LE MATIN
30 Octobre 2025
À 11:00
Une fois de plus, le calendrier de la
campagne marocaine de légumes précoces est chamboulé. À
Agadir, cœur névralgique de la production destinée à l’export, les premiers
légumes d’hiver ne sortiront de terre qu’à la mi-novembre, avec plus d’un mois de retard sur les habitudes du secteur. En cause : des conditions climatiques extrêmes durant l’été, qui ont perturbé l’ensemble du cycle agricole.
Mohamed Ait Elmkadem, directeur général du producteur-exportateur
Orisud, évoque sans détour les conséquences du
réchauffement climatique sur le terrain. « Le retard de cette saison est une manifestation évidente du
changement climatique qui frappe le
Maroc. Il a été aggravé cette année par des
vagues de chaleur successives, notamment celle d’août, qui a compromis les plantations initiales », explique-t-il à la plateforme
FreshPlaza.
Les
semis de juillet et août, habituellement destinés à ouvrir la saison dès septembre, ont été largement détruits. Selon Ait Elmkadem, la chaleur extrême a non seulement entraîné la perte de jeunes plants, notamment de
tomates et de
poivrons, mais elle a également découragé de nombreux agriculteurs de replanter immédiatement, craignant la propagation de virus spécifiques à ces cultures dans des conditions de température élevées. À cela s’ajoute un facteur aggravant : la pénurie de semences. « Il est très difficile de se procurer les
graines nécessaires, ce qui a encore repoussé la replantation. Certains n’ont pas encore pu relancer leur production, d’autres n’en sont qu’à leurs débuts, et plusieurs ont même dû convertir leurs serres vers d'autres
cultures, faute de solutions », précise le producteur.
Les
variétés les plus touchées sont les tomates segmentées (type allongé ou grappe) et les poivrons, tandis que la tomate ronde, plus rustique, semble mieux résister. Si le volume total exporté devrait être rattrapé sur la fin de saison, notamment en mars-avril, les
impacts économiques à court terme pourraient être significatifs. Le démarrage tardif compromet l’exécution des contrats passés avec les distributeurs européens et risque d'entraîner une saturation soudaine des marchés à partir de décembre. « Beaucoup de volumes vont arriver en même temps, ce qui entraînera une
baisse des prix. Il est peu probable que l’on assiste aux pics habituels de janvier-février », anticipe Ait Elmkadem.
Alors que le
Maroc joue un rôle stratégique sur le
marché européen des primeurs, notamment en période hivernale, ces perturbations interrogent sur la résilience du modèle agricole national face aux
aléas climatiques. Pour les producteurs, cette saison s’annonce non seulement plus courte, mais aussi plus incertaine, tant sur le plan logistique que commercial. L’adaptation devient une nécessité urgente, dans un contexte où les anomalies météorologiques tendent à devenir la norme plutôt que l’exception.