LE MATIN
05 Août 2025
À 15:59
Ce sera un jeudi, le jour du début d’application à divers pays des nouveaux
tarifs douaniers américains unilatéralement surélevés. Ces taux vont de 10 à 50%, fixés selon des
justificatifs politico-idéologico-économiques divers. Cela va de la riposte au jugement d’un partenaire idéologico-politique (Bolsonaro, le Brésilien), à la pression contre un pays qui annonce vouloir reconnaître l’État indépendant de
Palestine (le
Canada), ou bien qui, comme l’Inde, achète du pétrole bon marché à la
Russie, ou encore à une pléiade de pays accusés de concurrencer déloyalement les produits américains ou bénéficiant d’un excédent commercial à l’égard des
États-Unis. Autant d’arguments plus ou moins tangents qui mettent le commerce international dans une situation d’expectative, et qui confirment que le libre-échange n’a jamais été une loi économique établie, si ce n’est un levier politique utilisé selon les besoins des pays avancés, en alternance ou en cumul avec le protectionnisme.
Que se passera-t-il alors le 7 août ? Rien ou presque. Pour deux raisons au moins : Un deal, un nouveau Yalta, semble avoir été conclu entre la Chine et les
États-Unis, les deux puissances mondiales. Les droits de douane trumpiens élevés, appliqués sans droit de réciprocité, concernent soit de «petits» pays, soit des pays ou même des puissances commerciales jugés inféodés, comme l’Union européenne. Celle-ci, embourbée dans la guerre en Ukraine, a vitalement besoin du parapluie militaire américain. Elle se trouve, du coup, livrée à la déferlante des produits chinois qui mettront à plat nombre de ses secteurs, dont l’automobile.
Le Président Trump s’est appliqué à amortir l’effet prix sur les consommateurs américains en ménageant ses deux grands fournisseurs de biens de grande consommation ou stratégiques : la Chine et le Mexique, avec lesquels les négociations continuent.
L’enjeu américain est-il alors géostratégique ou simplement commercial ? Ou les deux ?
Si rien ou presque ne risque de se passer à court terme, il n’est pas sûr qu’à terme, le commerce mondial se porte bien. À moins – ce qui n’est pas exclu – qu’un revirement américain n’intervienne. Soit du propre gré du président, soit du fait des institutions américaines, quand bien même le Parti républicain tient les rênes.
Cela étant dit, l’Afrique n’est pas épargnée. Des pays subiront lourdement les effets de droits de douane qui renchériront leurs produits bruts – minéraux, végétaux ou textiles – souvent produits uniques à l’exportation. Ce sera par exemple le cas de l’Afrique du Sud, de l’Algérie, de la Libye (+30%), ou de la Tunisie, de la Côte d’Ivoire, du Cameroun, de la République démocratique du Congo (RDC), du Mozambique, du Zimbabwe (+15 à 25%). L’AGOA (La Loi sur la croissance et les possibilités en Afrique), qui était censée soutenir les pays «pauvres», se trouve de fait décriée, tout comme l’USAID suspendue.
Serait-ce le bon moment pour pousser les pays africains à valoriser localement leurs produits, seuls ou en partenariat avec des pays voisins, en chaînes de valeurs régionales ? Serait-ce un coup de pouce pour la Zlecaf ? Ce serait le mal qu’on souhaiterait au continent.
En tout cas, le Maroc a longtemps plaidé pour le partenariat Sud-Sud renforcé et s’y applique. «Les Africains doivent faire confiance à l’Afrique» est une maxime célèbre de
S.M. le Roi Mohammed VI.