LE MATIN
23 Novembre 2025
À 15:35
La région de
Souss-Massa, principal bassin de
production de légumes d’hiver au
Maroc, traverse une période critique. Touchées par des
conditions climatiques extrêmes durant l’été, les
exploitations agricoles peinent à produire les volumes habituels. La pénurie de plants résistants et les maladies qui frappent les cultures ont déjà provoqué un net recul de la
production de tomates et de poivrons, explique
Amine Amanatoullah, producteur à Agadir à la plateforme
FreshPlaza.
« Chaque producteur essaie de se débrouiller seul. Il n’existe pas de solution collective face à la pénurie de plants cette saison », alerte-t-il. Il pointe également du doigt le manque d’alternatives biologiques efficaces, aggravé par les récentes mises à jour des listes de produits phytosanitaires autorisés au Maroc et en Europe, qui ont retiré plusieurs substances jusque-là utilisées pour protéger les cultures.
Les
prix des légumes ont déjà commencé à grimper sur le marché national. Les
poivrons, en particulier les variétés douces, atteignent des niveaux records, tandis que les
tomates, bien que peu exportées cette saison, se vendent à des prix élevés localement. Jusqu’à présent, le marché européen a été épargné, grâce à une production locale qui s’est prolongée exceptionnellement cette année. Mais selon Amanatoullah, cela ne durera pas : « Il est très probable qu’une pénurie se fasse sentir dès février, aussi bien au
Maroc qu’en
Europe. »
Les inquiétudes sont renforcées par les récentes inondations survenues dans la région de
Dakhla, dans le sud du pays. Si les dégâts sont limités à certaines
variétés de tomates dites « de segmentation », leur absence pourrait néanmoins peser lourd sur le marché national. Ces variétés jouent en effet un rôle de substitution lorsque les tomates rondes viennent à manquer. Or, le Maroc n’importe pas de tomates ou d’autres légumes précoces, ce qui rend l’offre encore plus vulnérable.
Les prochains mois s’annoncent particulièrement tendus, d’autant qu’ils coïncident avec deux événements majeurs : la
Coupe d’Afrique des Nations, qui se tiendra entre décembre et janvier et devrait aussi stimuler la demande locale, puis le
Ramadan, période de forte consommation alimentaire. La combinaison de ces facteurs, dans un contexte de faible production, alimente le risque d’une envolée des prix, voire de nouvelles restrictions à l’export, comme celles imposées par le gouvernement marocain en 2023.
Pour les consommateurs comme pour les professionnels du secteur, les prochaines semaines s’annoncent délicates. Si la situation ne s’améliore pas rapidement dans les champs, les étals risquent de porter la trace directe de cette
crise agricole silencieuse, mais déjà bien entamée.