Culture

«Khamssa W Khmiss» : le manifeste de Jaylann pour la femme marocaine

Après avoir ému tout un pays avec «Ha Wlidi», devenu un phénomène digital cumulant plus de 37 millions de vues et lui valant une mise en lumière sur l’écran géant de Times Square en tant qu’artiste Spotify, la chanteuse marocaine Jaylann dévoile «Khamssa w Khmiss», un nouveau titre profondément ancré dans la mémoire collective. Un hommage vibrant aux femmes du Maroc, à leurs gestes silencieux, à leurs transmissions et à un patrimoine vestimentaire ancestral.

08 Décembre 2025 À 17:29

Un portrait musical des femmes du Maroc

Depuis ses débuts remarqués dans «The Voice Arab», Jaylann trace un chemin singulier : une voix puissante, mais surtout une intention artistique claire : chanter le Maroc intime. Avec «Khamssa w Khmiss», elle poursuit cette exploration, après avoir dédié «Ha Wlidi» aux liens familiaux et à la nostalgie.



Cette fois, l’artiste se tourne vers celles qui ont façonné son imaginaire : les femmes marocaines, «dignes, persévérantes, généreuses, tenant bon dans le silence et le sourire». Le morceau s’écoute comme un remerciement, un geste de reconnaissance envers celles qui transmettent valeurs, langue, beauté, courage et histoire. «Je voulais célébrer chaque femme marocaine et montrer que je suis fière d’être l’une d’elles», confie-t-elle.

Musicalement, le titre plonge dans l’héritage sonore du pays : ʿOud, Loutar, Bendir, violon, sons enregistrés en live, et une interprétation qui s’approche du Chaâbi, de la Aïta, de ses respirations, de ses appels, de son intensité. Une évolution assumée dans sa manière de chanter, à la recherche d’un geste plus authentique et incarné.

Un clip-manifeste, entre patrimoine et émotion

Réalisé par Farid El Malki, le clip embrasse la même ambition culturelle. Tourné au Chellah, site mythique et hautement personnel pour l’artiste – là où son père est né, où sa famille a grandi, où la musique a commencé – il devient un espace de mémoire autant qu’un décor visuel.

Aux côtés de la styliste Bouchra Ennokra, épaulée par Fati Mez et Amal Benayad, le projet met en lumière une vingtaine de tenues ancestrales venues des quatre coins du pays : le «Caftan fassi Khrib» et le «Caftan de Fès brodé à la Ghorza», le «Haik d’Oujda» avec «Blouza orientale», le «Caftan traditionnel rabati», le «Caftan de Tétouan» ou encore la «Malhfa sahraouiya», le «Haik essaouiri», la «Ksoua juive» et la «Tenue sahraouie d’Errachidia». Un voyage textile qui révèle la diversité, la mémoire et la symbolique du vêtement marocain, loin du seul caftan contemporain.

Pensé comme un tableau vivant du Maroc, le clip met en scène des femmes portant ces vêtements, non pas comme folklore, mais comme archives vivantes : textures, gestes, couleurs, dignité.

Un projet collectif, un geste culturel

«Khamssa w Khmiss» est signé Jaylann et Beathoven (composition et lyrics), avec des arrangements de Beathoven et Mourad El Madani. La chorégraphie est signée Zakaria Bennane, scellant un travail d’équipe guidé par une vision commune : montrer un Maroc fier, nuancé, pluriel.

Au-delà d’une sortie musicale, le projet s’affirme comme une contribution culturelle, une manière de ré-ancrer le patrimoine marocain dans le présent, de rappeler que la modernité n’efface pas l’héritage : elle en dépend.
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