terme de la saison 2010-2011, le SCCM était relégué chez les amateurs. Son dernier fait d’armes remonte au huitième de finale de la Coupe du Trône, perdu face au WAC, la saison passée.
Le Matin sports : Quelle est votre impression sur ces clubs qui ont eu leur heure de gloire et qui végètent depuis quelques années en division amateur ?Mohamed Ajaka : C’était le bon vieux temps où dans chaque équipe il y avait 3 ou 4 internationaux, voire plus et le spectacle était garanti. Et pourtant, à l’époque il n’y avait pas les moyens que les joueurs ou les entraîneurs ont aujourd’hui. L’infrastructure s’est développée et les exigences du football ne sont plus les mêmes. Sincèrement, je regrette que des équipes qui étaient prestigieuses végètent dans la division amateur.
À qui incombe la responsabilité des faits qui ont conduit à la situation actuelle ?En premier lieu, il y a les dirigeants qui n’ont pas su gérer comme il se doit ces clubs. Il n’y a pas eu de relève, ni de formation tant chez les joueurs que chez les techniciens. Il est vrai que l’absence de moyens financiers a terriblement contribué à cette chute. Ensuite, il faut dire que les autorités locales n’ont rien fait pour soutenir ces clubs.
Quelle est la différence avec le football d’aujourd’hui ?Le football a évolué, c’est certain parce qu’il y a plus de moyens et de meilleures installations. Mais, malgré l’implication de dirigeants gestionnaire, les clubs vivent dans la misère. À l’époque, certains dirigeants étaient presque analphabètes, mais ils savaient diriger les clubs. Même le spectateur était «propre» et allait au terrain en famille pour se défouler. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Propos recueillis par Abdeslam Bilali
Le Matin sports : Que vous inspire la situation de certains clubs qui ont presque disparu ?Abdellah Settati : Cela fait de la peine en particulier les équipes qui ont joué les premiers rôles en première division. Il y avait de belles équipes avec des internationaux qui faisaient le spectacle. Tout cela a disparu et les clubs ont été livrés à eux-mêmes. C’est regrettable.
En tant qu’ancien entraîneur national, qu’est-ce qui a changé dans le paysage footballistique marocain ?Le football a stagné. Le Maroc a participé plusieurs fois à la Coupe du Monde et aux Jeux olympiques, ce n’est pas normal que des clubs disparaissent alors qu’ils ont été les fournisseurs de l’équipe nationale. On n’aurait pas dû passer au professionnalisme du premier coup, mais aller doucement avec un semi-professionnalisme pour mettre en place les structures adéquates.
Cela vous fait mal de voir un club comme la RSS, que vous avez entraînée, végéter en amateur ?Bien sûr que cela me fait mal. Il n’y a pas que la RSS, mais plusieurs clubs qui ont presque disparu. Et pourtant la matière première, c’est-à-dire les joueurs, est là, mais ils ne sont pas suivis comme il le faut. Propos recueillis par Abdeslam Bilali