S.Ba.
05 Décembre 2025
À 15:24
D’emblée,
Adil Lamnini rappelle l’origine de cette initiative, née au lendemain du Discours Royal sur le
capital immatériel en 2013. « Lorsque
Sa Majesté le Roi a mis en avant la notion de capital immatériel, nous avons compris que les
marques marocaines étaient un véritable actif stratégique », explique-t-il. Avec un groupe d’entrepreneurs, il met alors en place un programme novateur : aider les
TPE-PME à structurer leur marque, à se protéger juridiquement et à gagner en visibilité. Car l’objectif initial était clair : « petites entreprises, grandes marques ». Le président de l’APMM insiste : « 98 % de l’économie marocaine, ce sont des TPE-PME. Ce sont elles qui produisent, innovent et emploient. Il fallait leur donner des outils pour devenir compétitives, chez nous comme à l’international. »
Un label encore méconnu, mais désormais doté d’un cadre clair
Malgré son succès initial, le label a souffert de confusion. Dans l’opinion publique, il apparaît encore flou, voire malmené. Adil Lamnini l’admet sans détour : « Oui, il y a eu de la confusion. C’est normal quand un label existe sans certification officielle alignée sur les standards internationaux. Aujourd’hui, cette étape est franchie. »
Le rappel du ministre de l’Industrie,
Ryad Mezzour, lors de la Journée nationale de l’industrie, a clarifié les règles : un produit ne peut être déclaré
Made in Morocco que s’il intègre au moins 40 % de valeur locale ou s’il subit une transformation substantielle. Un principe fixé par l’
Organisation mondiale du commerce, que le Maroc devait intégrer pleinement. « Nous ne faisons que nous aligner sur la norme internationale. C’est une nécessité pour notre crédibilité », affirme Lamnini. Et de souligner la différence fondamentale entre labellisation et certification : « La certification est un acte légal, assuré par un organisme comme
Imanor. La labellisation, c’est du marketing, de la promotion. Les deux sont indispensables et complémentaires. » Avec l’entrée d’Imanor dans le dispositif, un tournant s’opère. « On ne peut pas avoir une labellisation forte sans une certification forte », insiste-t-il. « Il nous aura fallu dix ans, mais ce délai est court à l’échelle des transformations de ce type. »
Made in Morocco : ce que porte ce nom
Tout ce qui est produit au Maroc ne peut pas automatiquement revendiquer le label. Et Lamnini remet les pendules à l’heure : « Tout ce qui se fait chez nous n’est pas Made in Morocco. Il y a des règles. Et il faut les respecter. » Dans l’
agroalimentaire, par exemple, le rôle de l’
ONSSA est central : contrôles des intrants, de la transformation, de la commercialisation. Les produits importés sont soumis aux mêmes exigences. Mais une difficulté demeure : l’économie informelle, très présente dans certains secteurs. « On ne peut pas prétendre représenter le Maroc si l’on travaille dans l’informel. Mettre le drapeau marocain sur un emballage, cela doit être un acte de responsabilité », prévient-il. Le Made in Morocco doit être synonyme d’exemplarité — fiscale, sociale et qualitative. « La bonne gouvernance n’est pas réservée aux grandes entreprises. Elle commence par déclarer ses employés et payer ses impôts. »
Au-delà de l’encadrement, le président de l’APMM défend une vision ambitieuse : les marques marocaines doivent penser mondial. « Brand local, think global », résume-t-il. Le marché national est essentiel, mais insuffisant : « Le Maroc, c’est 38 millions d’habitants. Le monde, c’est 8 milliards. Il faut sortir, exporter, assumer notre identité. Le Maroc fait vendre. »
Dans cette perspective, les détails comptent. Il évoque notamment le
code-barres marocain, 611 : « On oublie souvent de l’utiliser. Pourtant, c’est la première information qui dit au consommateur d’où vient le produit. C’est stratégique. »
Adil Lamnini salue par ailleurs l’engagement constant des gouvernements successifs sur ce dossier stratégique : « Nous avons travaillé avec quatre ministres de l’Industrie, et tous ont compris l’importance du Made in Morocco. La crise du Covid l’a encore renforcée, en mettant en lumière l’urgence de la souveraineté industrielle. » Si certains s’inquiètent de la faible croissance économique qui freinerait l’émergence de marques puissantes, lui préfère l’optimisme : « Le Made in Morocco est un projet de long terme. Il a besoin d’accompagnement, d’audace et de patriotisme économique. Nous avançons. » Et de conclure avec force : « Promouvoir une marque marocaine, c’est aussi promouvoir son pays. Mais cela impose une exemplarité totale. Mettre le drapeau, c’est un engagement, pas un argument marketing. »