Defis du matin

Hausse des prix du poulet : les éleveurs dénoncent la mainmise des lobbys et l’absence de régulation

Alors que les prix du poulet continuent d’enregistrer des niveaux élevés sur le marché national, les éleveurs montent de nouveau au créneau.

19 Octobre 2025 À 10:35

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L’Association nationale des éleveurs de volailles de chair (ANMDC) tire la sonnette d’alarme sur une situation qu’elle qualifie de « déséquilibrée et inquiétante », pointant du doigt l’influence de certains lobbys et l’absence de contrôle effectif dans un secteur stratégique pour la sécurité alimentaire du pays.

Le président de l’ANMDC, Mohamed Aâboud, contacté par Assahra Al Maghribia, décrit une filière minée par des pratiques spéculatives et une concentration excessive du marché. « Le secteur du poulet de chair vit dans une situation d’anarchie et d’iniquité, marquée par le monopole de quelques acteurs puissants et l’absence d’une véritable régulation », souligne-t-il.



Selon les données de l’association, le coût réel du poussin ne dépasse pas 3 dirhams, alors qu’il est vendu aux éleveurs à des prix oscillant entre 7 et 14 dirhams. Cette marge, jugée disproportionnée, profite à un nombre restreint d’entreprises, au détriment des petits et moyens producteurs. L’association estime que cette situation « étouffe la compétitivité du secteur et fragilise la rentabilité des éleveurs ».

L’ANMDC fait également état de variations hebdomadaires injustifiées dans le prix du poussin, qui peut passer du simple au double sans explication économique claire. En 2024, le prix a même dépassé les 14 dirhams l’unité, un record jugé « incompréhensible » au regard du coût de production. L’association met en cause un manque de transparence dans la formation des prix et regrette l’absence de mise en œuvre du dispositif de traçabilité prévu par la loi 28-07, censé garantir le suivi du produit de la ferme au consommateur. Elle dénonce également le rôle néfaste de certains intermédiaires et courtiers, accusés de spéculer sur les prix et de perturber le fonctionnement normal du marché.

L’association rappelle également que les alertes sur les déséquilibres structurels de la filière ne sont pas nouvelles. Depuis l’échec du premier contrat-programme de 2011, les professionnels réclament des mécanismes de régulation capables de rétablir un juste équilibre entre les différents maillons de la chaîne. L’ANMDC appelle ainsi le ministère de l’Agriculture et les autorités concernées à intervenir de manière urgente pour protéger les éleveurs, garantir la transparence du marché et préserver le pouvoir d’achat du consommateur marocain.

Au-delà de la conjoncture, les éleveurs estiment que la filière avicole, pilier de la production nationale de protéines animales, mérite un nouveau cadre de gouvernance fondé sur la concertation, la transparence et la responsabilité. « Sans un rééquilibrage urgent du marché, des milliers d’éleveurs risquent la faillite », avertit l’association, qui appelle à une refondation de la filière dans une logique de durabilité, d’équité et de souveraineté alimentaire.
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