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Impôt sur le revenu, concours et loi sur la profession : les avocats en colère

Au terme de sa réunion tenue en fin de semaine dernière, l'Association des barreaux du Maroc (ABAM) a émis un communiqué sans complaisance, avec notamment dans son viseur le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, qui «s'obstine dans sa campagne médiatique contre les avocats». L'Association annonce par le biais du même communiqué un programme de mobilisation qui débutera par une grève générale mardi et mercredi prochains au niveau de tous les tribunaux du Royaume.

06 Novembre 2022 À 17:15

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Les protestations des avocats ne fléchissent pas. S'il a été annoncé vendredi dernier la fin du bras de fer entre les robes noires et le gouvernement sur les mesures fiscales prévues dans le projet de loi de Finances 2023, ce même point ressurgit à nouveau, en plus de deux autres, pour motiver la grève annoncée dans le communiqué de l'ABAM. «C'est en raison de l'absence d'un procès-verbal notifiant l'accord conclu jeudi dernier entre les membres de l'ABAM et le ministre délégué chargé du Budget et le ministre de la Justice. De plus, aucun communiqué émanant de l'ABAM ou du porte-parole du gouvernement n'a été publié pour confirmer cet accord», nous explique l’avocat au barreau de Casablanca, Me Saïd Naoui.

La protestation contre les nouvelles mesures va donc se poursuivre, et l'ABAM, tout en valorisant l'initiative des présidents des groupes parlementaires visant à rapprocher les points de vue du gouvernement et des avocats, appelle le ministre délégué chargé du Budget à continuer le dialogue afin de parvenir à un arrangement satisfaisant. Dans son communiqué, l'ABAM déplore également que le ministre de la Justice persiste dans son offensive médiatique contre la profession d'avocat et le ciblage systématique de celle-ci en l'absence de «toute approche participative». L'ABAM fait ici référence au projet ayant fuité de la nouvelle loi régissant la profession d'avocat.

L'Association exige le retrait de ce projet de loi qui, entre autres, modifie les conditions d'accès à la profession, établit une distinction entre les avocats stagiaires, les avocats titulaires, les avocats de l'administration et les bâtonniers au moyen de galons fixés sur leurs robes, ou encore interdit aux entreprises tenues d'avoir un comptable ou dont le chiffre d'affaires dépasse trois millions de dirhams d'établir un contrat avec un avocat en tant que conseiller juridique, parce qu'il a été élaboré unilatéralement par le ministre de la Justice sans la moindre consultation des barreaux. L’ABAM appelle également à ne pas donner suite à l'invitation du ministre de la Justice à prendre part à la réunion de la commission chargée de superviser l'examen d'aptitude à l'exercice de la profession d'avocat prévue le 9 novembre. Cette passe d'armes entre l'ABAM et le ministre de la Justice a poussé la Coalition marocaine des Instances des droits de l'Homme, regroupant une vingtaine d'instances et d’associations, à adresser une lettre ouverte au Chef du gouvernement au sujet de «la situation préoccupante de la profession d'avocat» qui vit au rythme des protestations et des boycotts des audiences.

La Coalition met l'accent sur la nécessité de garantir un accès à la justice à toutes les catégories, en particulier les classes sociales vulnérables et précaires qui subiront à coup sûr l'impact des mesures fiscales prévues dans le PLF 2023, en appelant notamment à adopter une approche participative en ce qui concerne la taxation des avocats. La Coalition a également demandé au Chef du gouvernement de procéder à un réexamen complet du projet de loi régissant la profession d'avocat en associant toutes les instances représentatives de la profession.r> 

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